D'emblée la superbe couverture signée Jean-Sébastien Rossbach attire le regard par la qualité de sa composition, l'angle de vue intriguant et sa maquette élégante.
Dans un second temps, c'est le titre de la série, Sherlock Holmes & les Vampires de Londres, qui est pour le moins interloquant et donne une furieuse envie de feuilleter l'ouvrage... Et là, on ne peut qu'être séduit par le dessin particulièrement efficace de Vladimir Krstic (alias Laci), avec lequel Sylvain Cordurie avait déjà travaillé sur la série (malheureusement avorté) Céleste Noir. Ses cadrages dynamisent un récit particulièrement rythmé et la mise en couleur d'Axel Gonzalbo achève de convaincre que le premier né de la collection 1800 est un album à lire.
Associer Sherlock Holmes, le cartésien enquêteur imaginé par Arthur Conan Doyle, et les vampires, figure majeure de la littérature fantastique, est pour le moins original, et quelque peu déroutant. Certes, Holmes et son acolyte et biographe, le Docteur Watson, ont souvent été confronté au fantastique au cours de leurs enquêtes, à commencer par le Chien des Baskerville... Mais si le développement faisait glisser l'enquête aux portes du fantastique, l'explication finale, fruit des brillantes déductions du détective, était ancré dans le réel et le rationnel.
Certains pourraient donc crier à l'hérésie holmésienne... Pourtant, Sylvain Cordurie a intégré son intrigue dans la trame de Doyle, durant ce que les spécialistes appellent le grand hiatus, période située entre le moment où ce dernier, lassé de la notoriété de son héros de papier, a décidé de faire disparaître Holmes dans les chutes du Reichenbach et sa réapparition, trois ans plus tard. De plus, Doyle avait déjà abordé le thème des suceurs de sang dans une courte nouvelle datée de 1934, Le vampire du Sussex... Mais les vampires de l'album sont eux bel et bien réels...
Autant de le dire de suite, la gageure que constituait l'association à priori contre nature d'Holmes et des Vampires est une réussite à tout point de vue... Pour les lecteurs amateurs de l'Angleterre victorienne, il est particulièrement jubilatoire de retrouver ce personnage emblématique du roman policier dans un univers connu mais subtilement décalé qui emprunte finalement à la littérature fantastique du siècle qui a vu naître Frankenstein, Dracula, l'Homme invisible... et Sherlock Holmes!
Dans ce récit apocryphe, Holmes se voit contraint de quitter sa retraite parisienne pour retourner à Londres et mettre fin aux sombres agissement d'Owen Chanes, un vampire en rupture de ban qui se rebelle contre son maître, menaçant le fragile équilibre qui lie les vampires à la société londonienne... S'il ne s'exécute pas, son ami, le Docteur Watson, et sa charmante épouse passeraient de vie à trépas...
Le récit solidement charpenté de Sylvain Cordurie est rondement mené, fertile en rebondissements et alterne avec brio action et scènes plus feutrées... Une attention toute particulière semble avoir été apporté aux dialogues qui achèvent de mêler l'intrigue à l'oeuvre de Conan Doyle.
L'appel du sang, premier opus de Sherlock Holmes & les vampires de Londres, est un hommage à la littérature du XIXième siècle, à la croisé des romans policiers et des nouvelles fantastique... Une bien étrange alchimie en vérité, mais ô combien captivante et qui inaugure de la plus belle des façons une collection qui s'annoncent aussi jubilatoire que passionnante...