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Entretien avec Noë Monin
Interview accordé aux SdI en avril 2023


Bonjour et merci de vous prêter au petit jeu de l’entretien…
Bonjour, c'est un plaisir !

Question liminaire : êtes-vous farouchement opposé au tutoiement ? Si oui, je me ferais violence mais je sais qu’un « tu » risque tôt ou tard de partir tout seul pendant que je nettoierai mon clavier…
Tout va bien, on peut se tutoyer. Je m'en voudrais de m'en prendre un entre deux touches sales.

Merci… c’est plus prudent, effectivement…

Peux-tu nous parler de toi en quelques mots ? (parcours, études, âge et qualités, passions, numéro de carte bleue ou de comptes numérotés en Suisse ou aux Îles Caïmans ?)

J'entre bientôt dans ma quatrième dizaine d'années. J'ai débuté la bande dessinée un peu après avoir passé le cap de la première, vers 11 ans, en suivant des stages de BD organisés par Gwen Lerest, dans le Finistère. Dès mes premières planches, j'ai mis en scène les passions qui me suivront en filigrane tout au long de ma carrière : les dinosaures, les chevaliers et la Fantasy.

Après le lycée, j'ai voulu me mettre au théâtre et ai suivi pendant quelques mois la filière Art du Spectacle à l'université de Rennes 2. Je me suis vite rendu compte que ce n'était pas pour moi et me suis redirigé vers les Arts Plastiques, jusqu'à obtenir ma licence. Cependant, le théâtre et le cinéma sont resté bien ancrés dans ma façon de raconter les histoires. J'aime mettre mes personnages en scène et retranscrire le mouvement le plus efficacement possible, à grand renfort de cadrages dynamiques souvent inspirés du cinéma d'animation.

Cinq Avril, encrage d'une planche © Dupuis / Monin / Duval / BussiEnfant, quel lecteur étais-tu et quels étaient tes livres de chevet ? La BD a-t-elle toujours occupé une place de choix ?
J'étais un lecteur boulimique. Tout y passait : romans et bande dessinées. Mes moments préférés étaient de revenir de la bibliothèque municipale avec une pile énorme de bouquins, me calfeutrer dans ma chambre, sur mon lit, et de les dévorer avec un bol de céréales ou une pomme, Granny Smith de préférence. Je me souviens avoir séché Les Contes du Chat Perché, ceux de la Rue Broca, la Bibliothèque Rose (Fantômette, Les Mémoires d'un Âne, Le Club des Cinq !), puis Verte (Les Six Compagnons !) avant de connaître mon premier gros drame littéraire avec le Faucon déniché de Jean-Côme Noguès, qui m'avait traumatisé. Lisez-le, vous comprendrez...

Pour la bande dessinée, ma mère m'en lisait avant même que je sache lire. Avec quelques difficultés de lecture lorsqu'il s'agissait des Schtroumpfs (essayez de schtroumpfer un livre pendant une heure, en schtroumpfant tous les mots à voix haute...) ou politique, avec Tintin au Congo. Je me souviens très clairement de son expression qui évolue du doute à la consternation, au fur et à mesure de l'album, lorsqu'elle se rend compte de ce qu'elle me lit, avec comme point d'orgue la scène du massacre des gazelles ou du chimpanzé pour que Tintin se « déguise ».

Plus grand, je n'ai donc eu aucun mal à dévaliser le rayon BD jeunesse de la bibliothèque municipale par la suite, découvrant ainsi Percevan, les Spirou de Franquin, Fournier (l'Ankou !) puis Tome & Janry (La Vallée des Bannis ! la Machine qui Rêve !), Gaston Lagaffe, La Patrouille des Castors (j'avais un bon terreau catho à l'époque... et les scouts me fascinaient. Beaucoup moins aujourd'hui...), Astérix, Rahan, Picsou, Marine, Pif... Et j'en oublie plein.

Devenir auteur de BD, était-ce un rêve de gosse ? Un auteur en particulier a-t-il fait naître ta vocation de dessinateur ?
Pas du tout, je voulais devenir Batman, ou paléontologue. Pour la première vocation, j'ai eu beau traîner mes parents dans une ruelle sombre après le cinéma, rien à faire. Pour la seconde, mes lacunes en mathématiques m'ont vite fait comprendre que les carrières scientifiques m'étaient définitivement fermées. Je me suis donc tourné vers ce qui m'était le plus naturel : dessiner et raconter des histoires.

