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Ludicorn, entretien avec Bruno Chevalier
Interview accordée aux SdI en octobre 2018


Bonjour et tout d’abord merci de vous prêter au petit jeu de l’entretien.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, une petite question liminaire : êtes-vous farouchement opposé au tutoiement ?

Heu bah non au contraire.

Merci à vous…
Peux-tu nous parler de toi en quelques mots ? (parcours, études, âge et qualités, passions, numéro de carte bleue ou de comptes numérotés en Suisse ou aux Îles Caïmans?)

Ouhlà, alors d’abord y a eu les dinosaures et puis ils sont tombés malades et ça a fait du pétrole … bon non je ne vais pas la faire en entier.

Sinon plus sérieusement, je suis Bruno Chevalier, j’ai 43 ans, j’ai débuté dans le monde du jeu (le vrai) en Juin 2017, comme (attention je vais utiliser de l’anglais à la JCVD) « business manager » chez Ludonaute. Ça consiste à ne pas faire de jeu, mais à les faire fabriquer, s’assurer qu’ils sont de bonnes qualités et conformes aux normes en vigueur, les acheminer jusqu’à leurs acheteurs et en préambule bien sûr … les vendre, dans le monde entier. Je préfère préciser que je kiffe à mort !

Avant ça, j’ai édité 2 jeux très grands publics moi-même « presque » tout seul : qui sont parus sous la marque de mon client : WDK Partner. L’un d’eux s’appelle Yam’s Naval, de mon ami Charles Chevalier dit Acétylène. L’autre s’appelle Tarot Kids, de moi, mais sans mon nom sur la boite car je ne voulais pas à ce moment-là. Ils ont surtout été vendus en Supermarchés en fait, par mon client. J’agissais un peu comme son studio (avec fabrication en plus).

Avant et pendant ce temps aussi, j’ai écumé le monde du jouet pendant 19 ans, à diverses positions mais surtout compte clé et agent. Ça serait trop long à développer mais disons que le jouet est un domaine que je connais bien, que ce soit la distribution française et les usines Chinoises et le gros marché de Hong Kong. J’ai même ma « propre » (propriété partagée avec Oxybul) gamme de jouets premier âge qui sont encore vendus (2 produits au catalogue de Noël 2018 Oxybul) : Bubble Car.

Donc finalement le jeu, le vrai, est quelque chose d’assez récent pour moi, mais ça me remplit de joie aujourd’hui (vraiment), comme si c’était quelque chose que j’aurai du faire depuis 20 ans en fait.

Mes études … je les ai poursuivies … ou l’inverse … Économie … en FAC en plus … sans intérêt mais alors pas du tout, sauf pour étaler un peu de culture dans un dîner comme on étalerait de la confiture le matin sur son pain.

Est-ce vraiment nécessaire de développer mes passions ici ? Ok si tu insistes, macramé, canevas et peinture sur soie. Mais sinon le jeu de société (plutôt ceux où il y a un peu de violence quand même), le jeu de rôle (28 ans que ça dure, vache) et le jeu vidéo (si si, ça déstresse le soir) c’est super cool. Un peu de sport histoire de pouvoir manger pendant les parties de JDR.

Anne et CédricEnfant, quel joueur étais-tu? N’as-tu jamais cessé de jouer ou un jeu en particulier t’ a-t-il fait basculer dans le jeu de société « moderne » ?
Mes amis disent que j’ai inventé le concept d’attaque préventive. Donc mon type de jeu, depuis toujours, est le jeu de stratégie où on tape sur les autres joueurs (au sens figuré). J’ai BEAUCOUP joué à Civilisation (Descartes, celui d’il y a 25 ans) et à Diplomatie … Full Metal Planet aussi, rooohhh Age de la Renaissance (on ne tapait pas vraiment sur les autres joueurs mais c’était tout comme). Le jeu a évolué en effet, il est devenu plus rapide, et donc plus facile à jouer souvent. Moi par contre, j’ai évolué un peu différemment et c’est le temps qui est venu à manquer (famille, enfants …). Donc je n’ai pas d’avantage joué au final. Mais ça m’amuse toujours autant.

Aujourd’hui, comme tous les éditeurs, je joue le plus souvent aux jeux qu’on édite (Ludonaute, Ludicorn …) et j’ai plein de jeux même pas déballés à la maison. C’est triste mais c’est comme ça.

HichamA quel moment est-il devenu évident que tu voulais travailler dans le monde du jeu?
Quand je me suis lassé du jouet et qu’en plus le jouet est tombé malade, PLUS quand je me suis rendu compte que le jeu de société était devenu un secteur plutôt florissant au sein de la catégorie, que je me suis dit qu’allier passion et profession pouvait être possible. Ensuite, ça a été l’occasion qui a fait le larron … même si je suis quand même allé chercher les occasions en réalité.

