Bonjour et merci de vous prêter au petit jeu de l’entretien…
Question liminaire : êtes-vous farouchement opposé au tutoiement ?
Non
!
Merci bien… Peux-tu, en quelques mots, nous parler de toi? (parcours, études, âge et qualités, passions, numéro de carte bleue ou de comptes numérotés en Suisse ou aux Îles Caïmans?)
Je m’appelle Jérémie, mais on peut me trouver sous le pseudonyme Trèfle Rouge sur internet. J’ai 27 ans et j’habite à Dijon. Après le lycée, j’ai fait mes études à l’Ecole Emile Cohl à Lyon. Au bout de 4 années assez intensives, j’ai obtenu un diplôme d’illustrateur concepteur avec une option infographie. Après avoir fait un stage de character designer à Ubisoft sur « Assassin’s Creed Brotherhood », je me destinais à travailler dans des boîtes de jeu vidéo. Finalement, je me suis lancé dans l’aventure freelance où je continue à travailler pour le jeu vidéo, mais également pour l’édition jeunesse et le jeu de société … tout ça depuis mon atelier.
Sans indiscrétion, pourquoi Trèfle Rouge ?
Je suis un grand fan d’Alice au Pays des Merveilles. Au moment où je réfléchissais à un symbole, j’ai pensé à cette histoire et au moment où les soldats (en forme de cartes) de la reine veulent capturer l’héroïne. J’ai pensé au trèfle et vu que le rouge est ma couleur fétiche, c’est là que m’est venue l’idée. Puis ça tombe bien, j’aime bien les jeux de cartes
.
Serait-il possible de voir quelques-uns de tes travaux sur Assassin’s Creed ?
Je te joins l’artwork d’un des personnages du jeu réalisé en 2009. Il s’agit du premier templier que tu assassines dans Brotherhood, ainsi qu’un personnage jouable dans la version multijoueur : le bourreau.
Enfant, quel dessinateur étais-tu? Devenir illustrateur était-il un rêve de gosse?
J’ai toujours été attiré par le dessin. Je recopiais les personnages de Picsou Magazine, avec mes frères on s’inventait des aventures et des jeux de rôle à illustrer… . Ayant toujours baigné dans le médiéval fantastique, j’avais une réelle attirance pour des jeux comme « Magic The Gathering », « Baldur’s Gate » ou des livres comme « Bilbo le Hobbit », « le Seigneur des Anneaux ». Participer à l’élaboration ou la création d’univers de ce genre était mon rêve. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle j’ai eu une période quand j’étais ado où je faisais beaucoup d’illustrations « fantasy ». Depuis, mes goûts se sont diversifiés et je puise mon inspiration un peu partout.
Commencer dans le métier a-t-il relevé du parcours de combattant?
Même si aujourd’hui je vis de l’illustration, ça n’a pas toujours été une mince affaire. Quand tu sors de tes études, tu dois faire tes armes, rencontrer la première personne qui t’accordera sa confiance, décrocher le premier contrat. C’est un métier où il faut constamment se remettre en question, faire preuve d’humilité et surtout, être à l’écoute. Les choses se font petit à petit, il faut être patient. Il m’est arrivé d’avoir de très belles propositions à la sortie de mes études, mais la plupart n’ont pas abouti. C’est pourquoi, malgré les déceptions, il a fallu rester combatif ! Et ouf, je crois ne m’en être pas trop mal sorti
.
Quelles sont les grandes joies et les grandes difficultés du métier?
Le plus grand plaisir que peut éprouver un illustrateur, c’est de voir ses dessins prendre vie entre les mains des gens. Que ce soit au travers d’un livre ou d’un jeu, voir des personnes s’imprégner d’un univers grâce à nos images, c’est fantastique. Dans le cadre d’une intervention dans une école, quand je vois les enfants s’émerveiller quand je dessine devant eux, c’est très émouvant. La boucle est bouclée comme on dit.
Par contre, on n’est pas toujours libre dans les travaux que l’on réalise. La plupart du temps ce sont des travaux de commande, avec des consignes précises, des contraintes … . Il est très difficile aujourd’hui de proposer des univers originaux à des éditeurs, qui eux, prennent de moins en moins de risques et reçoivent beaucoup de propositions. Aussi, il faut avoir une certaine force de travail. Car quand on travaille dans ce milieu, on a tendance à ne pas compter les heures et oublier de prendre des vacances !
Tu signes les (nombreuses) illustrations de Timeline Challenge, une version de Timeline du grand Frédéric Henry mais avec un plateau, qui devrait paraître prochainement… Qu’est-ce qui t’a donné envie de travailler pour le jeu de société? Es-tu toi-même joueur?
Je pense sincèrement que mon envie de jouer à des jeux de société est due au fait que j’ai baigné très jeune dans le jeu vidéo (un de mes jeux cultes est d’ailleurs « Secret of Mana »). Au final ces deux familles ludiques ne sont pas si éloignées. Le jeu vidéo se nourrit du jeu de société et vice-versa (« Hearthstone » en est un bon exemple !). Vu qu’aujourd’hui je travaille une grande partie de mon temps sur ordinateur, ça fait plaisir d’avoir une activité « dématérialisée » avec mes proches, en jouant à un jeu de société justement ! Travailler dans ce domaine est quelque chose que j’avais en tête depuis un moment. Il me tarde de découvrir pour la première fois ces jeux habillés de mes illustrations.
Enfant, quels étaient tes jeux de société de prédilection?