Plusieurs auteurs m'ont marqué. Tout d'abord, Luguy et son Percevan, en particulier l’Épée de Ganaël, Tome & Janry avec la Vallée des Bannis et ce qu'ils ont fait de Spirou, puis Akira Toriyama, avec Dragon Ball et enfin Régis Loisel et son Peter Pan. En mélangeant tous ces univers, avec une bonne dose de Grands Classiques de Disney (en particulier les périodes entre 1961 avec les 101 Dalmatiens et 1994 avec le Roi Lion) et des films de Don Bluth, on arrive à percevoir les grandes lignes de mes inspirations et ce qui a donné mon style de dessin actuel.
Cinq Avril, work in progress © Dupuis / Monin / Duval / Bussi
Quelles sont selon toi les grandes joies et les grandes difficultés du métier ?
La plus grande joie c'est celle que l'on éprouve lorsque l'on boucle un album après un long tunnel de stress, de doutes, de remise en question, dû à la création, souvent assez solitaire, de l'album en question. La seconde, lorsque ce dernier sort en librairie et que le public peut le découvrir et se l’approprier.

J'ai réussi à soigner la solitude de la réalisation d'un album en me rapprochant de mes pairs : j'ai rejoint quelques ateliers virtuels et présentiels. Les premiers se déroulent sur internet, via Discord, où l'on se connecte puis discutons et échangeons l'avancée de nos travaux respectifs, tout en demandant de l'aide au besoin aux collègues connectés. Les seconds sont plus classiques, on se retrouvent entre collègues dans un atelier sur Rennes, ou parfois sur Cholet, ou encore directement chez les uns et les autres en mode coworking. Depuis le confinement, j'ai réalisé l'importance de ces émulations et les bienfaits que cela faisait sur mon travail.

Ces émulations servent également à apprendre à appréhender les autres grandes difficultés du métier : le réseautage, notre statut d'auteur et ce que cela implique, ne pas se faire avoir en signant des contrats d'édition... En somme, apprendre à mieux se vendre.

Comment ta route a-t-il croisé celle de Fred Duval et de Michel Bussi qui signent le scénario de Cinq Avril dont le second tome devrait paraître à la fin du printemps ?
C'est Elsa Sztulcman, mon éditrice sur les Lames d'Âpretagne qui avait entre-temps rejoint les éditions Dupuis, qui nous à présenté. Après le succès des Nymphéas Noirs, Michel avait parlé de Cinq Avril à Dupuis, un projet de bande dessinée qu’il avait dans ses cartons depuis longtemps. Le projet les a séduit et Elsa me l'a proposé début 2019 au festival d'Angoulême. Je ne connaissais alors ni Fred, ni Michel. Je suis rentré d'Angoulême avec des images de Renaissance en tête, et j'ai griffonné un premier visuel : Cinq Avril avachi sur la Piéta de Michel Ange, se curant les ongles avec une dague et arborant un air goguenard. L'illustration a beaucoup plu et j'ai marqué l'essai avec deux planches en couleur : la première et la cinquième du premier album.

J'ai enfin rencontré Michel et Fred un peu plus tard, à Rouen, en plein incident Lubrizol. J'étais tellement stressé que je me suis trompé de train. J'ai pris celui pour Caen à la place de celui de Rouen, écourtant ainsi mon premier contact avec Michel d'une bonne heure et demie.

Qu’est-ce que t’a séduit dans ce scénario romanesque ?
On peut dire que je suis comme un poisson dans l'eau. C'est grave cool de faire du roman de cape et d'épée en bande dessinée. Le projet coche à peu près tout ce que je sais dessiner (les chevaux mis à part, il a fallu que je me mette à jour en quelques mois) : Le héros charismatique, candide et malin, des personnages intéressants, toutes les rock stars de la période historique à réinventer, la grande aventure, des chevauchées et combats épiques... Tous les éléments que j'avais aimé mettre en place dans les Lames d'Âpretagne peuvent ici prendre une autre dimension.

