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Entretien avec Jacques Lamontagne
accordé aux SdI en mai 2010


Bonjour et merci de te (re)prêter au petit jeu de l'interview!
Mais, de rien!

Qu'est ce qui t'as donné envie de faire de la BD?
Tout petit, je me disais combien il devait être amusant de gagner sa vie en faisant de la BD. L'idée est resté bien ancrée dans une partie de ma mémoire, attendant le bon moment pour réapparaître. Elle aura été patiente car il lui aura fallu attendre que je sois dans la quarantaine avant qu'elle prenne vie.

Il y a quelques jours paraissait La naine aux ectoplasmes, premier tome de la série Aspic scénarisée par Thierry Gloris... Comment est née cette nouvelle aventure?
Elle est née de la volonté des auteurs de travailler un jour ensemble. Il y a de cela quelques années, Thierry et moi avions abordé le début d'une collaboration à un projet de série. Au même moment, la série Les Druides m'avait été proposée, ce qui avait mis un terme à ce projet. En 2009, lors de mon passage à Angoulême, Thierry et moi avons discuté à nouveau d'une collaboration. On a par la suite communiqué ensemble et regardé les différentes avenues possibles. Thierry m'a parlé de ASPIC, qui à l'époque portait le nom de "Les Carnets de l'Insolite ". Le Projet traînait depuis un moment dans ses cartons et attendait le bon moment pour éclore. Le concept m'a immédiatement plu.

Hugo ©Jacques LamontagnePeux-tu en quelques mots nous faire le pitch de cette nouvelle série?
ASPIC est dans la tradition des récits feuilletons de la fin du 19e. On suit Flora Vernet, jeune stagiaire chez le célèbre enquêteur Dupin, qui n'a qu'un désir, devenir l'égale, sinon supérieure à son mentor. Les deux personnages mèneront donc, chacun de leur côté, une enquête fort différente, mais étroitement liées, comme on l'apprendra plus tard. La série flirte également avec le fantastique et l'humour. De plus, elle est truffée de références à certains personnages issus de la littérature du 19e.

Dupin ©Jacques LamontagneDans le portrait chinois de notre premier entretien, tu proposais Sherlock Holmes comme personnage de roman... Les romans feuilletons du XIXième siècles ont-il fait partie de tes lectures?
Absolument. L'adolescence fut pour moi une période de découverte de ces auteurs qui ont marqué le XIXème. Je me gavais des Poe, Doyle, Leblanc,Vernes, Dumas etc. Je regrette cette période où on pouvait passer un week end entier à lire sans avoir d'autre préoccupation.

Dédicace ©Jacques LamontagneL'élaboration de l'album a-t-il nécessité de longues recherches iconographiques? Si oui, quelles furent tes principales sources?
J'ai amassé une solide documentation sur le Paris fin du 19e avec, entre autre, les photographies de Charles Marville et celles de Atget. Ces deux photographes avaient eu l'heureuse idée de prendre des clichés de Paname avant et pendant les grands travaux d'Hausmann. Vient ensuite d'autres bouquins sur la mode vestimentaire, les intérieurs etc...

On dit souvent de la colorisation numérique qu'elle est bien plus froide que la colorisation à l'ancienne... Pourtant, chacun de tes albums prouve que l'outil informatique permet de réaliser des planches éblouissantes... Pour Druide, tu utilisais une technique mixte alliant colorisation traditionnelle et numérique... Comment as-tu travaillé sur cette nouvelle série?
Tout à fait de la même manière que pour Les Druides. Je travaille toujours avec Photoshop et Painter, et j'intègre toujours des textures d'aquarelle traditionnelle sur certaines images. Le seul changement graphique est dans l'approche même du trait, qui est plus "rond", un brin plus « cartoonnesque ».