Je pense que c’étaient les mêmes que la plupart d’entre nous. Les jeux « Qui est-ce », « Destin », « Mad Magazine », « Monopoly », « la Bonne Paye », « Toucher Couler » « Mastermind », « Puissance 4 », « Mille Bornes » et tant d’autres, m’occupaient pas mal. Petit clin d’œil à « Attrap’ Souris » qui m’a bien fait marrer quand j’étais enfant.
N’as-tu jamais cessé de jouer ou un jeu en particulier t’a-t-il fait basculer dans le jeu de société « moderne » ?
Après avoir découvert le jeu « Magic The Gathering » (en 1996) avec un de mes frères, on s’est abonnés au magazine « Lotus Noir » où il y avait pas mal de publicités et d’articles sur des jeux de société. Même si ça ne m’a pas fait basculer tout de suite dans l’univers du jeu de société moderne, ça a fortement contribué à l’intérêt futur que j’ai eu pour ces jeux. Pour autant, je trouve ma ludothèque encore assez maigre. Vite, vite, des nouveaux jeux !
Tu signes les dessins du cinquième volume de la jubilatoire collection Contes & Jeux édité par Purple Brain Creations. Comment est née cette nouvelle aventure ludique?
Benoît de chez Purple Brain suivait mon travail depuis un moment et un jour il m’a envoyé un message pour me proposer d’illustrer un de ses jeux. Ce fut une belle surprise car j’avais déjà repéré sa gamme « Contes & Jeux » que je trouvais magnifique. Les illustrations pour « Le petit chaperon rouge » viennent tout juste de sortir du four, il va falloir attendre fin août pour découvrir le jeu en boutique. J’ai vraiment apprécié notre collaboration et espère que toi et les lecteurs de SDI passeront de bons moments avec ce jeu.
Ce fut le cas avec les trois premiers opus qui en plus d’être d’excellent jeu ont fait l’objet d’un appréciable travail sur les illustrations et le matériel… Il est peu probable que leurs prochains jeux nous déçoivent, bien au contraire!
Aborde-t-on l’illustration d’un jeu de la même façon qu’on illustre un album?
Mise à part ma patte graphique qui est la même, illustrer un jeu est assez différent que d’illustrer un album. Les contraintes ne sont pas les mêmes. Par exemple dans un album illustré, on travaillera en fonction des dimensions du livre et d’un découpage qui nous permettra de placer les images avec le texte (doubles page, pages simples, cabochons …). Les illustrations racontent une histoire et seront destinées à une tranche d’âge spécifique. Dans un jeu, les illustrations contribueront à l’immersion des joueurs tout en restant au service du gameplay. Par exemple, faire en sorte que les joueurs identifient parfaitement la mentalité d’un personnage et ses capacités rien qu’en découvrant l’illustration. Je ne parle même pas des contraintes techniques qui augmentent en fonction de la complexité du jeu (plateau, figurines …).
Concrètement, comment as-tu travaillé sur l’univers du Chaperon Rouge, conte popularisé par Grimm et Perrault ? Comment s’est organisé le travail avec Annick Lobet, créatrice du jeu et Benoît Forget, créateur de Purple Brain Edition ?
Je n’ai pas été acteur dans les échanges entre Benoît et Annick sur le jeu. Au final, la collaboration artistique s’est faite entre Benoît et moi. On s’est appelés plusieurs fois, ça a été riche en échanges. Je lui envoyais les premiers roughs, on en discutait puis je commençais les rendus finaux. L’univers des contes de Grimm et Perrault ont bercé mon enfance. Quand j’ai travaillé sur les illustrations du jeu, je me suis coupé de toutes sortes d’inspiration pour proposer ma propre vision des personnages. Tout s’est déroulé dans de très bonnes conditions, je pense qu’avec Benoît, on va continuer à travailler ensemble !
As-tu d’autres projets, ludiques ou non, sur le grill ?
Pour 2015, je vais commencer une série d’albums illustrés pour la jeunesse, je ne peux pas en dire plus pour l’instant, mais ce sera 2 albums par an pendant 3 ans ! Je continue à illustrer des séries de romans fantasy pour enfants « Malenfer » chez Flammarion et la suite de « l’ Enfant Dragon » - « l’Île aux dragons » chez Auzou. Niveau ludique, j’ai eu deux propositions, il me tarde que ça se concrétise !
Tous médias confondus, quels sont tes derniers coups de cœur ?
Jeu vidéo : « Bayonnetta 2 » sur Wii U, film : « Interstellar », série : « House of Cards », jeu de société : « Jamaica ».
Y-a-t-il une question que je n’ai pas posée et à laquelle tu souhaiterais néanmoins répondre ?
Non
Pour finir et afin de mieux te connaître, un petit portrait chinois à la sauce imaginaire…
Si tu étais…
un personnage de BD: Blacksad
un personnage mythologique: Arthur Pendragon
un personnage de roman: Le capitaine Flint
une chanson: Suicide Messiah (Black Label Society)
un instrument de musique: Une guitare électrique
un jeu de société: Dr Maboul !
un mécanisme de jeu de société : La pioche
une découverte scientifique : L’archéologie
une recette culinaire: Une pizza
une pâtisserie: Un brownie
une ville: Venise
une qualité: Enthousiaste
un défaut: Perfectionniste (Un peu trop)
un monument: Le Sphynx
une boisson: Un smoothie
un proverbe : « Mon auberge est aussi propre qu’un derrière d’elfe ! » (Baldur’s Gate)
Un dernier mot pour la postérité ?
Restez vous-même !