Tu es un féru des récits de capes et d’épées ? Films, romans et BD, quelles sont tes références en la matière ?
Féru non, mais grand amateur dirons-nous. Aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours aimé les récits d'aventure avec des combats à l'épée. Instinctivement , comme ça, je pense au duel final de Brisby et le Secret de Nimh, de Don Bluth, un de mes films préférés de ce dernier. On a tout ce que j'aime : la pluie, la mise en scène dramatique, les personnages charismatiques... Et pour la petite histoire, ce duel a été calqué plan par plan sur celui de Vikings, le film de 1958, où Kirk Douglas affronte Toni Curtis sur le donjon de Fort Lalatte, en Bretagne.

Viennent ensuite toutes les adaptations des Trois Mousquetaires, en particulier celle des Studios Gakken, Sous le Signe des Mousquetaires, qui m'avait ravi enfant. Surtout la période avec le Masque de Fer, dont je trouvais le chara design fascinant. Puis vient Robin des Bois (celui de Disney et Prince des Voleurs), l'Île au Trésor (l'adaptation animée japonaise de 1978 et l'adaptation live de 1990 avec Christian Bale et Charlton Heston), Cyrano de Bergerac, Le Bossu de Broca et bien sûr, The Princess Bride, dont je savoure encore les dialogues à l'heure actuelle.

Enfin, pour parfaire ma connaissance en escrime et sa retranscription en images, je me suis mis carrément à l'escrime artistique depuis l'année dernière. J'y ai beaucoup appris en deux ans.

Cinq Avril, première esquisse © Noë MoninAs-tu rapidement trouvé l’apparence de Cinq Avril ou est-il passé par différents stades avant de revêtir celle que l’on connaît ? Serait-il possible de voir quelques-unes de tes recherches de personnages ?
Comme je le disais plus haut, en revenant d'Angoulême, lorsqu'Elsa m'avait proposé le projet, j'ai fait une première illustration de Cinq Avril sur la Piéta. La voici, tu pourras te rendre compte que le personnage était quasiment déjà là.

J'ai pour habitude de m'inspirer de mes proches pour créer mes personnages. Lorsque j'ai eu à dessiner Avril, c'est la tronche de Jop (auteur de Jazzman chez Albin Michel, c’est bien, achète!) qui m'est venue en premier. C'est un garçon fin, assez dégingandé, souvent ébouriffé, avec un air mi-rêveur, mi-effronté, parfait pour un héros de bande dessinée. Je lui ai juste rajouté une tignasse rousse. Dans la première description de Michel, Cinq Avril était brun. Je me suis permis cette petite amélioration, non seulement pour faire un clin d’œil direct à Spirou (dont je devais faire le deuil, suite à un projet avorté le concernant), mais aussi parce qu'un héros rouquin est très facilement repérable dans une planche en couleurs : c'est une sacrée astuce narrative !

Quel personnage as-tu pris le plus de plaisir à mettre en scène ?
Les méchants ! Du Cardinal Sordi, en passant par son acolyte Wilder, Enora de Rieux et enfin le Chevalier François de la Trémoille, pour ne citer qu'eux. J'ai l'impression que Michel et Fred s'amusent énormément avec ces derniers à l'écriture, en particulier Sordi, qui doit avoir les meilleures répliques de la saga pour le moment. Tantôt franchement inquiétant, tantôt grandiloquent, c'est le méchant parfait.

Fred m'avait prévenu : il voulait un Dark Vador en puissance. Je lui ai rajouté un côté un peu plus théâtral. Je pensais à Claude Frollo dans Notre Dame de Paris en le créant, avec, physiquement, un peu de David Bowie. Il fallait également trouver une façon de définir son côté froid et mécanique. Vador à son casque, ce qui le rend tout de suite monolithique. J'ai donc eu l'idée d'affubler en permanence Sordi de ses bésicles, qui cache son regard et lui donne un côté inhumain. Vous vous souvenez des yeux de Freeze dans Batman The Animated Serie ? C'est le même principe ici.

Pour Wilder et Enora, là où ils sont le plus intéressant à dessiner, c'est en action. Chacun de leur combat est soigneusement orchestré avec mes amis escrimeurs, un style bourrin pour Wilder, avec ses deux fauchons et une technique un peu plus sournoise mais classe pour Enora, à la rapière.