Pour ce qui est de LUDICORN, ça s’est fait de manière assez rigolote. D’une part, j’avais rencontré Hicham avant les Ludonautes. Je me suis immédiatement dit que j’aimerai bien bosser avec lui. Puis immédiatement après, j’ai rencontré Cédric et AnneC, avec qui s’est allé très très vite du coup. Puis, le hasard a mis devant moi des jeux pour enfants super sympas, déjà existants, ou bien des idées, des protos. Et quand j’ai demandé aux Ludonautes si on pouvait éditer ces jeux, ils ont totalement justement répondu que ça n’était pas dans l’ADN de Ludonaute. Il y avait donc 2 options : soit modifier l’ADN Ludonaute et par là, faire l’erreur de perdre ceux qui nous aiment comme on est, soit faire une nouvelle entité avec un ADN compatible. Pour ça, il fallait aussi de l’aide car Cédric, qui est le monsieur Game Design chez Ludonaute, ne pouvait pas se faire greffer plus de bras, donc on a pensé à Hicham, qui lui avait déjà fait une greffe … et hop voilà, Ludicorn est né.

KJQuelles sont les grandes joies et les grandes difficultés du métier d’éditeur?
Pour le moment, je n’ai vu que les joies. Bon il y a du stress aussi, des coups de speed, mais bon ça j’ai l’habitude de pire donc ça ne fait pas partie des grandes difficultés. Elles viendront sans doute plus tard, le plus tard possible, voire même jamais smiley

Sinon la principale joie c’est de voir ses enfants jouer aux jeux qu’on édite … là c’est le kiffe complet. Voir des réactions positives aussi c’est cool, à commencer par les commandes smiley

Qu’est-ce qui t’a donné envie de créer Ludicorn, une nouvelle société de jeux spécialisée dans les jeux pour enfants?
Oups, j’ai répondu plus haut. C’est toujours comme ça, je digresse je digresse et je parle trop … on fait comment, copier-coller ?

Outre l’occasion (les jeux) et les gens (Hicham et Cédric), comme je viens de la distribution du jouet, je sais qu’il y a un peu de place dans le secteur, que ce soit en distribution core (magasins de jeux), ou en distribution jouets et livres, pour cette catégorie de jeux. Donc il y a l’aspect envie personnelle et l’aspect opportunité business … on ne se refait pas.

Le logo so kawaï de LudicornQui donc a dessiné le logo so kawaï de ce nouvel éditeur?
Ce monsieur s’appelle Franck Achard. Ce qui est très rigolo, c’est qu’on avait demandé autre chose (pas le style, ça on avait demandé Kawaï) mais le montage dé et Licorne. Mais Franck a insisté pour pousser son idée en l’améliorant à chaque essai … et on a fini par dire ok et maintenant on l’aime comme ça. Comme quoi le talent ça ne s’invente pas (je parle pour moi, car je ne sais pas dessiner un lapin).

LE Frank Achard du Jeu de Rôle Nephilim ??? Whaou, trop la classe…
euh… wait… y’a un truc qui vient de faire tilt dans ma tête… Jeu de rôle + Bruno Chevalier = TILT! … ne me dites pas que… vous êtes le créateur de Krok le Bô? et le scénariste des Légendes des Contrées Oubliées ??? Non ??? Si ????

Alors, pour Frank Achard, c’est bien possible en effet, même si je n’ai pas de preuve à apporter. Pour Krok le Bô, non, ça n’est pas ce Bruno Chevalier là que vous recherchez. J’ai utilisé cette homonymie étant jeune pour faire jouer en D&D le scénario de la BD des Légendes des Contrées Oubliées et j’ai fait croire à tous mes potes que c’est moi qui avait signé la BD pour de vrai, en gagnant un concours de scénario. Ils m’ont cru (jusqu’à ce que je crache le morceau) … mais la vérité est ailleurs, je n’ai pas ce talent du tout, et je le déplore.

Peux-tu nous parler des premiers jeux édités par Ludicorn? Qu’est-ce qui vous a séduit dans chacun de ces jeux?
Notre objectif chez Ludicorn est de faire des jeux malins, tout en restant simples (donc accessibles) et avec un peu de profondeur quand même pour que les enfants adhèrent, les parents aussi et que les jeux soient joués avec plaisir par toute la famille ensemble en fait. En bref, on veut faire le contraire des jeux à crottes et à tartes à la crème (sans citer de marque). Quand on a vu ces jeux (et d’autres), ça à déclencher l’idée de Ludicorn en fait.
les livrets règles des premiers jeux publiés par Ludicorn © Ludicorn
A qui allez vous confier l’illustration de ces premiers jeux ?
En fait c’est déjà fait smiley En objet, voici les visuels 3D des boites. Pour Sunny Day, il s’agit de Mélanie Desplanches (pour la couv, Agsty pour les pictos des tuiles). Pour Dessus Dessous, il s’agit de Laurent Audouin (idem pour la boite, pour les pictos et les éléments du jeu, il s’agit d’ Agsty & Jang Sun Park).

