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Entretien avec Roger Seiter
Entretien accordé aux SdI en mai 2006


Bonjour et tout d’abord merci de vous prêter au petit jeu de l’interview…
Pouvez vous en quelques mots vous présenter? (nom, prénom, age, profession, passions, haines viscérales, numéro de carte bleue et de compte en Suisse.... smiley)

Mon nom est Roger Seiter et je suis né à Strasbourg il y a (déjà) 51 ans (eh oui, comme le temps passe !).Après des études d’histoire, je suis entré dans l’éducation nationale comme Conseiller Principale d’Education, avant de commencer à faire du scénario de bandes dessinées en 1988 (par le plus grand des hasards, je dois bien l’avouer).Je citerai cette activité parmi mes passions, puisque j’y consacre le plus clair de mon temps. Sinon, je suis un grand lecteur de roman, j’adore jouer au badminton (je suis inscrit dans un club depuis des années) et je collectionne des jouets des années 50 et 60 (des figurines médiévales que j’achète essentiellement sur ebay car je n’ai pas le temps de faire les brocantes). Je n’ai pas de haines viscérales, mais je supporte de plus en plus mal la bêtise ambiante qui caractérise si bien notre belle société de consommation. Pour mon numéro de carte bleue et mes comptes en Suisse, on va peut-être attendre un peu… Après tout, je ne te connais pas très bien !...

On vous devine lecteur de roman, mais quel lecteur de BD étiez-vous dans votre prime jeunesse? Quels étaient alors vos auteurs de chevet?
J’ai découvert la BD très jeune, probablement vers 3 ans. Il y avait chez ma grand-mère, chez qui je passais beaucoup de temps, un ouvrage de Christophe : «Les Malices de Plick et Plock » que je passais mon temps à regarder. Il y avait également une collection de journaux de Mickey que mon oncle, devenu adolescent, avait abandonné au fond d’une armoire qui m’apparaissait de ce fait comme magique. Ensuite, j’ai découvert Tintin, Astérix, Arthur le Fantôme et tous les autres. Je lisais également des petits formats (Kiwi, Zembla, Pim Pam Poum, etc..). Il y avait une série que j’aime tout particulièrement. Il s’agissait « D’Erik le Viking » de Don Lawrence. Un vrai régal…

De lecteur assidu à auteur de BD, comment avez-vous franchi le pas?
J’ai lu de la bande dessinée jusque vers 13 ou 14 ans. J’ai ensuite laissé tomber pour lire des choses plus « sérieuses ». J’ai fais mes études, passé mon concours et une fois « casé », je suis revenu à mes premières amours. En fait, j’avais un copain de lycée qui avait commencé une collection de BD. J’ai eu envie de l’imiter, sans doute histoire de me replonger un peu dans mes souvenirs d’enfance. Ensuite, les choses se sont faites tout naturellement. J’ai rencontré d’autres collectionneurs et également quelques dessinateurs amateurs .En 1987, nous avons fondé une association de copains baptisée « Objectif Bulles ». Il y avait dans ce groupe des gens comme Claude Guth, Christophe Carmona ou Johannes Roussel. A la même époque, Christophe Carmona m’a proposé de lui écrire un scénario historique. Complètement inconscient, je me sui prêté au jeu et nous avons présenté le projet à un éditeur qui a miraculeusement accepté de le publier (il était aussi inexpérimenté et aussi inconscient que nous). Et voilà, c’était parti, même si les premiers albums étaient très mauvais. Je pense qu’il m’a fallu 8 albums pour vraiment apprendre le métier de scénariste.

Qu’est-ce qui vous attire dans le métier de scénariste? Quels en sont les grands plaisirs et les grosses difficultés?
Il faut bien comprendre qu’un romancier, un cinéaste ou un scénariste de BD sont au départ tous les trois animés par la même envie : raconter et construire une histoire. Le travail préparatoire et le processus de création sont à mon avis les mêmes, quel que soit le mode d’expression. Comme tous les auteurs, c’est avant tout ce plaisir-là que je recherche. Le plaisir d’inventer une histoire, de créer des personnages, de les faire ou de les voir évoluer. L’avantage de la BD sur le roman, c’est que je ne suis pas seul et que je partage ce plaisir et cette création avec un dessinateur. L’avantage de la BD sur le cinéma, c’est que je ne partage ce plaisir qu’avec un dessinateur et non pas avec une équipe de 100 personnes. En ce qui concerne les difficultés, je n’en vois guère, hormis quelques contraintes techniques, mais qu’on finit par maîtriser au bout de quelques albums.

