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Entretien avec Virginie Cady
Réalisé en juillet 2003 pour Chrysopée


Née en 1970, Virginie Cady s’est formée au scénario à l’école du court-métrage. En 1998, plutôt que de finir sa thèse de littérature moderne, elle participe en tant que co-scénariste à la série ARKEOD dont les tomes 1 et 2 sont parus chez Soleil Production.

Scénariste de JANUS dont le tome 1 vient de paraître chez Nucléa², elle est également professeur de scénario à l’Institut International de l’Image et du Son et de psychologie des apprentissages à l’Université de Paris XII.

Virginie Cady a été en outre comédienne et est actuellement danseuse et chorégraphe de la compagnie qu’elle a créée en janvier 2000.


Comment as-tu attrapé le virus de la BD?
Tout naturellement, en étant d’abord une lectrice assidue. J’ai commencé par dévorer les vieux Pilote de ma mère et lorsque je les ai eu terminé, ma grand-mère m’a offert mon premier Tintin. Comme beaucoup, j’ai été abonnée des années au journal de Mickey et à Spirou et j’attendais le facteur toutes les semaines avec impatience. Les livres et les BD étaient les récompenses des carnets de notes parfaits et c’est une carotte qui a toujours très bien marché avec moi ! ! !

Quels auteurs de BD t’ont le plus marqué, tant au niveau du dessin que du scénario et des personnages qu’ils ont crée ?
Alors le premier qui m’ait marquée, c’est Fred… j’avais trois ou quatre ans quand je suis restée scotchée sur un Philémon. Et mes idoles ce sont avant tout Franquin et Goscinny que je relis toujours avec le même plaisir.

Dans les choses plus récentes, j’ai adoré les premiers Bilal, ceux avec Christin. J’aime aussi beaucoup Bourgeon, Peeters et Schuiten.

Cette année j’ai eu un coup de cœur énorme pour Le combat ordinaire, Pilules Bleues, Lupus, Le chat du rabbin… et j’achète tous les Donjons et après tout ce que fait Sfar!

Silence de Comès est aussi un grand souvenir.

En fait, je crois bien que j’aime les choses un peu étranges, décalées, ou folles !

Devenir scénariste de BD, était-ce un rêve d'enfance? Quel est ton parcours ?
Je ne l’avais guère envisagé même si je me suis amusée à dessiner beaucoup en cours (de math surtout). J’avais même créé au Collège un petit personnage, un marin grec, une sorte d’Ulysse version amateur d’Ouzo, encore plus mauvais question orientation que le vrai.

Mais avoir une mère artiste peintre, cela peut-être extrêmement inhibant. J’avais beaucoup de mal à me hisser à son niveau et j’ai fini par me décourager totalement. J’ai toujours eu envie d’écrire, mais la BD me semblait réservée à ceux qui savaient aussi dessiner.

Petite, je me dirigeais plutôt vers la danse ou le théâtre. Ce n’est qu’une fois adulte que j’ai compris que je n’étais pas faite pour exécuter les œuvres des autres mais pour concevoir les miennes.

La diversité de mon parcours m’aide énormément. Toutes les expériences que j’ai vécues, je m’en sers pour écrire…. D’avoir été comédienne me permet, par exemple, de travailler mes dialogues comme s’ils devaient être dits sur une scène…

Mes études de lettres, que j’ai poussées jusqu'à un doctorat arrêté à un an de la fin en 98, année où j’ai commencé à travailler sur Arkeod, m’ont permis, quant à elles, de comprendre les mécanismes de la création littéraire.

Peux-tu nous en dire un peu plus sur ta participation à Arkeod ?
Tout ceci appartient au passé.

Le théâtre appartient-il désormais au passé ou est-il toujours d’actualité ?
A présent je me consacre à l’écriture et sur le plan de la scène, je suis revenue à mes premières amours : la danse !

