Alejandro Jodorowsky signe avec Sang Royal un nouveau diptyque où l'on retrouve les ingrédients qu'il se plait à accommoder dans chacun de ses albums : folie, violence, luxure et sang.

Alvar est une jeune et puissant souverain blessé lors d'une bataille que l'on devine décisive pour l'avenir du Royaume. Trahi par son cousin, privé de sa mémoire pendant plusieurs années, il va découvrir une trahison plus cruelle, celle de sa compagne. En retrouvant son trône, le roi blessé va briser le tabou de l'inceste et épouser sa propre fille, risquant par la même de subir l'anathème du clergé et le rejet de la noblesse.
Jodorowsky nous a concocté un scénario à la trame des plus classique et bien évidemment iconoclaste et subversive (Jodo oblige). Mais si cette histoire de vengeance où s'exacerbent les sentiments et les dialogues parfois ampoulés lorgnent clairement du côté de la tragédie, on s'attendait à une intrigue plus riche et plus étoffée de la part du scénariste de l'Incal.

Une fois encore, Jodorowsky s'est associé à un dessinateur dont le talent force le respect. Dongzi Liu, jeune auteur chinois au dessin fouillée et à la mise en couleur sombre et saisissante, a réalisé une séduisante synthèse entre les styles asiatiques et européens. Son travail sur la lumière et les reflets métalliques des armes et des armures est particulièrement soigné, offrant au lecteur des planches de toutes beauté.

Si ce premier tome s'avère particulièrement réussi sur le plan du dessin et de la mise en couleur, il faudra attendre le développement de l'intrigue dans son ensemble pour l'apprécier dans toute son ampleur. D'ailleurs, bien malin serait celui qui pourrait savoir quels chemins tortueux elle rempruntera, même si on présage que la chute sera tragique.