Alexandro Jodorowsky et Jérémy associent leurs talents pour signer un récit d’aventure mêlant histoire et fantastique comme il se doit chargé de sang, de violence et de mysticisme…
Le XVIIIe siècle touche à sa fin. Dans un temple isolé au nord de l’Espagne vit une assemblée d’alchimistes immortels… Le disciple Dix-sept s’apprête à passer les ultimes épreuves qui lui permettront d’intégrer l’ordre des Chevaliers d'Héliopolis… L’occasion pour son maître, le vénérable Fulcanelli, alchimiste réputé, de lever le voile sur les origines de son élève…
Ce dernier n’est autre que le fils de Louis XVI et de Marie-Antoinette, légitime héritier de la couronne de France. Va-t-il réclamer son dû ou rester fidèle aux préceptes de son ordre?
Difficile de ne pas tomber sous le charme du formidable dessin de Jérémy qui a fait ses premières armes comme coloriste aux côtés d’un maître trop tôt disparu : Philippe Delaby avec lequel il travailla sur les envoûtantes
Complaintes des Landes Perdues et
Murena avant de signer les dessins de
Barracuda, trois séries scénarisées par le prolifique et talentueux Jean Dufaux. Alexandro Jodorowsky a toujours su s’associer avec les meilleurs, de Moebius à Bess en passant par Manara, Boucq ou Gimenez…
Et Jérémy ne dépareille pas dans cette liste des grands noms du neuvième art! Il suffit de feuilleter l’album pour s’en convaincre! D’autant que la colorisation de Felideus s’avère pour le moins somptueuse…
Le scénario d’Alexandro Jodorowsky est… jodorowskyesque… On y retrouve les thématiques chères à l’auteur chilien: la violence, le sexe (les deux étant souvent liés), les difformités et la folie, le tout fortement chargé de symbolisme, d’ésotérisme et de mysticisme… Pour tisser ce récit, le scénariste n’hésite pas à tordre l’histoire pour en accentuer sa dramaturgie.
Il s’empare ainsi du mythe romanesque de la survivance de Louis XVII, battu en brèche par des analyse ADN menée au début des années 2000 mais qui est encore malgré tout sujet à caution… D’autant que Jodorowsky en donne une version savoureuse, même si les analyse menées alors portaient sur l’ADN de Marie-Antoinette et non sur celui des Bourbons!… D’autres arcs narratifs s’avèrent plus surprenant, tel le sort réservé les actions de Charlotte Corday attribué à une autre pour servir la dramaturgie… Mais l’ensemble se lit avec plaisir et pose les bases d’une série d’aventure historique, fantastique et mystique…
Avec Nigredo, l'Oeuvre au Noir, premier tome des Chevaliers d'Héliopolis, Alexandro Jodorowsky et Jérémy nous entraîne dans les coulisses de l’histoire de France avec un récit d’aventure mêlant personnages historiques et fictifs, avec cette dose de violence, de sang, de sexe et de folie propre aux scénarios du maître chilien…
Comme à l’accoutumée, Jérémy fait montre de son talent en donnant corps au scénario chargé de symbole et de mysticisme qui verra le jeune Louis XVII passer par les étapes du processus alchimique pour passer de l’ombre à la lumière et de la matière organique au pur esprit…
Les amateurs de l’œuvre d’Alexandro Jodorowsky seront sans nul doute conquis par sa nouvelle série mais ces détracteurs y retrouveront ses excès, bien que semble-t-il tempérés par Jérémy…