Bonjour et tout d’abord merci de vous prêter au petit jeu de l’entretien.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, une petite question liminaire : êtes-vous farouchement opposé au tutoiement ?
Pas du tout, par contre je suis farouchement opposé au Lol, au rétablissement de la peine de mort, au mot gonzesse, au foie gras et à tout un tas d'autres choses.

Merci bien… j’essayerai d’éviter les lol… les mdr c’est jouable ou tu as une farouche opposition ?
Tant qu'ils ne sont pas utilisés à chaque bout de phrase, MDR.

Peux-tu nous parler de toi en quelques mots ? (parcours, études, âge et qualités, passions, numéro de carte bleue ou de comptes numérotés en Suisse ou aux Îles Caïmans?)
J'ai fait l'ECV Bordeaux dans la section animation, j'ai 35 ans. Je suis passionné par le fait de raconter des histoires. J'aurai bientôt un compte en Suisse quand mon album aura fait un carton, je vous transmettrai le numéro à ce moment.

Enfant, quel lecteur étais-tu? Quels étaient alors tes auteurs de chevet et quels sont-ils aujourd’hui?
Je n'étais pas un énorme lecteur, par contre j'adorais déjà écrire des histoires et les illustrer. Pour les BD j'ai adoré Peter Pan, La quête de l'oiseau du temps, Lanfeust, Les feux d'Askel, Akira, puis tous les classiques (Gaston/Spirou/les Schtroumpfs...)

Au niveau des livres, j'étais accro à Stephen King, j'ai aussi adoré Barjavel. Je me souviens aussi de ma lecture du Passe muraille de Marcel Aymé, les mouches de Sartre... surtout des lectures fantastiques. Les livres de Stephen King sont très visuels, je pense que c'est pour ça que j'ai autant accroché et qu'il m'arrive encore d'en lire.

Devenir auteur de BD, étais-ce un rêve de gosse?
Je ne crois pas, j'aimais dessiner ça c'est sûr, mais je ne rêvais pas d'en faire mon métier. C'est venu un peu sur le tard, par la force des choses étant donné que je n'étais pas très scolaire..

Devenir dessinateur de BD a-t-il relevé du parcours du combattant?
Oh que oui, surtout pour moi, je pars de trèèèès loin. J'ai eu la chance de signer mon premier album grâce au concours Arte/Glénat avec « Le moustiquaire de Berlin », album qui m'a permis d'y croire un peu et qui m'a poussé à continuer dans ce domaine.
Un peu moins de 10 ans après je reviens chez Glénat avec cette fois un album totalement assumé et dont je suis particulièrement fier. Entre temps j'ai fait quelques BD chez divers éditeurs dont Casterman, Petit à petit... Je me suis aussi beaucoup diversifié, j'ai travaillé pour la presse Jeunesse (Milan/Bayard...) et le jeu-vidéo pour ensuite revenir à la BD suite à deux commandes BD de Milan Presse pour le magasine Julie et Géo Ados.

Quelles sont les grandes joies et les grandes difficultés du métier?
Les grandes joies sont de pouvoir me lever chaque jours (à l'heure que je veux) pour faire un travail qui me passionne, de côtoyer des gens plein de talent, de créer tout les jours, de ne pas sortir quand il pleut et d'écouter de la musique à longueur de journée.

Les difficultés sont de vivre dans l'insécurité, de ne pas compter ces heures, d'être statique toute la journée (vive le badminton), de ne pas trouver la motivation...

Le jubilatoire premier tome de la Famille Fantastique vient de paraître sur les étals… Qu’est-ce qui t’a séduit dans le scénario de Lylian?
Le scenario de Lylian m'a de suite plût, j'y ai vu un genre de Game of thrones pour la jeunesse… Ce qui m'a plu c'est le fait que ce soit une BD centrée principalement sur une famille un peu à la manière du film « Les indestructible », et même s’ils passent dans un monde extraordinaire et qu'ils vont vivre pleins d'aventures, le plus important sont les liens entre les différents membres de cette famille recomposée.

Le monde de Fantastica va jouer comme un accélérateur dans les relations que vont tisser les personnages, ils vont très vite être confrontés à des situations très stressantes et vont donc plus vite se révéler.

