Les deux premiers livres dont je vais m’occuper en arrivant aux éditions Delcourt sont le tome 2 de «Rouge de Chine» de Thierry Robin et le 3e tome des aventures de «Julien Boisvert» par Dieter et le regretté Michel Plessix.
Le premier est une belle histoire d’amour dans une Chine de légende au graphisme expressionniste et très élégant dont il se dégage un charme indéfinissable… «Rouge de Chine « est une série très originale, un vrai coup de cœur pour moi. Thierry Robin s’était basé sur un voyage - épique - en Chine, pays où il finira par partir y vivre bien des années plus tard.
Le second est un récit très contemporain, avec un «anti-héros», chose rare à l’époque, porté par un dessin d’une très grande finesse au noir et blanc complété par des couleurs aquarellées d’Isabelle Rabarot de toute beauté !
Deux magnifiques livres donc pour commencer mais… mais qui vont s’avérer complexes à réaliser. Les couleurs sont faites sur des «bleus de coloriage» à partir du scann du dessin fait à part.
Le plus gros problème à l’époque est de faire repérer le film noir obtenu plus tôt avec les films couleurs car, souvent, en faisant la mise en couleur, surtout lorsqu’on n’utilise pas de la gouache, le papier bouge et ne repère donc plus avec le trait. Un vrai casse-tête !
Heureusement, ces deux titres seront les premiers livres des éditions Delcourt à être imprimés chez Lesaffre, imprimeur belge basé à Tournai avec lequel j’ai travaillé aux Humanos et qui est pour moi le meilleur imprimeur à l’époque. Le chef d’atelier, Michel, a un œil imparable et il aime son métier… je l’ai revu sur un calage en début d’année alors qu’il est proche de la retraite, avec toujours le même plaisir.
Car ce qui compte à la fabrication, c’est de travailler avec des partenaires fiables, sur lesquels on peut compter. Je suis allé à bien des calages avec l’idée que je n’aurai rien à faire ! Que tout soit bon quand on arrive… Mais j’ai toujours proposé aux auteurs d’y aller pour voir comment se passe un calage. Je vous conseille la lecture des «» d’Étienne Davodeau qui le raconte bien…
C’est la raison pour laquelle j’ai toujours aimé la fabrication car c’est le moment où l’on passe des dessins originaux uniques de l’auteur, qui procurent tant d’émotions à ceux qui, comme moi ont pu les admirer, à un objet livre, imprimé à des milliers d’exemplaires, où tout le travail est d’arriver à donner aux lecteurs ces mêmes émotions…
par Sébastien Gnaedig