« Seule contre la loi », le premier tome de Mysteries, adaptation du roman éponyme de Wilkie Collins , vient de paraître chez Casterman. On y retrouve les atmosphères victoriennes et les clivages qui écartèlent la société londonienne. Qu’est ce qui vous fascine dans cette période?
J’ai toujours apprécié la littérature anglaise et en tant qu’historien, je trouvais la société britannique tout à fait passionnante. Mais là, je ne vais pas commencer un cours sur l’histoire de l’Angleterre et de la civilisation anglaise. Ce serait beaucoup trop long. A l’époque victorienne, cette société est un véritable concentré de paradoxes. Une société brillante et hypocrite. D’une créativité incroyable et en même temps complètement sclérosée. Tout cela se retrouve dans la littérature de l’époque et notamment chez Wilkie Collins.

Pouvez-vous nous parler de Wilkie Collins, auteur que je ne connais pas mais que le premier opus de Mysteries m’a donné une furieuse envie de découvrir?
Il est né en 1824 et mort en 1889. C’est un contemporain et un ami de Dickens. Il est issu d’une famille aisée, ce qui le dispense de travailler. Il a néanmoins fait des études de droit et est devenu avocat, sans pour autant exercer cette profession. Mais cette formation lui a probablement donné l’idée d’intégrer une intrigue policière dans ses romans. Ce qui est probablement plus intéressant, c’est que c’est un auteur d’une modernité surprenante. On trouve dans son œuvre une galerie de personnages féminins tout à fait surprenants, contrairement aux hommes, qui sont souvent présentés comme veules et lâches. Collins lui-même est un personnage tout à fait atypique et sa vie est à l’image de son œuvre : très peu conventionnelle.

Dans Fog, vous avez crée Mary Launceston, un personnage féminin fort et indépendant. Quelle était la place des femmes dans la société bourgeoise Londonienne?
Je crois que c’était assez complexe. Dans la bonne société, il est clair que la place de la femme était au foyer. Les hommes avaient une vie propre, au sein des clubs pour gentlemen et étaient très libres. Contrairement au continent, on n’affichait pas ouvertement ses maîtresses. Ce n’était pas de bon goût. Même le grand Nelson en a souffert. Mais les hommes se dévergondaient dans les maisons closes ou avec les prostituées de l’East-End. Il y avait même des guides (je parle de brochures) qui vantaient les services offerts par telle ou telle prostituée dans telle ou telle maison close. Ceci étant, les femmes de la bourgeoisie n’étaient pas forcément plus sages et ne se privaient visiblement pas de relations extra- conjugales. Le mari préférait souvent fermer les yeux plutôt que de faire éclater un scandale. C’est donc une société extrêmement hypocrite, où le scandale et le divorce sont très mal vus. Légalement, la femme, en se mariant, devient une sorte de mineure légale qui dépend entièrement de son époux. Même ses biens propres et sa fortune personnelle reviennent au mari. C’est pourquoi, dans FOG, Mary Launceston a un statut très particulier. Elle est célibataire et orpheline. Elle dispose donc de son immense fortune comme elle l’entend, sans avoir de comptes à rendre à personne. Ce ne serait plus le cas si elle se mariait. En plus, elle a fait des études supérieures auprès de son père et a de réelle compétences en archéologie, ce qui n’est pas sans agacer dans cette société très machiste. Et le lecteur verra dans les tomes 7 et 8 qu’elle est capable d’aller encore beaucoup plus loin, dans un esprit très militant, proche des suffragettes.

