Le tueur a décidé de reprendre du service. L’action lui manquait et sa petite vie bien rangée au Vénézuela n’était pas trop à son goût. Mais s’il avait su dans quel panier de crabe il allait mettre les pieds, peut-être aurait il prolongé sa villégiature quelques années encore. Le tueur va se retrouver comme le commun des mortels par devoir lutter pour conserver ce qu’il a… et le tueur est prêt à tout pour garder sa vie. Depuis quelques contrats, il s’interroge sur les motivations et l’identité de ses commanditaires… dangereux pour un tueur qui va devoir nager en eau trouble, faisant jouer un camp contre l’autre pour espérer s’en sortir indemne…

Matz et Jacamon poursuivent donc leur narration du cheminement de ce tueur à gage dont on ignore le nom et qui porte sur le monde un regard à la fois lucide et cynique. S’il a perdu ses illusions envers l’humanité, il ne cherche nullement à atténuer la portée de ses actes. Il est un prédateur, un maillon indispensable à cette société corrompue et rongée de l’intérieur, un prédateur, tout simplement.
En nous livrant ses pensées, les auteurs développent une critique acerbe de la société occidentale et de ses travers. En mettant en abîme la violence faite au nom d’une soit disant démocratie par les pays occidentaux (qui servent leur propres intérêts en brandissant bien haut l’étendard des droits de l’homme) et les contrats du tueur, ils pointent du doigt une violence sourde qui n’a que peu d’échos dans nos médias et qui a des conséquences bien plus ravageuses que les assassinats orchestrés par le tueur.

Côté dessin, le trait de Jacamon est toujours aussi précis et sa gestion des ombres et de la lumière plus que saisissante. Sa façon étrange de souligner l’action par un effet de miroir brisé, suggérant peut-être qu’à ce moment le fragile vernis de la civilisation vole en éclat pour révéler la sauvagerie latente de l’homme, en déroutera sans doutes plus d’un. Néanmoins, son découpage est d’une efficacité redoutable..

On attend avec une impatience non feinte la suite des péripéties du tueur. Cette série porte le polar noir à des niveaux rarement atteints en bande dessinée… Elle s’est magistralement imposée comme un monument du neuvième art… Une série à ne manquer sous aucun prétexte!