Graphiquement, comment aborde-t-on un récit écartelé entre notre monde et un univers d’héroïc-fantasy? Comment as-tu travaillé sur les décors et les costumes de ce monde imaginaire?
Cela fait plusieurs années que je travaille des mondes imaginaires donc j'avais déjà une bonne base. J'ai beaucoup d'influences, liées à mes lectures ou au ciné/série... à un moment il se passe une scène intimiste à bord d'un dirigeable, à ce moment j'étais très inspiré par Antoni Gaudi pour le côté un peu organique que je voulais donner au décor et qui donnait un côté un peu romantique à la scène.

Il y a aussi un peu de Miyazaki, je me suis aussi nourri de mes dernières lectures avec par exemple « Le combat d'hivers » de Jean-Claude Mourlevat.

Pour le peuple d'Akbar, étant donné qu'ils se déplacent à bord de dirigeables on est parti sur le thème des rapaces pour désigner les vaisseau et les costumes, le dirigeable principal à par exemple deux grandes sphères à l'avant qui ressemble à des yeux et des ailes mécaniques qui ressemble à des ailes d'oiseau, même la forme du vaisseau fait penser à une chouette. Les costumes et les capes des persos (faites de plumes) sont aussi plus ou moins désigné dans ce sens pour rappeler le côté rapace et donner un tout cohérent...

Dans le tome 2 nous changerons complètement d’atmosphère car nous plongerons dans les fonds marins de Fantastica... Je suis beaucoup plus inspiré par Jules Verne et son 20000 lieux sous les mers pour ce deuxième volume.

Comment est née l’apparence de Sarah, Danielle, Charles et Léo, principaux personnages de l’album? Ont-ils rapidement revêtit cette physionomie ou sont-ils passés par différents stades avant de prendre celle que l’on connaît?
Mon dessin tient essentiellement sur les designs, j'ai donc fais beaucoup de recherches avant de trouver tous les persos. Certain sont arrivé plus naturellement que d'autres comme Charles et Sarah que j'avais déjà bien en tête. Léo ou Danielle ont mis un peu plus de temps. Je continu régulièrement à chercher de nouveaux personnages pour enrichir l'univers, et mon scénariste les incorpores au fur et à mesure si il y voit du potentiel pour l'histoire... c'est un vrai travail de collaboration.

Du synopsis à la planche finalisée, comment organisez-vous votre travail avec Lylian et Lorien Aureyre?
Lylian m'envoie tout d'abord le script de la page avec un découpage écrit case par case. C'est ensuite un vrai travail de collaboration, j'essaye de suivre ces indications sur le story-board mais il arrive parfois que nous ayons deux visions assez différentes, on réadapte ensuite ensemble pour que les intentions soit bien présentes et que la narration fonctionne.

Je pars ensuite sur le crayonné qui sera à son tour validé par notre éditeur, puis vient l'étape de l'encrage. Une fois la planche finalisée, c'est au tour de Lorien de passer la couleur, je lui donne quelques indications mais je préfère lui laisser le champ libre.

Lorien peut lui aussi apporter son avis sur les planches, proposer des pistes pour l'histoire ou intervenir à tout moment... on forme une vraie équipe ou chacun peut enrichir le travail de l'autre.

Vous vous retrouvez tous autour d’une table pour en parler ou internet est-il votre ami ?
Lorien est mon voisin, donc ça aide pour les échanges, en plus de ça il fait un super Cappuccino. Mais sinon oui on échange surtout par le biais d'internet. On se retrouve dès que Lylian passe dans le coin mais ce n'est pas souvent.

Serait-il possible, pour une planche donnée, de visualiser les différentes étapes de sa réalisation?
Avec plaisir mais je ne sais pas si vous avez les moyens....

C’est pas faut, mdr…



Quelle étape préfères-tu dans l’élaboration d’un album?
J'aime le story-board, car c'est une des parties les plus créative et c'est aussi sur cette étape que l'on peut confronter nos points de vue avec le scénariste. J'aime aussi l'encrage qui m'apporte beaucoup de satisfaction, trouver les bons posing, les bonnes expressions, c'est passionnant.