Enfin, la Trémoille, je l'attends au tournant et m'amuserai énormément avec lui dans le troisième tome , dans lequel il revient en fanfare. Lorsqu'il apparaît dans L'Héritier de Da Vinci, au moment où je l'ai dessiné, Fred et Michel ne m'avaient pas encore livré la suite du scénario et je ne savais pas comment son personnage allait évoluer, ni la place qu'il tiendrait dans l'histoire. J'ai donc fait un petit caméo de Benjamin Benéteau, (dessinateur de Michel Vaillant, chez Dupuis, c'est bien, achète!) avant de me rendre compte que ce personnage allait devenir l'un des principaux antagonistes. La tronche de Benjamin pour ce personnage a tellement plu à Fred et Michel, qu'ils ont décidé d'en faire un méchant plus récurrent. Me voilà donc de nouveau à devoir mettre en scène un de mes meilleurs potes en bande dessinée. Autant vous dire qu'il va prendre cher !

Quelles furent tes principales sources pour composer cette renaissance romanesque et aventureuse ? Aurais-tu un ouvrage en particulier à conseiller à un lecteur désireux d’en apprendre plus sur les bâtiments ou les costumes de l’époque ?
1530, en France, est un période charnière, à cheval entre les derniers résidus du Moyen Âge et la Renaissance flamboyante venant d'Italie. Pour arriver à trouver le ton visuel, ce n'est pas très difficile, beaucoup d’œuvres très populaires sont passées par là entre temps : Game Of Thrones, évidemment et The Witcher, l'adaptation vidéoludique de CD Red Project. Étant moi-même un gamer invétéré, cette dernière m'a énormément inspiré. J'ajoute à ça les Assassin's Creed et The Plague Tale Innocence et Requiem. L'avantage des jeux vidéos, c'est que l'on peut bouger la caméra et donc se projeter au besoin littéralement dans la documentation qu'ils nous fournissent.

Pour le côté plus carré et historique, ma bible reste l'Encyclopédie Médiévale de Viollet Le Duc.

Je jongle donc allégrement entre les inspirations fantasmées et synthétisées des œuvres cinématographiques ou vidéoludiques, et les dessins de ce dernier.
Cinq Avril, lavis d'une planche © Dupuis / Monin / Duval / Bussi
Comment s’est organisé votre travail à six mains sur l’album ? Du synopsis à la planche finalisée, quelles furent les grandes étapes de ton travail ?
Sur le premier tome, c'était du genre : Michel écrit un roman fleuve. Fred arrive et lui dit que c'est trop long pour un album de bande dessinée. Fred taille allégrement dans le tas. Michel revient par la fenêtre avec d'avantage de trucs. Fred râle. Fred retaille dans le tas. Jusqu'à ce qu'ils trouvent un juste milieu. On est tout de même passé d'un album prévu en 46 planches à un album en 54 planches... Puis un 62 planches. Pour revenir au format des 54 planches dès le second tome, qui devrait devenir le format récurrent de la série. Les deux compères me livrent le scénario au fur et à mesure de son découpage, à raison d'une dizaine de planches à dessiner. Ça a ses avantages, comme par exemple le fait de rythmer l'avancée de l'album, mais pour un perfectionniste comme moi, avancer à l'aveugle m'a déstabilisé sur le premier tome. Je me suis habitué sur le deuxième et le troisième devrait rouler.

L'étape majeure, c'est le story-board. C'est là que les échanges entre moi, Fred et Michel sont les plus nourris. Pour le premier tome, la scène dite de bizutage fut celle de la course poursuite dans la tour cavalière du Château d'Amboise. On avait une tour RONDE, une route en colimaçons, sept chevaux, un héros qui saute à cheval AU DESSUS d'un chariot et j'ai dû trouver un moyen de mise en scène pour expliquer qui était où et faisait quoi, dans cet espace très restreint. On a été voir la tour cavalière sur place, à Amboise, j'ai pris plein de photos, mais cela n'a pas suffit. Fred avait une idée très précise de mise en scène et les premiers essais que je lui ai proposé ne lui allaient pas du tout : il ne comprenait pas où étaient les personnages, ma mise en scène était trop proche de ces derniers, au cœur même de l'action. J'ai donc trouvé cette astuce de faire un dessin de coupe de la tour en case centrale, histoire de placer tout ce petit monde. C’est ce qui a tout débloqué. Avec cette case, les enjeux étaient plus clairs, je n'avais plus qu'à dérouler la scène, aussi dynamiquement possible, jusqu'au saut final. Cette scène terminée, les autres m'ont parues tout de suite plus simple à dessiner.

