Metropolis… un nom qui résonne pour les amateurs de cinéma comme le chef d’œuvre de l’expressionisme allemand… Serge Lehman rend hommage à l’œuvre de Fritz Lang à travers une dystopie uchronique envoûtante et dérangeante superbement mise en image par Stéphane De Caneva…
Gabriel Faune a laissé basculer Lohmann du côté du M pour se donner une chance de retrouver l’Automate Mentale 45, une mystérieuse œuvre d’art de Marcel Duchamp prétendument détruite et qui pourrait contenir la clef à même de lui ouvrir les portes de son obscur passé…
En assemblant peu à peu les pièces disparates du puzzle que constitue son enquête, entre mensonges et faux semblants, le citoyen numéro 1 entrevoit qu’un voile d’illusion recouvre Metropolis, masquant une réalité complexe et vertigineuse…
Metropolis fait partie de ces séries foisonnantes dont il vaut mieux relire les premiers albums avant de s’attaquer à cet ultime opus sous peine de se sentir quelque peu perdu devant la richesse et la densité de l’intrigue… L’amateur de l’œuvre de Serge Lehman ne manquera pas de sentir une certaine filiation avec
les Brigades Chimériques ou
Masqué, deux séries qui proposaient une réalité alternative et des personnages pour le délicieusement atypique… Le mélange de personnages fictionnels et historiques s’avère particulièrement savoureux, ne serait-ce que les subtiles différences existant entre le personnage réel (Freud, Hitler…) et leurs avatars de papier…
Initialement prévu en roman cette tétralogie s’avère être un récit inclassable oscillant entre le polar et , le fantastique et la SF, le tout se déroulant dans un univers retro-futuriste écartelé entre utopie et dystopie… Utopie car la première guerre mondiale n’a pas eu lieu et que l’Europe vit une longue période de paix. Dystopie car à l’instar de Faune, le lecteur comprend vite que les rouages de la grande machinerie de Metropolis, capitale de l’Interland franco-allemand, sont grippés et servent à masquer une réalité distordue plus inquiétante…
Stéphane De Caneva signe une fois encore une partition graphique saisissante, donnant corps et âme à Metropolis par ses architectures élancées ou ses voitures et costumes, subtil mélange de culture américaine et européenne… Superbement encrées et rehaussée par les magnifiques couleurs de Dimitris Martinos, ses planches immergent le lecteur dans les ruelles labyrinthiques et tentaculaires de la cité de Metropolis… Sensiblement différent de ses précédents travaux, le style adopté par le dessinateur colle parfaitement aux ambiances oppressantes de l’histoire concoctée par Serge Lehman.
A noter le formidable travail de Benjamin Carré qui signe une fois encore une couverture somptueuse… Mis bout à bout, les quatre couvertures semblent raconter une histoire, celle du dernier opus répondant aux premières cases du premier tome, offrant une délicieuse et vertigineuse mise en abîme…
Avec Metropolis, Serge Lehman rend hommage au Metropolis de Fritz Lang qui hanta et influença profondément les œuvres de science-fiction du XXème siècle.
Associé à Stéphane De Caneva, il donne chair et corps à cette ville tentaculaire qui semble vivre et respirer, esquissant les contours d’une réalité distordue aussi inquiétante que fascinante… Le récit complexe et tentaculaire du scénariste des Brigades Chimériques entre en résonnance avec l’œuvre de Fritz Lang avec une fin plutôt heureuse… bien qu’elle soit le prélude à un drame à venir...
Metropolis est indéniablement une série saisissante qui ne devrait laisser personne indifférent.