Une fois encore, Luc Brunschwig parvient a tisser une histoire forte et bouleversante à partir de personnages denses et complexes. Avec ce troisième cycle qui débute, l'auteur nous entraîne plus loin encore dans la connaissance de ce personnage tourmenté qu'est Lloyd Singer qui ne connaît pas de répit. Sitôt l'affaire de la La Chanson Douce bouclée, voilà qu'il doit venir en aide à sa sœur, anorexique, qui se sert de son corps comme d'une arme contre sa famille. L'origine de ses soucis venant sans nuls doutes de la relation qu'elle entretien avec sa fratrie, voilà les Singer qui se prête bon gré mal gré à une psychothérapie familiale. Gageons qu'elle fera resurgir bien des zones d'ombres et complétera le portrait de Lloyd, par le truchement de flash back qui l'inciterons à explorer les zones d'ombres de son passé, pour comprendre les non-dits et les silences de son enfance.
Parallèlement, l'auteur nous entraîne à la suite d'un tueur en série sexagénaire pour le moins inquiétant qui déroule avec minutie son sinistre modus operandi. Le lecteur comprend que les deux intrigues vont se rejoindre, mais la manière reste un mystère. La construction alternée du récit, passant du passé à un présent écartelé entre la psychothérapie et les sombres agissements de ce serial killer du troisième âge entretiennent savamment le suspens... Le lecteur s'interroge légitimement sur le lien existant entre lui et Singer et la vérité éclate, dans toute sa crudité à la fin de l'album.
Le récit se construit peu à peu, tel un casse-tête complexe. Chaque nouvelle pièce apporte un éclairage nouveau sur les événements qui ont construit la complexe personnalité de Llyod. La dernière pièce apparaît alors comme une révélation, permettant à toutes les autres de s'emboîter parfaitement... du grand art que cette construction narrative impeccable!

Olivier Martin succède à Olivier Neuray au dessin de ce thriller psychologique de haute tenue. Il se glisse avec une certaine aisance dans l'univers réaliste crée par Neuray, utilisant un vocabulaire graphique très cinématographique, dynamisant par là même ce récit intimiste de façon saisissante.

Ce troisième cycle démarre sous les meilleurs hospices. L'artifice de la psychothérapie nous permet de nous plonger de façon saisissante dans les zones sombres du passé de Lloyd Singer dont certaines n'étaient qu'esquissées dans les tomes précédents. Psychothérapie est un album dense et prenant qui prolonge le dérangeant plaisir qu'on a pris à lire les deux premiers cycles...

Pas facile de parler d’un tel album tant il est plein d’émotions, tant il est profond (et tant je ne suis pas doué). Car offrir aux lecteurs une histoire se basant sur une psychanalyse, c’est plutôt osé ! Mais bon sang qu’elle réussite !

J’ai découvert tardivement cette série (lors de la reprise chez Bamboo) et je suis rapidement tombé sous le charme de ce drôle de bonhomme qu’est Lloyd Singer tant Luc Brunschwig prend soin de nous le développer au fil des évènements dramatiques qu’il doit affronter et des plongées dans son passé qui lui donnent une réelle humanité.

Et dans cet album, finies les manœuvres d’approche, il va falloir affronter ce passé avec la famille Singer, démarche qui va s’avérer douloureuse, en particulier pour Lloyd, qui en tant qu’aîné, est un peu le dépositaire de la mémoire de la fratrie. Cette découverte du passé n’est à aucun moment ennuyeuse tant Luc Brunschwig maîtrise sa narration en la rendant rythmée grâce aux alternances passé/présent et surtout en plongeant dans des sujets complexes et délicats avec beaucoup de pudeur et de tendresse pour ses personnages. L’empathie pour cette famille ne fait que s’accroître.

Le développement de la « petite » histoire parallèle et la manière dont elle se connecte en fin de tome à la famille Singer, magnifique jalon pour le tome 2, illustre également cette intelligence narrative.

Le dessin sera mon seul petit bémol : l’univers graphique de la série est parfaitement appréhendé mais il y a de ci de là quelques imperfections sur les visages. Je les ai remarquées et regrettées mais ça n’a pas altéré le plaisir et l’émotion ressentis à la lecture de cette ouvrage.

Alors, simplement merci.