Pour Mysteries mais surtout pour Fog, quelles ont été vos principales sources pour ancrer vos intrigues dans l’époque?
Essentiellement la littérature de l’époque. Pas seulement les romans, mais aussi les guides (Appleton’s Guide Book, Punch Almanack), les journaux, etc.. C’est à mon avis la meilleure documentation, à condition (et c’est là que mes études d’histoire ont tout leur intérêt) de bien maîtriser l’histoire et la civilisation anglaise en général et pas seulement celle de l’Angleterre du 19ème siècle.

Pour quelle raison Collins est-il souvent considéré comme le père du roman policier?
Pour la raison que je viens de citer. De part sa formation d’avocat, il maîtrisait certainement beaucoup plus que les autres romanciers la chose judiciaire et il fut le premier à introduire dans ses romans de véritables enquêtes policières.

Pourquoi avoir choisi d’adapter « Seule contre la loi » qui ne compte pas parmi les romans les plus connus de Collins?
Il est vrai qu’en France, ses romans les plus célèbres seraient plutôt « La Femme en Blanc » ou « Pierre de Lune ». « Seule Contre la Loi » avait à la fois l’avantage d’être peu connu, très bien construit et de présenter des personnages aussi extraordinaires que Valéria ou Misérrimus Dexter.

Si vous deviez conseiller un roman de Collins à quelqu’un désireux de connaître cet auteur, quel serait-il? (et pourquoi ?)
Finalement, « Seule Contre la Loi » ne serait pas un mauvais choix. Le roman n’est pas trop long et est très bien construit. Il est accessible, même pour un lecteur peu habitué à l’univers victorien.

Après près de 20 albums scénarisés, comment aborde-t-on l’adaptation d’un roman en bande dessinée? N’est-il pas difficile de faire tenir un roman de près de 400 pages dans deux albums de 46 pages chacun?
C’était une vieille envie. Cela faisait quelques années que j’y pensais. Il fallait juste trouver le bon projet. Et puis, c’était peut-être le bon moment. A mon âge, je pense bien connaître l’univers du roman (à force d’en lire depuis plus de quarante ans) et je commence à bien maîtriser la narration BD (enfin, je crois). J’avais donc les outils et les connaissances indispensables. Le reste, c’est une question de travail. J’ai lu le roman cinq fois avant de le mettre complètement à plat et de commencer à le reconstruire pour l’adapter en BD. J’ai éliminé pas mal de personnages secondaires et me suis recentré sur le récit principal. J’ai supprimé des scènes, j’en ai ajouté d’autres. Quand j’ai pu garder le texte de Collins, je l’ai gardé. Sinon, j’ai essayé d’écrire à la manière de… J’espère que cela ne se voit pas trop à la lecture de l’album et que Collins ne viendra pas hanter mon sommeil pour se venger.

Au détour de l’histoire, le lecteur a l’heureuse surprise de croiser Wilkie Collins lui même… Pour quelle raison avoir intégré l’auteur à l’intrigue?
Mon éditrice raisonne beaucoup en terme de séries. C’était au départ un moyen d’avoir un personnage récurent. Et puis, l’idée de voir Collins ainsi traverser et visiter son œuvre était sympa. C’est d’autant plus plausible que Collins partait très souvent d’aventures vécues pour construire ses romans. Je pense notamment à « La Femme en Blanc ». Dans « Seule contre la Loi », j’ai supprimé le personnage de Benjamin pour le remplacer par Collins. Je procèderai probablement de même dans mes autres adaptations de cet auteur.

Vos dernières séries (Dies Irae, Fog, HMS) sont toutes organisées en diptyque. Pourquoi avoir opté pour ce format pour développer vos histoires?
A mon avis, c’est un format qui convient bien à des histoires policières. Ce n’est pas trop long (donc une attente acceptable pour les lecteurs qui veulent connaître la fin de l’histoire) et en même temps, ça me permet d’écrire toute l’histoire (les deux tomes) en une fois. Je sais donc exactement d’où je pars et où je vais. Pour du polar, c’est certainement mieux que de rallonger la sauce quand une série commence à marcher.

La réduction de pagination de la série Fog vous a-t-elle donné du fil à retordre?
Honnêtement, non. Une pagination moindre m’oblige simplement à être plus précis et plus concis dans la construction de mes histoires. Mais cela a pour effet de les dynamiser, ce qui n’est pas plus mal.