J’ai monté une petite compagnie il y a 3 ans et nous commençons à nous produire un peu à l’extérieur.

Mais c’est vrai que le jeu me manque. Et puis j’aime beaucoup l’esprit de troupe.

Théâtre, danse, BD… Vous êtes partie pour explorer tous les arts !
Euh…. C’est peut-être un peu exagéré ! Disons que je trouve la vie trop courte pour ne pas tenter tout ce qui m’intéresse !

Petite digression : un petit mot sur le mouvement des intermittents?
En tant qu’auteur de BD, je n’ai pas le statut d’intermittent et en tant que comédienne ou danseuse, je n’ai pas tenté de l’obtenir par phobie de la paperasse… mais je me joins aux inquiétudes de mes amis intermittents. Un Etat qui ne soutient pas sa culture, à mon avis, est un Etat qui va mal… et je crois que ce n’est que le signe d’un malaise plus profond qui risque de toucher de plus en plus de classe de notre société.

Que t’apporte l’écriture ?
Je ne peux pas me passer d’écrire. Même en vacances j’emmène des carnets avec moi… L’écriture m’est indispensable. Je ne peux pas vraiment me l’expliquer. Mais quand je reste longtemps sans écrire, je ne me sens pas bien. En même temps, l’écriture est parfois un moment douloureux. C’est une attitude un brin masochiste mais je crois que je la partage avec beaucoup de gens qui ont une activité créatrice !


J'ai été emballé par Janus qui sort quelque peu des sentiers battus de la bande dessinée. Son atmosphère à part, le style des dessins étrangement léger, oscillant entre réalisme et humour et qui colle si parfaitement à l'intrigue, son atmosphère subtilement ésotérique... Comment est né ce projet et pourquoi avoir choisi de le situer à l'aube du vingtième siècle ?

Eh bien je suis très très flattée ! Vraiment ! C’est un projet auquel Régis et moi croyons beaucoup et nous sommes heureux de voir qu’il trouve son public !

Ce projet est né de notre rencontre. La première fois que j’ai parlé à Régis, c’était au téléphone. Il avait lu un de mes projets de SF et , s’il avait trouvé le tout cohérent et prometteur, mais il voulait passer à autre chose. Il avait un rêve : faire un comics à la française situé à la fin du XIX° ou au début du XX° siècle.

Ça a tout de suite fait « tilt » dans ma tête parce que si je ne suis plus une grande lectrice de comics depuis longtemps, je connaissais les pulps de Feuillade et j’adore les romans de cette époque : Maurice Leblanc, Gaston Leroux et Marcel Proust pour ne citer qu’eux !

En plus, j’adore Muchat et le style Art Nouveau et j’aurai adoré connaître Paris à cette époque.

En ce qui concerne l’ésotérisme disons que c’est une passion assez naturelle pour une petite fille élevée dans une maison du XV° siècle qui, jeune comédienne au chômage, arrondissait ses fins de mois difficiles en tirant les tarots et en lisant les lignes de la main !

Une chiromancienne ! Fichtre! Tu peux nous raconter ?
Ce serait un peu long… c’est ma grand-mère qui m’a appris. Elle m’a appris aussi les tarots de Marseille. Au début je l’ai fait pour épater les copains et puis au bout d’un moment, c’est devenu plus que ça...

Jusqu’au jour où ça a commencé à me bouffer la vie et où plein de gens venaient me voir uniquement pour ça.

A partir de là, j’ai commencé à faire payer et ça m’a permis de manger pendant que je faisais les cours Florent !

Comment s'est faite la rencontre avec Van Winsen, le talentueux dessinateur de Janus ?
Par l’entremise d’Yves Chelet. Je cherchais un dessinateur pour un autre projet et j’avais rencontré Yves quelques mois auparavant. Yves m’a plutôt bien cernée, je pense, et a pensé que la petite alchimie spéciale indispensable pour qu’un travail vraiment prometteur se fasse pourrait se produire entre Régis et moi.

