Istanbul est le dernier jeu en date signé Rüdiger Dorn, le créateur de Las Vegas, de Goa, Jambo, Genoa, Raub Ritter ou Louis XIV… Dans ce jeu édité par Matagot en France et par Pegasus Spiele dans le reste du monde, les joueurs incarnent des commerçants qui, assistés de leurs commis, vont se rendre dans les hauts lieux du bazar d’Istanbul pour tenter devenir le plus riche des marchands…


La boîte d’Istanbul regorge d’un matériel de qualité superbement illustré par un Andreas Resch (Il Vecchio, Rialto, Mauna Kea…) au mieux de sa forme.

La règle (8 pages A4) est très bien écrite, joliment et intelligemment mis en page. Sa lecture permet d’avoir une vue d’ensemble du jeu, de retrouver une éventuelle information en cours de partie et d’expliquer la règle aux nouveaux joueurs de façon relativement aisée.

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16 tuiles Quartier
1 Charrette, 1 marchand, 5 commis, 1 membre de la famille, 4 marqueurs marchandise et une aide de jeu pour chacun des 5 joueurs
26 cartes bonus
16 tuiles mosquées
10 tuiles demande (5 pour le petit marché et 5 pour le grand marché)
1 tuile premier joueur
57 pièces (12 de valeur 10, 15 de valeur 5 et 30 de valeur 1)
4 pions de bureau de poste


Grâce au schéma prenant deux pages des règles, la mise en place s’avère très fluide et ce dès la première partie. Le jeu propose de façon optionnelle différente façon d’organiser les différents quartiers pour former le bazar d’Istanbul.

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Le tour d’un joueur se déroule en quatre phases :

1Déplacement
Le joueur doit déplacer son marchand et sa pile d’assistant orthogonalement d’une ou deux cases. S’il y a un assistant de sa couleur présent, il place sa pile sur ce dernier, sinon, il enlève un assistant de sa pile et le place à côté de celle-ci. Dans ces deux cas, il pourra accomplir l’action associée au quartier lors de la phase 3.

2Rencontre avec d’autres marchands
S’il achève son déplacement sur une case où se trouve un (ou plusieurs) marchand adverse, le joueur doit leur verser deux Livres à chacun. S’il ne peut le faire, son tour s’achève immédiatement!

3Actions
Chaque quartier est associé à une action donnée (récupérer ou vendre des marchandises, jouer aux dés, acheter une extension de charrette, vendre des marchandises -et gagner de l’argent-, récupérer ses commis, acquérir des gemmes, récupérer des tuiles mosquées, libérer un membre de sa famille et lui faire accomplir une action…)

4Autres rencontres
Si le joueur achève son déplacement sur une case ou se trouve un membre d’une famille adverse, il l’envoie au Poste de Police et touche la récompense (une carte bonus ou 3 Livres).
S’il achève son déplacement dans un quartier où se trouve le Contrebandier ou le Gouverneur, il peut respectivement prendre une marchandise (contre 2 Livres ou une marchandise) et prendre une carte bonus (contre 2 livres ou une carte bonus).

Les Cartes bonus permettent de récupérer une marchandise au choix, 5 livres, d’effectuer des actions supplémentaires dans certains quartiers, de modifier le mode de déplacement de son Marchand ou de récupérer un assistant.

Les Cartes Mosquée permettent d’influencer le résultats des dés, d’enrôler un nouvel assistant, de récupérer une fois par tour un assistant contre 2 Livres ou d’acheter une marchandise supplémentaire de son choix dans les entrepôts.

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Lorsqu’un joueur remporte son cinquième rubis (le sixième à deux joueurs), on achève le tour en cours et la partie s’achève. Le joueur ayant le plus de rubis en fin de partie remporte la partie. D’éventuelles égalités sont départagées dans l’ordre par : les Livres, le nombre de marchandises dans les charrettes, le nombre de cartes bonus en main…


Difficile de rester insensible aux charmes exotiques de ce petit bijou concocté par Rüdiger Dorn.

Si le jeu peut être rangé dans la case des jeux de pose d’ouvriers, le mode de déplacement des Marchands et leur façon de réaliser les actions de chaque quartier par le truchement d’assistants est particulièrement subtil et raffiné. Omettre de bien gérer ses commis qui ne peuvent agir qu’en présence du marchand fait souvent perdre un temps précieux et le timing est d’importance dans ce jeu ou, tant dans le Palais du Sultan que chez le Joailler le cours des rubis ne fait qu’augmenter au fil de la partie… Les nombreux quartiers proposent des actions très différentes mais complémentaires multipliant les chemins vers la victoire, assurant par la même un excellent renouvellement ludique des parties…
On pourrait se sentir perdu devant les actions disponibles dans les différents quartiers, les cartes Bonus ou les cartes mosquées… Mais ce serait sans compter sur le savoir faire de Pegasus Spiele qui a finement travaillé les icônes du jeu pour les rendre suffisamment explicite pour que les joueurs n’aient pas à consulter sans cesse les règles…

On retrouve dans Istanbul des mécanismes empruntés aux précédentes créations de l’auteur, à commencer par les tuiles actions présentes dans Louis XIV (personnages) ou Goa… On apprécie tout particulièrement les micro-mécanisme simples et épurés de certains quartiers (tels le Bureau de Poste dont la physionomie est subtilement modifiée à chaque utilisation, le Poste de Police ou les Petit et Grand Marchés), la part subtile du hasard aux jeux de dés ou sur le marché noir…
L’interaction entre les joueurs est particulièrement prégnante et l’auteur a su créer un jeu de commerce (ventes, achats, échanges, dons) qui a su s’affranchir de la souvent laborieuse manipulation d’argent, ici réduite au minimum… Autant de trouvailles sobres mais efficaces qui dynamisent le jeu de façon savoureuse…

Les aménagements du jeu pour deux joueurs (introduisant des marchands neutres) s’avèrent indolores, ne nuisant en rien au plaisir du jeu. La règle optionnelle utilisant des Assistants neutres s’avère elle aussi à la fois simple et subtile, accroissant de façon savoureuse les interactions entre les joueurs, pour notre plus grand plaisir…

La thématique est fort bien rendue à travers les mécanismes et ce qui aurait pu n’être qu’un pur jeu abstrait est doté d’un thème fort, très présent, qui contribue assurément au plaisir ludique procuré par le jeu…

Istanbul est un jeu de société à la mécanique originale et ciselée dotée d’un matériel de grande qualité rehaussé de superbes illustrations. Les règles, toutes à la fois simples et fluides, induisent un jeu subtil où la notion de timing s’avère primordiale. La simplicité de ses mécanismes le destine à un public familial averti alors que leur subtilité plaira sans nuls doutes aux joueurs invétérés… Istanbul est un excellent jeu, peut-être même le meilleur de Rüdiger Dorn…



les micro-mécanismes de chaque quartier
le système de déplacement des Marchands
la subtile interaction entre les joueurs
les mises en place alternatives


les couleurs des joueurs qui font que le jeu n’est pas daltonien friendly (le noir à la place du vert aurait pu suffire…)