



Après le saisissant Vinci, Didier Convard nous invite à une nouvelle enquête mêlant ésotérisme, crimes mystiques et monde de l'art dans l'Italie de la Renaissance alors que Thibaud de Rochebrune a la lourde tâche de succéder à Gilles Chaillet qui a créé le personnage du Prêvot Vittore…
Milan, 1508. Alors qu’il s’apprête à fêter ses 57 ans, le Prévôt Vittore est mandé pour enquêter sur une mort incongrue: une tête est retrouvée sur un plateau dans le baptistère de Saint-Ambroise. Grossièrement gravé à l’arrière du plateau, trois mots en latin : VENIT IUSTITIAE SOL, qui peut se traduire par « Le Soleil de Justice a brillé ». Une phrase ignorée du profane qu’aurait prononcé Ambroise lorsqu’il baptisa Augustin en ce lieu même où l’on a trouvé la tête.
Assisté par Menanzzo, le prévôt va mener son enquête. Il établit rapidement que la victime est un architecte récemment installé en ville et qui travaillait à la réfection de l’abbaye cistercienne de Morimondo. Sans doute est-ce dans les murs même de cette abbaye que l’architecte a été enlevé…
L’enquête va relier la victime à l’ordre à la tête de Jean le Baptiste, qu’un homme qu’on appelle le Baphomet cherche ardemment…
A Rome et sur les conseils fielleux de Bramante, Michel Ange est engagé par le pape Jules II pour peindre une fresque dans la chapelle sixtine, le contraignant à abandonner le mausolée commandé par ce dernier… A contre cœur, l’artiste va abandonner la sculpture qu’il aime tant pour se consacrer à un art qu’il juge mineur… Qu’est ce qui relie Michel Ange, ce meurtre sordide, la relique de Jean le Baptiste et le sinistre Baphomet?

La première scène prend le lecteur à contre-pied. S’attendant légitimement à plonger au cœur du Milan de la renaissance, le voilà propulsé aux premières heures du christianisme, alors que la belle et envoûtante Salomé dansait pour son oncle et beau-père, le roi Hérode… Fasciné par sa beauté, le monarque lui promet de lui offrir tout ce qu’elle demande… Pour avoir osé critiquer Hérodias et son mariage avec Hérode, frère de son ancien mari, Salomé demande la tête de Jean le Baptiste…
Après ce prologue déroutant, le lecteur est transporté dans le Rome de la renaissance, alors que Jules II vient de commander au grand Michel Ange une fresque pour décorer le plafond de la Chapelle Sixtine, provoquant sa colère… Puis c’est à Milan que l’on se retrouve, pour suivre l’enquête de Vittore, malade mais refusant de perdre du temps à se soigner, trop occupé par sa charge et cette enquête sur ce meurtre sordide et sa macabre mise en scène…
Vittore fait une nouvelle fois de ses talents d’enquêteur et de son sens aigu de la déduction et Didier Convard de son goût pour l’histoire et l’ésotérisme. Eric Adam s’empare du roman de ce dernier pour tisser un album prenant et envoûtant. Plongeant ses racines dans le christianisme naissant, le récit choral du scénariste met en scène plusieurs factions et personnages, impulsant un rythme appréciable à son récit. De nombreux arcs narratifs sont esquissés et nous brûlons de savoir comment ils vont s’assembler dans le second et dernier volet de cette intrigue sombre et violente…

Succédant à Gilles Chaillet, Thibaud de Rochebrune signe un album parfaitement maîtrisé. Le dessinateur de
Bluehope ou le
Pinocchio de l’Origine des Contes signe des planches joliment composées et son trait classique, rehaussé par les couleurs de Delf, fait revivre l’Italie de la Renaissance comme la Palestine des début de l’ère chrétienne, distillant une inquiétante atmosphère de mystères avec une redoutable efficacité…
Eric Adam signe avec Le banquet des damnés un premier volet particulièrement prometteur, d’autant que cette remarquable adaptation du roman de Didier Convard est mise en images par le talentueux Thibaud de Rochebrune qui reprend le flambeau laissé par le regretté Gilles Chaillet…
Plongeant ses racines aux sources du christianisme, ce polar historique mêlant ésotérisme, art et crimes sanglant entraîne le lecteur dans la Renaissance italienne et met en scène des figures historiques telles Michel Ange, qui prête son nom à la série, ou Julles II…
Si le lecteur sera sans nul doute frustré à l’issue de ce premier tome, il ne devra pas attendre trop longtemps pour avoir la conclusion de cette nouvelle enquête du Prêvot Vittore puisque le second tome de ce diptyque est annoncé pour septembre…