C’est donc à Yves que nous devons le flair de nous avoir rassemblé ! Et je dois dire que je l’en remercie parce que les choses marchent vraiment bien entre nous et que c’est sans doute une des raisons pour lesquelles le projet semble aussi cohérent.

Comment organisez-vous votre travail Régis Van Winsen et toi?
Eh bien je lui envoie un synopsis détaillé, il commence les recherches puis je lui envoie des découpages très détaillés (il me faut 5 ou 6 pages pour décrire une planche) et Régis interprète mes informations en les mettant à sa sauce !

Ça se fait très naturellement car nous avons un bon feeling au niveau travail tous les 2 et nous n’avons jamais eu aucun grand désaccord en 2 ans !

En BD, on a souvent pour habitude de présenter le travail du dessinateur, mais beaucoup plus rarement celui du scénariste… Est-ce indiscret de te demander un exemple de tes découpage ?
Voilà la planche 32 ! Je l’ai prise parce que c’est une planche que j’aime beaucoup dans l’album et une scène que j’ai aimé écrire.

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Ton scénario est effectivement plus que détaillé… Combien de temps a pris la rédaction de l’ensemble du premier tome ? Fut-ce un travail solitaire? Comment te plonges-tu dans l’ambiance ?
La rédaction du premier jet du synopsis ne m’a pas pris longtemps mais tout le reste et surtout le découpage que vous voyez est un travail extrêmement long et lent. Surtout pour moi qui aime peaufiner les détails et suis assez maniaque pour passer 1 heure ou plus sur une seule phrase que je modifierai si ça se trouve 6 mois plus tard !

Sinon c’est un travail extrêmement solitaire puisque je suis incapable de travailler avec du monde autour de moi.

Au bout d’un peu moins de pas longtemps, je pars en live et je suis bavarde comme une pie ! smiley

Comment avez-vous perçu l'accueil fait à Janus lors de sa sortie sur les étals?
Je commence juste à réaliser que c’est à nous cette petite chose timide posée à côté des grosses piles de Bilal ! Pour l’instant, nous n’avons eu que des échos positifs. C’est à la fois extrêmement réjouissant et aussi angoissant.

Nous n’avions aucune pression pour le tome 1 et nous nous sommes amusés en nous disant que quoiqu’il advienne, nous aurions fait de notre mieux.

Pour le 2, nous devrons confirmer les promesses du 1 et ne pas décevoir les attentes des lecteurs…. D’où beaucoup beaucoup plus de travail !

Mais je suis heureuse de m’y remettre car j’aime vraiment cette histoire et ses personnages. Je me suis attachée à eux et depuis décembre que je ne les ai plus fait parler, à part pour quelques corrections de dernière minute, ils me manquent !


Parmi les personnages auquel tu as donné vie, y en a-t-il un que tu affectionnes particulièrement ?
Eva me ressemble par certains côtés. C’est une survivante. Elle est solide, indépendante, elle refuse de se couler dans le jeu social qu’elle devrait normalement adopter.

Thomas est un type bien, intègre, spontané. Il me ressemble aussi dans sa manière de se jeter à corps perdu et tête baissé dans la vie. Il a beau être brillant, il est incapable de calculs et a su rester toute sa vie enthousiaste.

Antinoüs est à l’opposé de moi mais ce genre de tempérament m’attire pour son côté mystérieux et inquiétant. Je le voulais beau parce que pour moi, le mal absolu n’existe pas. Ce qu’il y a de pire dans le mal, c’est qu’il est parfois séduisant. Et Antinoüs est la séduction incarnée.

Quant à Léopold, c’est un peu un croisement entre Woody Allen et Brad Pitt. Comment ne pas l’aimer ?! ! ! smiley

En gros, tu les aimes tous smiley
Bin oui ! J’aurai du mal à les faire vivre si je ne les aimais pas !