Comment avez-vous travaillé avec Vincent Wagner sur cet album? Du synopsis à la planche finalisée, comment avez-vous organisé votre travail?
Comme pour les autres séries. Simplement, je n’ai pas eu à rédiger de scénario, qui était remplacé par le roman de Collins. Sinon, j’ai fait mon découpage des 46 planches pendant que Vincent faisait toutes ses recherches (personnages, décors, etc…).

Mysteries, l'envers du décor
Découvrez l'envers du décor de Mysteries, la nouvelle série signée par Roger Seiter et Vncent Wagner... Vous y trouverez des travaux de recherches et les différentes étapes de l'élaboration de la planche 12 de l'album...


En janvier 2005 paraissait Les naufragés de la Miranda, le premier opus d’H.M.S, dessiné par Johannes Roussel. D’où est venue l’envie de conter cette aventure maritime?
Une fois encore, c’est un univers que j’ai surtout approché à travers la littérature. J’ai lu à peu près tous les romans « maritimes » anglais consacrés à ce sujet. Par « roman maritime », il faut comprendre une histoire qui se déroule dans le cadre de la flotte britannique entre 1780 et 1820, c'est-à-dire au moment où la survie du royaume repose entièrement sur la supériorité de ses navires de guerre. En gros, entre la guerre d’indépendance américaine et la fin de guerres napoléoniennes. Il s’agit d’auteurs comme Forester, Alexandre Kent et bien sûr Patrick O’Brian. Une lecture passionnante que je ne peux que conseiller.

Finalement, qu’est-ce qui vous attire tant dans la perfide albion?
La civilisation. Depuis le Moyen-Âge, l’Angleterre est en avance sur le continent dans la plupart des domaines (politique, économique, artistique, etc…). C’est une île qui a souvent servi de refuge aux minorités persécutées dans le reste de l’Europe. C’est un pays très tolérant sur le plan des idées et plus ouvert aux innovations que les autres nations. Et puis, c’est un pays qui a un curieux destin. Son insularité lui permet de développer une civilisation très originale et le protège en même temps, sans pour autant l’isoler. Il faut tout de même se souvenir que la dernière invasion de l’Angleterre remonte à Guillaume le Conquérant en 1066. Toutes les autres ont échouées, à commencer par l’invincible armada de 1588.

Pour quelles raisons la marine anglaise supplanta-t-elle les autres flottes européennes? Quand on sait que les marins étaient pour la plupart des repris de justice, quand ils n’étaient pas simplement enrôlés de force lors de rafles le long du littoral, on ne peut qu’être surpris de leur suprématie…
Jusqu’en 1789, la flotte française est probablement plus puissante que la flotte anglaise. De manière générale, même les Anglais reconnaissent que les navires français sont mieux conçus et mieux construits que les navires anglais. Cela vient du fait qu’en France, une gestion planifiée et intelligente des forêts royales permet aux chantiers de disposer d’un meilleur bois en grande quantité. D’ailleurs, si tu as déjà voyagé en Grande Bretagne, tu as sans doute réalisé qu’il y a très peu de forêts. L’île a été entièrement déboisée entre le 16ème et le 19ème siècle pour construire des navires. C’est encore plus flagrant en Ecosse, dont les montagnes étaient couvertes de forêts de chênes au Moyen-Âge.
En réalité, le problème vient des hommes. Sous l’ancien régime, pour être aspirant, puis officier de marine, il fallait disposer de trois quartiers de noblesse, c'est-à-dire être noble depuis trois générations .Or, avec la révolution, beaucoup de nobles, restés fidèles au roi, ont émigré. Beaucoup d’autres sont morts sur l’échafaud. La flotte française rencontre donc très vite un grave problème d’encadrement sur les navires. Et si on peut former un officier d’infanterie ou de cavalerie sorti du rang en quelques mois, ce n’est certainement pas le cas pour un officier de marine. Et puis, il y a le problème des blocus. La marine anglaise va bloquer les ports français pendant des années. Les équipages restent en mer par tous les temps et sont donc très aguerris. Les marins français, au contraire, restent dans les ports et ont souvent le mal de mer quand ils naviguent enfin.
Le problème de la presse n’en est pas un. Effectivement, la plupart des marins anglais se retrouvent contraints et forcés à bord des navires de guerre, mais le système est rodé. La discipline implacable leur fait vite comprendre ce qu’on attend d’eux et au final, les Anglais sont plutôt patriotes. Je crois qu’au bout de quelques mois, la plupart des marins britanniques étaient assez fiers de servir dans la flotte. Mais c’est un vaste sujet et je terminerai ma conférence un peu plus tard.


