Grand passionné d’aventure, il était tout naturel que Jean Dufaux s’intéresse à la flibuste. Il avait déjà abordé la thématique avec Ombres, mais l’histoire, écartelée entre deux époques, n’évoquait pas l’âge d’or de la Piraterie comme le fait Barracuda. Né d’une envie de Jérémy de travailler avec celui qui scénarisa deux séries qu’il colorisait avec maestria (le second cycle de la complainte des Landes Perdues et la série superbe Murena, toutes deux mises en image par l’immense et regretté Philippe Delaby), Barracuda est une série d’Aventure (avec un grand A) pleine d’actions, de complots et de sensualité qui revisite avec jubilation les codes de la piraterie.

Le fragile équilibre qui règne sur ce bout de rocher perdu dans les caraïbes qu’est l’île de Puerto Blanco est en passe de voler en éclats. L’ambigüe Emilio a vengé la mort de Flynn qui lui a légué toute sa fortune en tuant Morkam, son meurtrier. La liaison entre Raffy et Dona Maria révélée au grand jour par Fine Flamme, furieuse d’avoir été éconduite, va provoquer l’ire de Ferrango, son mari. Ivre de vengeance, il condamne l’amant à la cale, une épreuve barbare au cours de laquelle le condamné doit franchir, blessé et imbibé d’alcool une poutre passant au-dessus d’un galion éventré ou fraye deux requins. Jean Coupe-Droit, sous le coup d’un odieux chantage, ne pourra rien tenter pour le sauver… Seule l’intervention de deux galions espagnols fortement armé désireux de délivrer Dona Maria et retrouver le sulfureux Diamant du Kashar sauvera, provisoirement tout au moins, Raffy d’une mort certaine. Avec eux, un sinistre et inquiétant Frère Esteban qui semble prêt à tout pour parvenir à ses fins… Les espagnols prennent rapidement le contrôle de l’île mais leurs exactions vont causer la révolte des Tribus des Rives Pourpres contre la troupe espagnole, plongeant l’île de Puerto Blanco dans un chaos sans nom.

C’est sur un rythme échevelé que l’on reprend l’intrigue là où les auteurs l’avaient abandonné au troisième tome. Les évènements se précipitent et le destin de cette poignée de jeunes hommes et femme jetés sur Puerto Blanco après que le Barracuda, dirigé par le sinistre Blackdog, aie abordé et capturé les passagers du vaisseau du capitaine de La Loya. Son histoire chorale ou se mêlent et s’entremêlent leurs vie et où s’exacerbent leurs sentiments est balayée par le souffle de l’aventure, la passion et les trahisons. L’album porte bien son nom de révolte, tant les cartes sont redistribuées, alors que réapparait sur la dernière planche la sinistre silhouette du Barracuda…
En plus d’être un coloriste on ne peut plus talentueux, Jérémy prouve avec cette série qu’il est un dessinateur accompli. Ses cadrages sont de plus dynamiques et confèrent à l’ensemble une savoureuse touche cinématographique. Son trait dynamique accentue la dimension épique et romantique de l’intrigue de façon saisissante et particulièrement convaincante.
Révoltes poursuit un récit épique plein d’aventure, d’action et de retournements de situations. Alliances et trahisons se succèdent sur un rythme soutenu pour cette aventure de piraterie haute en couleur qui remplit toute ses promesses.