Xavier Dorison et Éric Hérenguel referme le premier cycle des aventure d’Ulysse audacieusement transposée en 1781 pendant une Guerre d’Indépendance qui n’en finit plus.

Ulysse Mc Hendricks et ses compagnons ont trouvé refuge dans la vallée maudite de Wishita, poursuivis par une bande d’indiens. Là, ils vont être traqués par une créature maléfique avide de chairs humaines. Echappant de peu à la monstrueuse créature, Ulysse va tenter de tirer son fils Mack de ses griffes acérées…

Aidé par Yuma qui désire sauver Mack, Ulysse va affronter le terrible Wendigo dans un duel sanglant ou la ruse pourrait bien l’emporter sur la force brute…

A l’instar de Jean Chalopin et Nina Wolmark qui avaient adapté l’œuvre d’Homère à la sauce space opera, Xavier Dorison et Éric Hérenguel nous en proposent une adaptation saisissante, sombre et riche en action de cette Odyssée dont ce Cyclope n’est que le premier volet. En transposant le récit dans une Amérique déchirée par la guerre d’indépendance, Xavier Dorison esquisse les contours d’une uchronie saisissante et baroque. Son Ulysse est loin d’être un personnage sympathique. Autoritaire et arrogant, c’est avant tout un soldat, prêt à tout pour arriver à ses fins… Dans cette première épreuve, il va affronter un monstre terrifiant, incarnation du Cyclope de la mythologie dans une version résolument glauque et sombre qui dénonce en filigrane l’avidité sans bornes et les condamnables agissements des colons envers les natifs. Ce mélange d’histoire, de récits antiques et de légendes amérindiennes s’avère étrangement parfaitement fonctionner, conférant à la série une saveur particulière…

Le récit parallèle qui montre Pénélope en proie aux agissements d’officiers anglais et venant rythmer le récit principal apporte une note dramatique et romantique à l’ensemble, rappelant à chaque digression l’urgence pour Ulysse Mc Hendricks de revenir au foyer.

Graphiquement, le travail d’Éric Hérenguel est tout juste superbe. Rehaussé par la colorisation soignée de Sébastien Lamirand qui nimbe le récit d’une lumière fantastique et inquiétante, ses planches sont tout simplement magnifiques. Ses cadrages percutants accentuent le dynamisme des scènes d’action et son trait nerveux souligne à merveille l’ambiance oppressante de cette lutte à mort que se livrent Ulysse et le Wendigo…
Le lecteur est tenu en haleine tout au long du tome, attendant la confrontation finale qui arrive en point d’orgue, à la fin de l’album… Le final, fantastique et dantesque, renoue avec la poésie de l’épopée antique… Avec l’antépénultième planche hélas incomplète dans cette présente édition car amputée de son texte…

Porté par le dessin puissant d’Eric Hérenguel, ce second tome referme la première épreuve d’Ulysse qui tente tant bien que mal de regagner son foyer.

Cette série audacieuse et captivante se poursuivra sans le dessinateur qui l’a amorcée et on attend avec impatience de connaître le nom de celui qui lui succédera… Reprendre le flambeau ne sera pas chose aisée tant son trait énergique interprète avec une redoutable efficacité la partition de Xavier Dorison…

Quoi qu’il en soit, cette adaptation de l’œuvre d’Homère, qui s’avère aussi belle que captivante, ravira les amateurs de récits baroques, écartelés entre histoire, mythes et fantastique.