Et tout cela est prévu pour quand ?
Les produits arrivent début Décembre donc seront en boutique normalement en Janvier. Ils vont sortir d’abord en France, Belgique, Hollande, UK & USA et on étendra potentiellement au-delà après Essen & Nuremberg.

Sunny  Day, artwork © Ludicorn / Mélanie DesplanchesQuel jeu aurais-tu rêvé d’éditer ?
En jeu geek, je dirai Star War Rebellion, qui aurait (si je l’avais édité) sans doute été invendable (car ça aurait été une adaptation plus poussée en terme de gestion + combat du jeu vidéo éponyme des années 1990-2000) mais j’aurai kiffé !!!! En jeu enfant, je dirai Halli Galli, car j’ai BEAUCOUP joué à ce jeu avec mes filles et j’aurai été trop fier que ce fut le mien smiley

Tous médias confondus, quels sont tes derniers coups de cœur ?
Heu alors en musique, je dirai les « Brigitte ». Je suis plutôt Rock’n’Roll d’habitude mais là je suis tombé « amoureux » (et ma femme aussi d’ailleurs) de ce duo féminin aux voies si complémentaires et aux textes et musiques fort sympathiques.

Sur écran de télé, j’adore GoT, ça n’est pas mon dernier coup de cœur sans doute mais c’est le truc que j’attends avec le plus de fébrilité et qui m’occupe le plus l’esprit.

En jeu vidéo, je dirai Tom Clancy The Division, un mixe RPG TPS qui a tellement évolué au fil des mises à jours, qu’il n’a plus rien à voir avec le jeu du début et à un tel point qu’il y a encore beaucoup de joueurs dessus et ce quelques mois avant la sortie du 2.

Et en jeu de société, sans mentir, la vie de ma mère, c’est Space Gate Odyssey, la future sortie de Cannes des Ludonaute, un bijou, de l’aveu même de nos distributeurs historiques et des joueurs à qui je l’ai fait tester.

Y a-t-il une question que je n’ai pas posée et à laquelle tu souhaiterais néanmoins répondre ?
Pourquoi avoir choisi le jeu de société plutôt que de rester dans le jouet ?

Pour les gens :

Sunny  Day, artwork © Ludicorn / Mélanie Desplanches- Cédric et AnneC (et Jos que j’adore aussi dans l’équipe)
- Pour la très grande majorité des acheteurs, qui sont des passionnés respectueux
- Pour les Boutiques bien sûr que je peux classer dans les acheteurs et qui sont la pierre angulaire du secteur, la fondation qui retient tout à bout de bras …
- Pour les joueurs, qui sont sympa, surtout quand ils ne sont pas réfugiés derrière leurs écrans de portable ou d’ordinateur via des réseaux sociaux …
- Pour les concurrents, qui pour la grande majorité sont super cools.
- Même les gens qui interviews sont cool en fait …


Merci à toi … Les gens qui y répondent aussi smiley

Pour finir et afin de mieux te connaître, un petit portrait chinois à la sauce imaginaire…

Si tu étais…

Sunny  Day, artwork © Ludicorn / Mélanie Desplanches
un personnage de BD : Conan le Barbare
un personnage de roman: Sherlock Holmes
un personnage de cinéma: Luke Skywalker
une chanson: Stairway to Heaven (Led Zep)
un instrument de musique: Batterie
un outil de dessinateur: tablette tactile
un jeu de société: Echecs (pas pour le synonyme, pour l’affrontement de gentlemen’s (ou women) à armes égales)
un mécanisme de jeu de société: n’importe quoi où y a de la baston
une découverte scientifique: Électricité
une recette culinaire: Œufs en meurette !!!
une pâtisserie: tarte aux fruits
une boisson: whisky
une ville: Tours
une qualité: Loyauté
un défaut: gourmandise
un monument: Citadelle d’Édimbourg ou bien Eilean Donan, toujours en Ecosse.
un proverbe: « A vaincre sans péril on triomphe sans gloire » (à quoi j’ajouterai : « mais on triomphe »)

Un dernier mot pour la postérité?
Je ne tiens pas vraiment ni à la célébrité ni à la postérité, je te laisserai donc le dernier mot.

Un grand merci pour le temps que tu nous as accordé…
Pareil, tout le plaisir a été pour moi
Dessus Dessous © Ludicorn / Laurent Audouin
Le Korrigan