Es-tu plutôt tradi ou numérique ?
Les deux mon capitaine ! Pour ce qui est des recherches, du story board et du crayonné, c'est du 100% numérique, sur mon Ipad. Puis j'imprime le crayonné sur feuille A3, et l'encre en tradi. Ça me permet d'avoir des originaux à exposer et vendre, tout en gardant les avantages d'un dessin numérique. Pour le second tome, j'ai ajouté l'étape d'un lavis numérique, pour garder la main sur les lumières et les modelés. C'est important pour la mise en scène. Antoine Lapasset, qui a repris le flambeau des couleurs après Sedyas, pose les couleurs directement sur ce dernier.
Work in Progress
Cinq Avril, storyboard d'une planche © Dupuis / Monin / Duval / Bussi Cinq Avril, crayonné d'une planche © Dupuis / Monin / Duval / Bussi Cinq Avril, encrage traditionnel d'une planche © Dupuis / Monin / Duval / Bussi
Cinq Avril, lavis numérique d'une planche et bulle © Dupuis / Monin / Duval / Bussi Cinq Avril, mise en couleur d'une planche © Dupuis / Monin / Duval / Bussi / Sedyas

Quelle étape te procure le plus de plaisir ?
Celle de l'encrage traditionnel. Je détestais cette étape avant, mais depuis que j'ai trouvé comment modeler le trait noir avec de l'acrylique blanche, c'est magique. Je n'ai pas besoin de faire trop attention à réaliser un encrage « propre », j'ai le filet de l'acrylique pour corriger au besoin. Cette technique m'a libéré de tout stress et mon dessin comme mon encrage sont devenu plus lâchés, plus naturels. Je réinterprète ainsi le dessin imprimé au bleu directement à l'encrage. C'est à la fois grisant et reposant. Et ça me permet d'aller très vite à l'encrage.

Comment as-tu composé la couverture du tome 2 de Cinq Avril ? S’est-elle rapidement imposée ou est-elle passée par différents stades avant de revêtir l’apparence qu’on lui connaît ? Serait-il possible de visualiser les différentes versions et les étapes de la conception de celle retenue ?
La couverture du tome 2 s'est imposée beaucoup plus rapidement que la première et a été vali-dé dès la première salve de propositions. Sur la couverture du tome 1, les retours étaient parta-gés. Autant elle plaisait en règle générale, autant le héros n'était pas assez visible et l'atmos-phère un peu trop sombre pour être repérable de loin.

J'ai donc corrigé cela sur la seconde. Avril apparaît en plein pied, dans une pose dynamique, croisant le fer avec l'une des adversaires de ce second tome. La composition est similaire à celle du premier tome : avec une partie 'sombre' en L et une partie lumineuse. Je garderai cette idée pour toutes les couvertures et ainsi lier l'ensemble de l'oeuvre.

Comme sur chaque couverture, il y a un clin d'oeil à Léonard de Vinci, ici le symbole gravé sur les dalles est présent dans le Codex Atlanticus.

Enfin, comme sur le premier tome ou il m'avait demandé de dissimuler une Porsche, j'ai relevé le défi de Benjamin en y glissant une référence à Michel Vaillant... et un char Renault. En échange, il a glissé une référence subtile à Cinq Avril sur la couverture du tome 12 de Michel Vaillant. Qui sortira en même temps que le second tome de Cinq Avril, le 2 juin prochain.

Punaise, je viens de voir la Porsche… Mais vous êtes un grand malade ! smiley

Dans quelle ambiance sonore travailles tu usuellement ? Radio ? Silence monacal ? podcast ? Musique de circonstance ?

Tout dépend d'où est-ce je travaille, si c'est chez moi, connecté aux ateliers virtuels, ou lorsque je suis en atelier présentiel ou coworking.

Lorsque je suis seul, chez moi, je travaille davantage en musique, avec des OST principalement : Hans Zimmer, Harry Gregson Williams, Howard Shore, James Horner, John Williams, John Powell, Bear McCreary... J'enchaîne parfois sur certains podcasts, comme celui d'Affaires Sensibles.

Lorsque je me connecte à l'Atelier Virtuel, j'écoute les potins du milieu, le duel de snipers Malo Kerfriden vs Ronan Toulhouat, aka celui qui sortira la vanne la plus moisie, avec parfois Benjamin en embuscade, Denis Bajram et les « POUI POUI POUI ! » de son FPS fétiche, lorsqu'il ne nous raconte pas ses meilleures anecdotes de carrière ou tente de nous expliquer la physique quantique.

