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Le Roi Arthur, de l'Histoire au Mythe
article signé Kael


La geste arthurienne est sans nul doute le mythe occidental le plus répandu dans la littérature, le cinéma et l’imaginaire populaire. Immanquablement, les noms d’Arthur, de Merlin, de Lancelot, de Morgane, de Genièvre du Graal, d’Excalibur ou de Camelot évoquent en nous des images de preux chevaliers, d’un époque aventureuse et d’un âge d’or aujourd’hui révolu.

Nous nous efforcerons dans cet article de présenter les origines du mythe, de le replacer dans son contexte afin d’en étudier les fondement historiques et nous nous pencherons quelques unes de ses figures les plus éminentes.


Les origines

Issus d’une tradition orale plus ancienne, de récits mêlant mythologie celtique et légendes galloise, le mythe arthurien a été écrit par un seul homme, Geoffroy de Monmouth. Que sait-on de cet auteur ? Peu de chose en vérité. Il serait né aux alentours de l’an 1100 et mort en 1154. Il fut élevé par son oncle qui devint plus tard évêque de Llandaff. En 1139 paru pour la première fois son Historia regum Britannia, tirée, selon Geoffroy de Monmouth d’un ouvrage rédigé en langue celtique, le Quem Gualterus Oxenfordiensis archidiacanus in Britannia advexit, dont il ne subsiste aujourd’hui nulle trace. On lui doit aussi un poème, Vita Merlini (la vie de Merlin) dédié à Merlin, qui était alors plus connu sous le nom de Merddin ou de Myrddin. Mais c’est surtout son premier ouvrage qui le fit passer à la postérité, puisqu’il inspira de nombreux auteurs à travers les âges, qui s’emparèrent de ses personnages pour enrichir et forger le mythe arthurien.

entre historique et non fiction

Il fait remonter les origines des bretons à un prince troyen dénommé Brutus qui conduisit un groupe de ses condisciples sur l’île de bretagne. De lui découle une généalogie de souverains dont certains ont sans contestes possible existé mais dont bon nombre sont tirés de la mythologie celtique. Puis Rome parvint à marquer l’île de son empreinte, après deux tentatives infructueuses de César, mais sans parvenir à maîtriser les Pictes et les Scots, se réfugiant derrière les murs d’Adrien et le mur d’Antonin. Puis, pour préserver son empire qui subit les assaut des barbares, wisigoths, francs et autres ostrogoths, Rome finit par abandonner les bretons à leur sort et abandonnent l’île.

Survint alors Vortigen qui bannit les deux princes de sang et usurpe la couronne. Pour mettre un terme aux invasions barbares, ils pactise avec les saxons, leur offrant des terres, au nord. Bien vite, le remède s’avère pire que le mal et les saxons pillent et massacrent à tour de bras les bretons. Vortigen s’enfuit au pays de Galles où il rencontre Merlin qui prophétise sa mort et l’avènement du roi. Aurelius Ambrosius et son frère, Uhter, luttent avec acharnement contre les saxons. Lorsqu’Ambrosius meurt après un bref règne, empoisonné par les Saxons, Uther lui succède et parvient à contenir les barbares.

Mais, tombant amoureux de la belle Ygerne, épouse de l’un de ses puissants alliés, Gorlois de Cornoualles, Uther entreprend une guerre contre ce dernier afin de lui ravir sa femme. Aidé de Merlin, il prend l’apparence de Gorlois et passe la nuit avec Ygerne. De leur union naîtra Arthur, qui deviendra plus tard le haut Roi de Bretagne. Arrivé au pouvoir, Arthur soumettra les Saxons lors de la bataille décisive du Mons Badonicus (Mont Badon). Il conquit l’Irlande, l’Islande, le Danemark et la Norvège et une partie de la Gaule. Il parti en expédition punitive contre Rome qui avait osé réclamer un tribu, confiant son royaume à son neveu Morderd et à sa Reine Guenièvre. C’est durant cette campagne qu’il apprit la trahison de son neveu et qu’il regagna ses terres pour affronter son destin lors de la terrible bataille de Cammlann.


L’Arthur historique

Le génie Geoffroy de Monmouth fut de puiser à la fois dans les mythes et légendes celtiques et galloise et dans l’histoire, liant le tout dans une fiction ingénieuse. Grâce à lui et à ses successeurs (de Robert Wace en passant par Chrétien de Troyes et Marie de France), Arthur figure aujourd’hui parmi les Neufs Preux, ou Neuf Valeureux, aux côté de Judas, Josué et David, Hector, Alexandre et César, et enfin Charlemagne et Godefroi de Bouillon.

Mais cet Arthur là a-t-il réellement existé ? En 1191, des moines n’ont-ils pas retrouvé à Glastonbury une tombe portant la mention « Hic jacet sepultus inclutvs rex arturius in insula avalonia » ? (Ici est enterré le célèbre roi Arthur sur l'île d'Avalon.). N’a-t-on pas retrouvé dans la littéréture galloise antérieure au récit de Geoffroy de Monmouth de nombreuses mentions d’un Arthur, tentôt chef de guerre, tantôt roi ? (un poème gallois -le Gododdin-, l’Historia Brittonum du moine gallois Nennius , le roman gallois Culhwch and Olwen…).

Tantôt identifié au chef de guerre Ambrosius Aurelianus, tantôt demi-dieu Celte, Arthur est selon toutes vraisemblances l’amalgame de plusieurs individus qui ont lutté contre les Saxons durant plusieurs décennies, l’incarnation de la résistance bretonne contre les invasion romaines et barbares, la personnification de l’unité bretonne.


Mythe et politique

En 1066, Guillaume le Bâtard devient Guillaume le Conquérant et s’impose en maître de l’Angleterre… Mais comment faire accepter un normand, peuple minoritaire, comme roi? En s’appuyant sur la légende arthurienne et sur Arthur, sa figure de proue, unificateur de la grande Bretagne et du peuple breton. Car outre Manche, sur le continent, se trouvent de nombreux bretons qui s’étaient volontairement exilés pour fuir l’envahisseur saxons. En favorisant la diffusion du mythe de la survivance d’Arthur, de sa dormition dans l’île d’Avalon et de son retour prochain, Guillaume comptait bien se rallier les gallois pour lutter contre les angles et les saxons… Ce fut le début de « l’espoir breton ».

Autre temps, autre mœurs. Couronné en 1154 après moult difficulté (petit fils d’Henri Ier, désigné comme successeur mais écarté du trône par le neveu du roi défunt), Henri II Plantagenêt se servira du mythe arthurien pour asseoir son pouvoir, maintenir son autorité et unifier l’île de Bretagne. Il va confisquer la légende, se présentant comme l’héritier d’Arthur, bel et bien mort lors de l’ultime bataille. Afin d’estomper les origines non anglaise de la dynastie des Plantagenêt, Henri II préférera s’appuyer sur la civilisation bretonne et s’affirmer comme le digne successeur d’Arthur. Car le monarque a besoin d’affirmer son autorité. Vassal du roi de France par le duché de Normandie, il doit s’assurer du soutient breton contre les revendication saxonne qui ont du mal à accepter la domination normande sur l’Angleterre. Afin de renforcer cette analogie, il tentera même sans succès de conquérir l’Irlande et l’Ecosse afin de réunir sous sa bannière l’ensemble du royaume supposé d’Arthur.
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