Wilkie Collins sera le fil conducteur de la série Mysteries, les personnages de Mary et Ruppert ceux de Fog, Les Fils d'Enoch sans doute celui de Dies Irae… Quel sera donc le fil conducteur d’HMS? John Fenton?
Fenton et Byam. Mais dans l’ensemble, c’est plus compliqué que ça. En ce qui concerne « Mysteries », je vais également garder Valéria et Eustace dans la deuxième adaptation. Et en ce qui concerne « Dies Irae », je te laisse la surprise (dans le tome 4).

Avec Maléfices vous avez entamé une nouvelle série faisant la part belle à un fantastique ancré dans notre époque. Comment est née cette histoire de sorcellerie contemporaine? Comment avez-vous rencontré le talentueux Max? D’ailleurs, vous avez le chic pour ne travailler qu’avec de jeunes dessinateurs bourrés de talent (Cyril Bonin, Johannes Roussel, Vincent Wagner, Max, Claude Guth, Vincent Bailly…). Quel est votre secret?
Le premier diptyque de DIES IRAE est un hommage à un livre de l’écrivain Gilles Thomas (une femme très talentueuse, qui a écrit quelques romans remarquables au Fleuve Noir dans les années 70). L’univers correspond également aux envies de Maxime Thierry, qui est un fan des films d’horreurs américains des années 80. De mon côté, j’avais envie de travailler sur le thème de la philosophie occulte et de la magie. Il se trouve que c’est aujourd’hui dans l’air du temps. Ce n’était pas le cas il y a quelques années, quand le projet à été lancé. Quant aux rencontres, c’est souvent un concours de circonstances. Pour Max, par exemple, j’ai découvert son travail sur un site internet en surfant. Un pur hasard, car à l’époque, cela m’arrivait très rarement. Je l’ai contacté pour lui proposer une collaboration. Il connaissait mon travail sur FOG, mais a cru dans un premier temps que c’était une mauvaise blague. Il faut dire qu’il était très jeune et sortait juste d’une école d’art, après avoir fait une maîtrise en cinéma. Sinon, la plupart des dessinateurs cités sortent des Arts Décos de Strasbourg et se connaissent entre eux. Nous formons un peu une grande famille.


Peut-on en savoir un peu plus sur le prochain opus de Dies Irae?
C’est une histoire à la fois plus policière et plus fantastique encore. Elle se passe pour l’essentiel à Paris, avec une incursion dans les catacombes. Mais c’est une histoire très complexe et difficile à résumer. Certaines scènes et certaines ambiances feront probablement penser à l’univers de Maxime Chattam dans « L’Âme du Mal ».

En octobre 2006 paraîtra Wintertime, le premier tome du nouveau dyptique de la série Fog… Avec lui l’égyptologie qui déchaîna les passions fera son incursion dans la société londonienne. Peux-t-on en savoir plus sur cet album très attendu par les aficionados de la série?
Ce quatrième cycle renoue avec le premier en ce sens que la référence au fantastique y est beaucoup moins présente. C’est plus du polar traditionnel. D’ailleurs, nous y retrouvons plein de personnages du premier cycle. Entre autres, Sam Weller, Janet Oswin, Mike, et Pertwee, qui lui apparaît dans le tome 4. Il y a bien sûr une foule de nouveaux personnages, mais ce qui sera peut-être encore plus surprenant pour le lecteur, c’est que cette fois, c’est surtout Andrew Molton qui est sur le devant de la scène. Pour des raisons diverses, qui sont autant de surprises, Ruppert Graves et Mary Launceston restent un peu en retrait, même si c’est finalement eux qui vont sauver la situation. Le thème général est une exploration des pègres londoniennes, qui se déclinent à l’époque sous diverses formes (traditionnelle et moderne).


