Né d’une idée d’une idée de Régis Loisel et Jean-Charles Kraehn, Fanch Karadec est un enseignant breton retraité devenu par la force du hasard enquêteur au cours de la sordide affaire du mystère Saint-Yves, narré dans le tome éponyme de la série.
Dans
la disparue de Kerlouan, Fanch va devoir réaliser une étrange enquête à rebrousse temps pour découvrir la trace d’une petite fille disparue à Brest durant l’occupation. Lorsque son ami Goulven le contacte pour répondre à une demande de sa mère agonisante, notre enquêteur est loin de se douter qu’il va exhumer un passé douloureux pour beaucoup.
1943. La mère de Goulven avait quinze ans lorsqu’elle tomba amoureuse de Wilfrid Gantz, un soldat allemand à peine plus vieux qu’elle. Avec lui, elle découvrit ses premiers émois et de leur passion naquit la petite Léa. Pour éviter la honte d’une enfant née d’un père allemand, l’enfant fut placé dans un orphelinat qui fut détruit durant les bombardements qui causèrent la tragique catastrophe de Sadi-Carnot…
Fanch Karadec va sillonner la Bretagne, de Concarneau à Morlaix en passant par Brest et le pays des Abers pour tenter de retrouver cette fille disparue que la mourante souhaiterait revoir une dernière fois avant de partir pour l’au-delà… A travers son enquête, c’est le passé de Brest, ville meurtrie par la guerre qu’il va révéler au lecteur.
Le dessin généreux de Sébastien Corbet fait merveille pour mettre en scène cet ancien enseignant que les hasards de la vie ont transformé en enquêteur reconnu. Son trait semi réaliste dont la colorisation a su préserver la force du crayonné, souligne à merveille les différentes émotions des protagonistes de cette enquête écartelée entre deux époques. Il sert avec efficacité l‘enquête intimiste concocté par Stéphane Heurteau avec qui Sébastien Corbet a déjà travaillé, sur la (remarquable) Chenue, notamment. Les deux auteurs s’avèrent une fois encore très complémentaires, Heurteau, lui-même dessinateur (Hyde, Winston Hoggart…) signant même les couleurs de cet album. Une fois encore, l’enquête très bien ficelée se mêle habilement avec des scènes de vie et d’amitié qui confèrent cette coloration et cette saveur si particulière à ce polar breton particulièrement enthousiasmant.
La disparue de Kerlouan est le troisième tome d’un polar régional qui prend le temps de développer des personnages attachants et profondément humains tout en déroulant une enquête particulièrement bien huilée.