Faval ©Jacques LamontagneDu synopsis à la planche finalisée, comment as-tu organisé ton travail avec Thierry Gloris?
De la même façon que j'ai été habitué de le faire avec mes autres collaborations. Les travail débute par un premier croquis très rapide de la page que je soumets à Thierry. Ensuite, viens un storyboard plus abouti que je montre à nouveau à mon scénariste. Le plus souvent, on en discute au téléphone, quand il n'y a pas d'ajustement nécessaire, un long mail du genre « Parfait » m'arrive de la part de Thierry. :)

Par contre, on peut très bien discuter au téléphone pendant une demi-heure de banalité qui n'ont strictement rien à voir avec notre série. Comme on a pas le loisir de se rencontrer souvent en personne, ces échanges nous aident à oublier quelques instants ces quelques 5 000 km qui nous séparent.

Serait-il possible de voir les différentes étapes d'élaboration d'une planche, afin de mieux cerner ta façon de travailler?
Bien sûr!


Making-of
Etape 1 : rough ©Jacques LamontagneEtape 2 ©Jacques LamontagneEtape 3 ©Jacques LamontagneEtape 4 ©Jacques LamontagneEtape 5 ©Jacques LamontagneEtape 6 : Planche finalisée ©Jacques Lamontagne


Travailles-tu par de façon séquentielle en suivant la chronologie de l'album ou par scène en fonction de tes envies?
Toujours de façon chronologique. De toute manière, j'y vais avec le rythme de travail de mes scénaristes. Comme ces derniers travaillent sur plusieurs projets, il est rare que l'album soit entièrement scénarisé. Thierry n'échappe pas à cette règle et a l'habitude d'avancer le travail à coup de 10 pages environ.

Flora ©Jacques LamontagneComment as tu abordé le travail sur les personnages? Comment élabores-tu leur apparence et leurs attitudes?
On a tout d'abord discuté de chacun des personnages principaux. On a parlé de leurs tempéraments, de leurs caractéristiques physiques et psychologiques. Thierry m'a ensuite aiguillé sur certaines personnalités connues afin de mettre un « visage » sur nos personnages. Plusieurs croquis ont été faits afin de cerner nos héros. Ça prend tout de même un peu de temps avant de ne s'approprier de nouveaux personnages. Pour les attitudes, ça vient après quelques pages. Au fil de l'album, on cerne mieux l'âme de ceux-ci. Ça devient plus facile de savoir comment réagirait chacun d'eux devant une situation précise.

Quel effet cela fait-il de mettre en scène le personnage aussi emblématique que le vieillissant d'Auguste Dupin? Comment as tu crée son apparence?
C'est agréable de mettre en image un personnage aussi célèbre. On a l'impression de travailler avec une vieille connaissance. En tout début de projet, Thierry m'avait suggéré Jean-Pierre Marielle comme référence. De mon côté, j'avais en tête Philippe Noiret. Le résultat final est donc un mixte des deux acteurs plus un soupçon de mon père.

Line-up ©Jacques Lamontagne

L'album est truffée de références à la littérature de l'époque mais le dessin révèle aussi quelques clins d'oeil, à Hergé notamment... Les références graphiques sont-elles de ton fait ou figuraient-elle dans le scénario?
Pour Hergé, l'idée vient de moi. Le lieu était tout indiqué pour ce clin d'oeil. il se veut un hommage à l'auteur et à cet album que j'ai toujours considéré comme le meilleur de Tintin. Reste plus aux lecteurs qu'à trouver de quoi il s'agit.

Le salon de Dupin ©Jacques LamontagneJ'ai lu qu'Aspic s'organiserait sous forme de dyptique... Nous aurons donc le droit à d'autres enquêtes dans cet univers?
Nous l'espérons bien! Nous savons déjà de quoi parlera notre second diptyque. Ce sera... Grandiose!! smiley

Quels sont tes derniers coups de coeur, tous médias confondus?
La dernière claque visuelle, je l'ai reçue avec le film Avatar. Le scénario est bien, mais l'univers que Cameron à su développé m'a tout simplement jeté par terre. J'ai visionné le film dans une salle IMAX ( j'imagine que vous avez également ça chez vous ). Voir le film en 3D sur un écran haut de 7 étages est une formidable expérience.

Un grand merci pour le temps que tu nous as accordé... et... vivement le tome 2!


Le Korrigan