Découpage de Fog t8 p41



Case1 : Quelques instants plus tard, Pertwee et deux complices (dont le joueur de poker qui a écouté la conversation entre Sam et Ruppert) chargent le corps de Ruppert dans une vieille carriole.
Récitatif : « Quelques instants plus tard … ».

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Case 2 : Sous l’œil attentif de Pertwee, le joueur complice (Jack) cache le corps de Ruppert sous une vieille bâche crasseuse.
Pertwee : « Dissimule le corps, Jack ! …On ne va pas prendre de risques, avec tous les sergots qui traînent actuellement dans l’East-End !... ».
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Case 3 : Soudain, une voix interpelle Pertwee, qui se retourne.
Sam (voix off) : « On peut savoir ce que tu trafiques, Pertwee ? … ».
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Case 4 : Sam, qui s’est approché de la carriole, soulève la bâche et découvre le visage de Ruppert (qui est sans connaissance).
Sam : « …Serais-tu devenu fou ?... Qui t’as autorisé à assommer et enlever les clients ? … ».
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Case 5 : Pertwee répond en se montrant agressif et méprisant.
Pertwee : « Et depuis quand tu me donnes des ordres ? …Retourne donc surveiller les tables de jeux ! … ».
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Case 6 : Pertwee désigne le corps de Ruppert.
Pertwee : « … En attendant, j’emmène ce fouille-merde à Wapping pour l’interroger et voir ce qu’il sait à propos d’Andrew Molton et des filles assassinées ! … ».
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Case 7 : Pertwee grimpe sur le siège du conducteur (où se trouve déjà un de ses complices, l’autre s’étant installé à l’arrière avec le corps de Ruppert). Sam ne peut rien faire.
Pertwee : « …Ensuite, s’il est encore en vie, je laisserai Blake décider de son sort ! … ».
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Case 8 : Zoom sur le visage de Pertwee, qui exprime la cruauté et la perfidie.
Pertwee : « …Pour ma part, je pencherai volontiers pour un plongeon dans la Tamise ! … ».



Votre actualité à venir semble particulièrement chargée entre la parution du second opus de HMS, du septième de Fog, du troisième de Dies Irae et celle du second opus de Mysteries… Où trouvez-vous le temps de faire tout cela? Avez-vous d’autres projets en perspective?
Il n’y a pas de secret, c’est beaucoup de passion et beaucoup de travail .Je ne prends presque jamais de vacances et je bosse tout le temps. Une vraie addiction. En ce qui concerne les projets, il y en a plusieurs, dont une adaptation de l’univers d’Edgar Allan Poe.


© Jean-Louis Thouard




Découpage Scarabée d’Or page 1


Case 1 Plan d’ensemble : Vue extérieure du « Blue Peter » et d’une partie du port de Charleston, avec voix off. Nous sommes au petit matin et le jour se lève sur la ville.

Récitatif : « Octobre 1845, port de Charleston, en Caroline du Sud … ».

William Wilson (voix off) : « Full aux dix par les valets !… Je crois que cette fois, la partie est terminée, gentlemen ! … ».
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Case 2 Plan général : Nous sommes dans la magnifique salle de jeu du « Blue Peter ». Cinq ou six hommes (plutôt des bourgeois cossus) quittent une table de poker. Un jeune domestique noir est en train de débarrasser les bouteilles et les verres qu’il entasse sur un plateau. William Wilson empoche le tas impressionnant de ses gains (pièces et billets). Un joueur de mauvaise humeur, car il a beaucoup perdu, s’adresse à lui.

Le joueur : « Vous avez eu une chance insolente, Wilson !… J’espère que vous nous accorderez une revanche ? … ».
William Wilson (souriant hypocritement) : « Quand vous voudrez, cher ami ! … Quand vous voudrez ! … ».
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Case 3 Plan moyen : Tandis que le joueur mécontent s’éloigne à son tour, Wilson, redevenu sérieux, s’adresse au domestique noir.