Comment s’est construite cette couverture aussi intrigante que percutante?
J'ai eu envie assez vite de mettre le titre au milieu pour faire une coupure et bien montrer que notre histoire allait se passer dans deux monde différents, avec dans la partie supérieur le monde de Fantastica et dans la partie inférieure notre monde.

L''effet magique provenant du bâton d'Organa venait accentuer cette coupure et créer du dynamisme en formant ce grand S, c'était aussi pratique pour poser le titre par-dessus. Il fallait aussi bien voir nos héros et montrer qu'ils étaient soudés, pour cela on les a donc regroupé. Pour que le lecteur comprenne bien qu'ils sont dans notre monde on leur a rajouté des objets usuels tels qu'une batte de baseball ou un ustensile de cuisine.

Dans quel état d’esprit étais-tu lors de la sortie de l’album ?
Je suis le stressé du groupe, donc j'étais à la fois heureux et tendu. Voir toutes ces piles de BD un peu partout c'est super, maintenant faut qu'elles descendent.

Le premier tome se referme sur un twist particulièrement inattendu qui met d’emblée l’eau à la bouche… Peut-on avoir une date approximative de la sortie du tome 2 de la Famille Fantastique? Quel en sera le titre?
Le tome 2 sortira pour 2016, c'est une certitude... on devrait le finir d'ici fin septembre mais je n'ai pas la date exact de sortie.

Tu as signé les illustrations de Zombie Kidz, du Monde est fou et de Seasons Path of Destiny... Es-tu toi même joueur?
Je ne suis pas un gros joueur car je n'ai pas suffisamment de temps pour m'y mettre vraiment. Je suis rentré dans l'univers du jeu avec "magic" quand j'étais plus jeune, récemment j'ai bien aimé le jeu "City of horror", ou "Yokai no mory".
Sinon je suis plutôt petits jeux d'ambiance, comme le Dixit, le Linq, le Perudo, le Pix...
Mais il y a tellement de jeux qui ont l'air super et que j'aimerais tester.


Comment as-tu rencontré le Scorpion Masqué, éditeur de jeu canadien?
Tout simplement par mon agent Marjorie Chebance. Le scorpion masqué cherchait quelqu'un pour illustrer son dernier jeux et était déjà en contact avec elle.

Quel est ton dernier coup de coeur ludique?
Je n'ai pas vraiment de dernier coup de cœur, ne jouant pas assez pour cela... par contre je suis fan des illustrations de Mathieu Leyssenne, Naïade, Xavier Colette ou Jérémie Fleury. Les jeux qui pourraient me plaire et que j'aimerais bien tester sont Abyss, Fourberies, Tokaido...

Tu as très bon goût ^^
Tous médias confondus, quels sont tes derniers coups de cœur ?
Le livre Les naufragés de l'île Tromelin d'Irène Frain.

Y a-t-il une question que je n’ai pas posée et à laquelle tu souhaiterais néanmoins répondre ?
Quel est, si il en a un, le grand secret de ton coloriste ? Mais je ne souhaite pas y répondre sinon on risque de ne plus se parler...

Pour finir et afin de mieux te connaître, un petit portrait chinois à la sauce imaginaire…

Si tu étais…

un personnage de BD: Kaneda
un personnage de roman: Un trappeur
un personnage de cinéma: Un super méchant bien badasse
une chanson: Wake up d'Arcade fire
un instrument de musique: Une guitare
un jeu de société: Le Linq
une découverte scientifique : Une chouette découverte qui ferait du bien aux gens
une recette culinaire: La tarte à la tomate
une pâtisserie: Une tartelette aux fraises
une boisson: Une bière bien fraiche
une ville: Bordeaux
une qualité : L'empathie
un défaut: L'obsession
un monument: OK ce n'est pas un monument mais l'Everest.
un proverbe : "Ce n'est pas la destination qui compte, c'est le voyage", Jack London

Un dernier mot pour la postérité ?
LOL !

MDR… Merci pour le temps que tu nous a accordé et longue vie à la Famille Fantastique!