Servitude… Dès le premier tome, Fabrice David et Eric Bourgier ont imposé leur marque, annonçant une série de medieval-fantasy de haute tenue. Les tomes se sont succédés, lentement, et la qualité fut à chaque fois au rendez-vous… Iccrins est le quatrième et avant-dernier opus de cette série qui compte dores et déjà parmi les monuments du neuvième art…

Le roi des Fils de la Terre n’est plus et l’issue de la guerre semble avoir basculé lors de la bataille d’Al Astan qui a vu la victoire du duc d’Omel. Kiriel, gravement blessé, ne doit sa survie qu’à l’arrivée providentielle d’un navire volant iccrin et à l’aide précieuse de l’énigmatique Filène d’Anar, générale de Péloris ? Quels secrets garde-t-elle et quel rôle jouent les serviteurs des Anges dans ces guerres qui ravagent le continent?

Trois années après le troisième tome, nous retrouvons avec plaisir cet univers dense et foisonnant forgé par deux auteurs fort talentueux. Une fois encore, on sent que le travail sur le background a été peaufiné et le lecteur a une fois de plus l’impression que l’histoire qui lui est contée n’est que la face immergé de l’iceberg d’un monde en mouvement. Le rôliste qui sommeille en moi perçoit derrière l’intrigue le formidable potentiel de cet univers qui voit évoluer des peuples qui ont été finement travaillés. De leurs mœurs à leur organisation politique en passant par leurs costumes et architectures, rien ne semble avoir été laissé au hasard. Il y aurait là matière à un livre présentant cet univers, sa géographie et son histoire, qui pourrait être la base d’un formidable jeu de rôle tant les auteurs semblent s’être investit dans leur travail en amont de l’histoire qui nous est présentée…

Difficile de ne pas penser au Trône de Fer de George R. R. Martin qui a su tisser un univers dense et cohérent, porté par le destin d’une poignée de personnages. Tissant intrigues politiques et affrontement médiévaux, Fabrice David et Eric Bourgier ont su créer une geste grandiose. Après le peuple des mers et les Fils de la Terre, ils centrent leur récit sur le peuple Iccrin qui vit dans les airs, au sommet de trois haut piliers inaccessibles sans les navires mus par l’incroyable don des Infants… L’occasion pour les auteurs de développer un nouveau peuple, ses us et coutumes, son organisation et son histoire non exempt de zones d’ombres. Et qu’en est-il du peuple du désert? Des scènes interlopes continuent d’entrecouper le récit, annonçant que lui aussi se met en marche pour affronter participer à l’Histoire en marche… L’eau, la terre, l’air… Ne manque que le feu…

Mais si le lecteur est porté par le souffle de l’histoire qui balaye un univers d’une incroyable complexité, c’est aussi grâce au formidable travail d’Eric Bourgier qui nous livre des planches de toute beauté foisonnant de détails qui confèrent à l’ensemble toute sa force et sa crédibilité. Ses teintes sépia, pleines de subtilités et faisant la part belle aux ombres et aux lumières, apportent au récit une dimension impressionnante et son travail sur les costumes et les décors, d’inspiré historique, est tout bonnement époustouflant.

Une fois encore, de passionnantes annexes viennent compléter et enrichir le récit, pour le plus grand plaisir des amateurs de cette série… On se prend à rêver à un source book décrivant cet univers dans ses moindres détail…

La force de cette série est de parvenir à dérouler une histoire tout en étoffant l’univers en en faisant ressortir son immense richesse. Les différents peuples de ce vaste continent semblent inexorablement marcher vers leurs destins. Parviendront-il à s’affranchir des puissances qui dans l’ombre semblent tirer les ficelles? C’est là tout l’enjeu du cinquième et dernier opus de cette formidable série dont on peut espérer un second cycle tant le background semble riche et foisonnant…