Wilson : « Tu sais où est passé Mr. Legrand, Nelson ? … ».
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Case 4 Plan rapproché : Nelson lui répond avec un sourire entendu.

Nelson : « Je crois qu’il est monté avec Miss Kitty, monsieur ! … ».
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Case 5 Plan général / moyen : Wilson monte l’impressionnant escalier qui mène aux chambres situées à l’étage.

PAS DE TEXTES.



La recherche des personnages de Kitty est pour le moins prometteuse… Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur Jean-Louis Thouard? Je viens de visiter son site et le moins que l’on puisse dire c’est qu’il a un sacré coup de pinceau! Pour quand est prévu cette petite merveille?
Pour l’instant, c’est un projet. C’est donc assez confidentiel. On est en train de peaufiner le dossier et ce ne sera pas forcément chez Casterman.


© Jean-Louis Thouard


Vous faîtes partie de ces rares scénaristes qui accompagnent souvent leurs dessinateurs aux séances de dédicaces… Quelles sont vos motivations?
La plus simple du monde, le contact avec les lecteurs. Et puis, mes dessinateurs sont tous des amis et j’aime bien partager ce moment avec eux.

Bd, romans, cinéma… Quels sont vos derniers coups de cœur ?
Je ne vais malheureusement pas assez au cinéma, faute de temps. Et je lis pas beaucoup de BD non plus. Quant aux romans, je citerai « La Rose Pourpre et le Lys », de Michel Faber. Encore une histoire victorienne que l’auteur a mis 25 ans à écrire. Une vraie merveille.

Y a-t-il une question que je n’aurais pas posé et à laquelle vous souhaiteriez néanmoins répondre ?
Il y a déjà eu beaucoup de questions. On va réserver la suite à un prochain entretien. Ceci étant, les questions étaient intéressantes et pertinentes.

Pour finir et afin de mieux vous connaître, voici un petit portrait chinois à la sauce imaginaire :
Si vous étiez …

une créature mythologique : Yggdrasill, le frêne du monde.
un personnage biblique : Enoch
un personnage de roman : William Wilson
un personnage historique : E.J. Trelawney
un personnage de BD : Corto Maltese
un personnage de théâtre : Hamlet
une œuvre humaine: Le Great Eastern
un tableau célèbre: Un tableau de Bruegel le Vieux
un chanteur ou un groupe de musique : Brassens

Décidemment, vous avez de nombreux points commun avec Vincent Wagner smiley… Qu’appréciez-vous chez ce croque-note?
Brassens est un vieux compagnon. J'écoute ses chansons depuis 35 ans. J'ai tout, interprété par lui-même ou par Maxime Le Forestier plus récemment. J'apprécié le côté poète-anar ... Mais j'aime aussi Ferré, Brel, Ferrat ou Thomas Fersen. Bref, j'aime bien les chansons à texte.

Pourquoi Corto ?
Un vieux fantasme.

Pour ceux qui méconnaissent E.J. Trelawney, pouvez-vous nous brosser son portrait en quelques lignes? Qu’avez-vous pensé de l’adaptation de sa biographie en BD?

Je ne peux que conseiller à tous de lire les « Mémoires d’un Gentilhomme Corsaire ».Trelawney est un des personnage les plus extraordinaires du 19ème siècle. Déserteur de la Navy, il a eu une fabuleuse carrière de corsaire, voire de pirate dans l’océan indien, avant de participer aux combats de libération des Grecs contre les Turcs .
Il comptait (entre autres) Mary Shelley et Lord Byron parmi ses amis. Quant à l’adaptation en BD chez Delcourt, je n’ai jamais compris pourquoi les auteurs ont remplacé les navires par des dirigeables pour en faire une histoire de SF destinée aux ados. Dans le livre de Trelawney, les pages consacrées aux combats maritimes sont parmi les plus belles et les plus élégantes que j’ai eu l’occasion de lire.

Un grand merci pour le temps que vous nous avez accordé !

Le Korrigan