En présentiel, c'est à peu près la même chose, seuls les protagonistes changent. A l'Atelier Pépé Martini rennais, on a l'option ambiance jazz de Jop, vivement critiquée par Pierre Bunk, et le podcast Community Manager, dans lequel le chroniqueur Guillaume Natas nous fait découvrir les communautés que lui-même a dénichées sur le word wide web.

Enfin, en coworking dans mon atelier ou chez Benjamin, sur notre dernier bouclage, on s'est fait une bonne partie des chroniques humoristiques de France Inter, en passant par la scène du stand up international. Notre dernier coup de cœur, c'est le podcast des Petites Frousses. Des histoires « spooky » racontées avec une passion communicative par une bande de joyeux drilles québécois que je vous conseille vivement !
Couverture : Work in Progress
Cinq Avril, recherche de couverture © Noë Monin Cinq Avril, rough de la couverture du tome 2 © Noë Monin

Cinq Avril, crayonné de la couverture du tome 2 © Noë Monin Cinq Avril, encrage de la couverture du tome 2 © Noë Monin

Peux-tu en quelques mots nous parler de tes projets présents et à venir ?
En marge de Cinq Avril, je participe au comité éditorial de la Vilaine Revue. Une revue annuelle de bande dessinée rennaise, qui fête cette année sa cinquième bougie. J'y dessine quelques planches seul ou à quatre mains. C'est un bon laboratoire stylistique, qui pourrait donner de nouveaux projets à venir. Pourquoi pas dans le Journal de Spirou ?

Tous médias confondus, quels sont tes derniers coups de cœur ?
L'adaptation HBO de The Last Of Us, que j'ai trouvée formidable. Idem pour la première saison de House of The Dragon, qui avait la lourde tâche de passer après la catastrophe en règle des dernières saisons de Game Of Thrones.

En matière de jeu vidéo, comme son prédécesseur, j'ai adoré A Plague Tale Requiem. La direction artistique est magnifique et la bande originale est dingue.

Celle de God Of War Ragnarok également. Je n'ai pas encore eu l'opportunité de jouer au jeu, mais les compositions de Bear McCreary sont des valeurs sûres.

Enfin, en bande-dessinée, j'ai beaucoup aimé le Collectif, Histoire de notre Eco-Hameau chez Dupuis, de Samuel Wambre et Julie Feuillas, ainsi que De Cape et de Mots chez Dargaud, de Flore Vesco et des Kerascoët.

Y a-t-il une question que je n’ai pas posée et à laquelle tu souhaiterais néanmoins répondre ?
Oui, le Mont Saint-Michel, comme Nantes, sont en Bretagne.

Je ne peux qu’approuver… Mais les normands qui nous lisent risque de ne pas appré-cier smiley

Pour finir et afin de mieux te connaître, un petit portrait chinois à la sauce imaginaire…
Si tu étais…

Cinq Avril, après l'effort... © Noë Monin
un personnage de BD : Van Oxymore, Prince d'Âpretagne.
un personnage mythologique : Ulysse, mais sur un vélo.
un personnage de roman : Peter Pan.
une chanson : Hakuna Matata.
un instrument de musique : Une flûte irlandaise.
un jeu de société : Seven Wonders ou Munchkin, j'hésite.
une découverte scientifique : L'aspirine.
une recette culinaire : Un bon okonomiyaki.
une pâtisserie : Le far aux pruneaux de ma grand-mère, inégalé à ce jour.
une ville : Rennes ou Bruxelles.
une qualité : Le perfectionnisme.
un défaut : Le perfectionnisme.
un monument : Rocamadour.
une boisson : La bière ! Belge ou bretonne. Sauf celle à l'eau de mer, c'est une hérésie.
un proverbe : « La fleur en bouquet fane et jamais ne renaît ... »

Un dernier mot pour la postérité ?
« Odi panem quid meliora ». Ça veut rien dire, mais je trouve que ça boucle bien.

Un grand merci pour le temps que tu nous as accordé !
Merci à toi, de me laissez m'exprimer de manière aussi exhaustive...
Noë Monin, aterlier d'artiste Noë Monin, aterlier d'artiste
Le Korrigan



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