Undertaker fait partie de ces séries qui sont parvenues dès le premier tome à séduire un large public… Porté par la plume alerte de Xavier Dorison, les crayons virtuoses de Ralph Mayer, ce western atypique met en scène un personnage de croque-mort attachant malgré un passé trouble… On attendait avec impatience l’amorce du second diptyque et, disons-le sans ambages, nous ne sommes pas déçus!
Malgré ses réticences, Jonas Crow a dû s’associer à mademoiselle Lin et à Rose… La jeune et belle anglaise compte bien adoucir les manières un peu rustres de Jonas pour faire fructifier leur petite affaire et rentabiliser son investissement…
Engagés pour organiser les funérailles de la mère d’un notable aussi horripilant qu’arrogant et insensible, Jonas va être reconnu par Charley Warwick, vieux colonel manchot et alcoolique et accessoirement mari de la défunte … Ce dernier lui annonce que l’Ogre de Sutter Camp est vivant… Pour apurer les comptes avec son passé, le croque-mort se lance à la poursuite de ce boucher qui prend plaisir dans la souffrance de ses victimes… Mais Rose, Lin et le colonel comptent bien être de la partie et vont participer à cette chasse à l’homme, pour leur plus grand malheur…
C’est donc avec un réel plaisir que l’on retrouve Jonas Crow, croque-mort cynique et désabusé qui traîne son passé comme d’autres portent une croix… Et pour compliquer cette chasse à l’homme, les marshals traquant Jonas Crow pour plusieurs meurtres anciens savent qu’il est en vie et sont sur ses traces…
Si le scénario concocté par Xavier Dorison est à la fois rythmé, solidement charpenté et porté par des dialogues savoureux, ce sont ses personnages, complexes et fouillés, qui lui confèrent sa force… De Rose à Line en passant par le vieux colonel, sans oublier l’ambigu Jonas ou l’Ogre de Sutter Camp lui-même qui donne son titre à l’album…
Introduit dans un prologue angoissant, on le retrouve plus tard sous les trait d’un jovial et charismatique médecin désireux de soulager les souffrances de ses patients… Mais sous ses traits bedonnant se cache un être cruel, violent et manipulateur, un médecin sans scrupules qui a profité des charniers de la Guerre de Sécession pour se livrer à d’indicibles expériences et qui prend un plaisir abject à torturer ses victimes… Jonas et le colonel Warwick ont des comptes à régler avec lui. L’un parce qu’il lui a pris un bras et un fils… L’autre parce qu’il aurait pu jadis mettre fin à ses agissements et qu’il n’en a rien fait parce qu’il était redevable… Mais l’Ogre s’en est pris à Rose, et la donne a changé…
Comme de coutume, Ralph Mayer nous livre une partition graphique impeccable. Difficile de résister à la couverture de l’album, aussi belle et bien composée que celle des précédents tomes… Et dès la première (double) planche, on est immergé dans un western crépusculaire aux ambiances très travaillées… Son trait nerveux et virtuose, son sens du découpage affuté, sa façon de mettre en scène les personnages du récit ainsi que ses cadrages percutants et très cinématographiques mettent en images avec une redoutable efficacité le scénario nerveux et tendu de Xavier Dorison… Pour couronner le tout, la mise en couleur de Caroline Delabie est tout juste somptueuse, soulignant avec finesse et efficacité l’ambiance oppressante qui baigne le récit alors que la tension va crescendo pour un final dantesque et impromptu… Cerise sur la gâteau, un cahier graphique réservé à la première édition et qu’on aurait aimé plus épais tant il est sublime, complète l’album…
Après une étrange accalmie, avec Duke, Stern ou Undertaker, le western semble plus que jamais être revenu à la mode dans le neuvième art…
Ce nouveau cycle tant attendu d’Undertaker est une nouvelle fois porté par le scénario solide et nerveux de Xavier Dorison, le dessin virtuose de Ralph Mayer et la superbe colorisation de Caroline Delabie… Jason Crow, alias Strickland, fait partie de ces héros atypiques et attachants. Cynique et désabusé, il a plus d’une mort sur la conscience et se retrouve rattrapé par son sombre passé, traquant l’Ogre pour solder ses comptes…
Amateurs de western crépusculaire, si vous n’avez pas encore voyagé à bord du corbillard d’Undertaker, embarquez sans tarder… Vous ne le regretterez pas! Quant à nous, nous attendons la suite avec fébrilité…