Beowulf est un poème épique qui occupe une place primordiale dans la littérature anglo-saxonne. Il est fort probable qu’il s’ancre dans une tradition orale scandinave et que la saga contée dans ce poème puise ses racines dans des faits historiques, magnifiés par les vers des poètes successifs qui se sont emparés et ont embelli la légende… J. R. R. Tolkien a longuement travaillé sur ce poème et ce n’est pas un hasard si le troisième et ultime combat de Beowulf évoque celui de Bilbo contre le terrifiant dragon Smaug…

Grendel, un monstre mangeur d’homme harcèle le peuple de Hrothgar, le roi du Danemark. Beowulf débarque avec quatorze guerriers pour mettre un terme aux massacres de ce monstre sanguinaire. Après un combat dantesque et puisque nulle lame forgée par l’homme ne peut la blesser, c’est à main nue qu’il terrasse la bête, entrant d’emblée dans la légende. Ensuite, le héros devra livrer un second combat contre une terrifiante ogresse qui n’est autre que la mère du monstre. Devenu roi, il livrera des années plus tard un ultime combat contre un dragon terrifiant et finira par vaincre avant de succomber à ses blessures…

Garcia Santiago et David Rubin nous livre une adaptation magistrale de cet ancien poème qui vaut surtout par la force des dessins du dessinateur espagnol dont le découpage audacieux et incisif donne toute sa dimension épique à cette formidable saga nordique. Passé le prologue fort bien mené, on ne peut qu’être envoûté par la scène inaugurale. Il eut été si simple de la scinder en deux scènes temporellement bien définies. Que nenni! Les auteurs ont concocté une scène mélangeant de façon très graphique ces deux moments, avant et pendant l’attaque de Grendel, pour donner naissance à des planches d’un redoutable dynamisme pour un résultat très cinématographique. Le reste de l’album est du même tonneau avec des scènes de combat qui offrent des planches éclatées particulièrement percutantes… L’épilogue inscrivant l’album dans la lignée des poèmes scaldes est une habile façon de conclure cette superbe adaptation de Beowulf… S’il fallait pinailler, la dernière planche aurait gagné à être redessinée pour inclure la couverture de la version française…

Garcia Santiago et David Rubin insuffle à cette saga un incroyable et saisissant souffle épique qui évoque les opéras de Wagner et sa Saga des Nibelungen qui s’abreuve à la même source nordique… Leur adaptation s’avère audacieuse flamboyante et ravira sans nul doute les amateurs de romans graphiques et de contes et légendes nordiques…