Tu sembles avoir beaucoup travaillé la psychologie de tes personnages… Comment t’y es tu pris ? Jusqu’où as-tu poussé ton travail autour des personnages, de leur caractère, de leur passé, de leur motivations ?

J’ai fait une bio et un arbre généalogique de chacun d’eux que les lecteurs ne verront pas avant la fin de l’aventure car je préfère distiller le passé de mes personnages au compte-gouttes !

Je sais à peu près tout de leur vie, leurs goûts, leurs envies, leurs buts dans la vie…

Je me sers beaucoup de mes connaissances en psychologie pour faire en sorte qu’ils aient une personnalité cohérente. Et je sais que ça a beaucoup aidé Régis à les « voir ».


Comment as-tu construit l’intrigue de Janus ? De quoi es-tu parti ?
Euh…. Bonne question…. Je crois me rappeler que la première idée qui m’est venue c’est celle du héros double. Mais comme Super Schizo ça me paraissait moyen comme idée, j’ai finalement trouvée celle-là.

En fait les choses me sont venues très facilement. J’avais des idées plein la tête. Le seul problème étant de tout noter assez vite pour ne rien perdre !

Pendant un temps, je n’avais même plus besoin de mettre la radio dans la voiture parce que je pensais toujours à mon petit monde qui se mettait en place. Un peu comme des pièces de puzzle qui se réarrangeraient presque toutes seules.

Les faire parler n’a pas été difficile non plus. Je les sentais tous bien vivants quand je m’y suis mise.

Je me souviens que j’étais super émue et anxieuse le jour où Régis m’a amené les premiers croquis des personnages…. Ça doit être un peu comme la première échographie ! smiley

L’élaboration de l’intrigue a-t-elle nécessité de longues recherches documentaires ? T’es-tu inspiré de mythes ou de légendes pour élaborer cet être bicéphale ?
J’ai fait pas mal de recherches sur l’époque, le début du XX° siècle. J’ai dépensé une fortune en livres sur les costumes et la mode et le design, je suis allée dans toutes les expos où l’on parlait de l’Art Nouveau… en ce qui concerne la mythologie, je suis partie des blancs dans ce que l’on sait du culte de Janus qui est assez mystérieux.

J’ai vu jusqu’où je pouvais aller pour que ça reste « plausible » tout en étant du fantastique.

Le principe du personnage hanté par un esprit fait penser à Nephilim, un jeu de rôle à forte connotation ésotérique. Pratiques-tu ou as tu pratiqué cette activité souvent controversée ? (je parle du JdR, pas de l’ésotérisme)
Euh non…. Je ne suis pas du tout portée sur les JDR. J’ai fait quelques jeux type Atlantis sur PC mais ça me lasse très vite. Je suis très mauvaise cliente pour ce genre de choses !

Tu devrais essayer le JdR, le vrai, sur table, c’est tout autre chose, un jeu à mi chemin entre le conte et le théâtre …
On me l’a proposé ainsi qu’une adaptation de Janus en JDR… je ne dis pas non. Je suis ouverte à toute proposition ! :0)

Peux-tu nous en dire un peu plus sur Janus, ce dieu méconnu à qui l’on attribue je crois deux ou trois visages selon les textes…
Eh bien pour en savoir plus, il faut venir sur le site ! Où tout sera expliqué…. Vous avez remarqué comme je suis forte en pub ? ;0)

Effectivement… A ce propos, félicitations pour le site, le design est fort sympatique !

Merci ! Et ça me touche d’autant plus que c’est l’homme de ma vie qui a conçu et réalisé l’interface graphique et programmé le tout. Je suis très fière de ce qu’il fait.

Parmi les sources qui t’on aidé à concevoir l’intrigue de Janus, aurais-tu un bouquin à proposer à ceux qui aimeraient en apprendre un peu plus sur le Paris de l’époque ?
A vrai dire, les ressources que j’utilisais étaient surtout des livres d’histoire de l’art, des plans du Paris de l’époque, des livres d’histoire, des guides et des recueils achetés en Grèce dont la plupart sont en anglais et je me suis beaucoup replongée dans Proust entre autres…

Mais sur le mythe du Janus, je conseille Le dictionnaire des Mythologies d’Yves Bonnefoy chez Flammarion et sur le français à l’époque de Thomas de Lancret, je conseille La langue du XVI° siècle (collection 128)…


Certains auteurs affirment qu’ils se laissent parfois surprendre par les êtres imaginaires qu’ils ont eux même crées… Es-tu parfois surprise par Eva, Antinoüs Thomas ou Léopold ?
Euh non…. J’ai un peu du mal avec ce genre de mythe. Si je ne les écris pas, ils ne vivent pas tous seuls ! Et je n’écris jamais en transe ou lors d’un dédoublement de personnalité. Donc la réponse est non. smiley

Par contre, je me surprends moi même à trouver ou oser des choses dont je ne me croyais pas capable. Et c’est surtout quand je relis l’album imprimé que j’ai du mal à croire que j’y suis pour quelque chose.

En général, je ne suis jamais satisfaite du résultat final !

J’ai vu que vous aviez un site web en préparation. Qu’allez-vous proposer aux internautes ?
Dans un premier temps, nous allons mettre en ligne une version html du site qui se présentera comme le site d’un journal écrit pour la plupart des articles, dans le ton de l’époque.

On y trouvera des rubriques classiques mais détournées pour éviter les spoilers et aussi pas mal d’infos sur le contexte que nous ajouterons au fur et à mesure.

Il y aura même une rubrique gastronomique !

Je pense qu’à terme, il devrait même y avoir petites annonces, météo et j’en passe….

En fait, je voulais un site qui doit ludique et qui apporterait autre chose que des infos de base. En plus, j’ai le webdesigner à la maison ! smiley

Es-tu une internaute invétérée ?
Quand je ne donne pas de cours, je passe à peu près 10h par jour à bosser devant l’écran…le net me permet de voir du monde, de discuter avec les collègues, de m’aérer un peu ! le premier geste de la matinée, c’est allumer l’ordi et regarder mes mails…. Donc on peut dire que je suis accro ! smiley


Si tu devais partir pour un séjour onirique sur la Lune, patrie du rêve et de l’imaginaire, quel bouquin (BD ou autre) emporterais-tu avec toi ?
Je déteste ce genre de question…. Je ne sais jamais quoi répondre ! pour contourner l’obstacle, disons que j’emmènerais toute ma bibliothèque sur Cd rom tout léger et qui prend pas de place ! smiley

Désolé, je le referais plus, snif… smiley

ça va pour cette fois… mais bon, faut pas que ça se reproduise ! smiley

Pour finir et comme le veut la toute récente tradition du site, et afin de mieux te connaître, un petit portrait chinois :

Si vous étiez une créature mythologique : Une sirène pour pouvoir pousser la chansonnette en nageant.
Si vous étiez un personnage historique : Sarah Bernhardt : une femme de talent, forte, qui sût se forger un destin.
Si vous étiez un personnage de théâtre : La Béatrice du Beaucoup de bruit pour rien de Shakespeare : une fausse mégère, libre, intelligente et pleine d’humour mais qui fond pour l’homme qui sait l’apprivoiser !
Si vous étiez un personnage biblique : Judith : une belle espionne qui séduisit Holopherne pour le décapiter dans son sommeil et sauver les siens. A côté d’elle, les James Bond girls, c’est vraiment de la gnognotte !
Si vous étiez un personnage de roman : Anna Karénine
Si vous étiez un personnage de BD: Gaston Lagaffe
Si vous étiez une oeuvre humaine: La grande bibliothèque d’Alexandrie

Le Korrigan