L’annonce de l’adaptation d’Elric en BD était de celles à faire frémir de plaisir et de crainte les amateurs de ce chef d’œuvre de Michael Moorcock tant les attentes étaient aussi grandes que la peu d’être déçu… Porté par une équipe d’auteurs et de dessinateurs talentueux (qui a été depuis remaniée) le premier tome avait indéniablement marqué les esprits par ses qualités graphiques et narratives que le second n’avait fait que confirmer… S’il a fallu attendre ce troisième opus quelques années, tranchons net : c’est un franche réussite!

Une année s’est écoulé depuis qu’Elric a quitté son trône d’Imrryr, abandonnant Cymoril pour lui éviter la mort… Une année qu’il arpente les Jeunes Royaumes, forgeant sa légende, armé de Stormbringer, son épée-démon sans qui il n’est plus qu’un être frêle et chétif…

Celui qui fut l’Empereur de Melniboné n’est plus aujourd’hui que le Loup Blanc mais son surnom même inspire la crainte… Sa route va croiser celle de Smiorgan-Tête-Chauve, Comte et Seigneur-Marchand des Cités Pourpres qu’il sauvera d’une bande d’esclavagiste…

Avec lui, il gagnera la cité de Dhakos où il fera la rencontre de la belle Vassliss qui l’entraînera dans une incroyable aventure sur l’île du Chaos crée par Saxif d’Aan, l’un des Prince Sorcier les plus redouté de son temps et qui s’était jadis, lui aussi, exilé par amour…

L’album était très attendu et il est indéniablement à la hauteur de nos plus folles espérances.

S’emparant avec audace de l’œuvre de Moorcock, les auteurs nous en proposent une adaptation solide et envoûtante. Porté par des dialogues percutants leur récit s’avère tout à la fois respectueux de l’œuvre originelle et délicieusement iconoclaste… La dernière planche de l’album surprendra indéniablement les lecteurs de s romans qui marquèrent de leur empreinte l’heroic-fantasy et influençèrent durablement des générations d’auteurs.

A l’instar du romancier britannique, les deux scénaristes parviennent à dérouler un récit épique plein de sang, de fureur et de magie tout en esquissant les contours d’un univers dense et foisonnant… Quel plaisir que de se retrouver immergés dans ces Jeunes Royaumes sur lesquelles planent l’ombre menaçante des dragons melnibonéens… Et quel plaisir que de retrouver Elric de Melniboné, héros sombre, tourmenté et tragiquement romantique qui ne doit de survivre qu’à son épée démoniaque qui le pousse à prendre des vies et des âmes et à laquelle il tente, vainement, de résister…

Si l’album est porté par une narration particulièrement soignée, force est de reconnaître que les dessins ne sont pas en reste! La formidable équipe de dessinateurs chevronnés réunies autour de ce projet nous offre des pages somptueuses portées par des cadrages d’une redoutable efficacité. Il se dégage des planches signées par Julien et Telo et Robin Recht une force et un dynamisme épatants alors que les sublimes couleurs Jean Bastide soulignent à merveille les ambiances de chaque scène, comme l’aurait fait une musique de film… Et que dire de cette couverture envoûtante signée par Jean Bastide et Robin Recht sinon qu’elle est tout juste magnifique?

Annonciateur du dernier tome et du dénouement forcément tragique du cycle, ce Loup Blanc était l’un des albums très attendus de cette rentrée littéraire…

S’il a fallu de longues années à l’écrire et à le dessiner, c’est peu dire qu’on se replonge avec un plaisir jubilatoire dans les Jeunes Royaumes à la suite d’Elric le Nécromancien, personnage emblématique de l’heroic-fantasy qui se voit enfin gratifier d’une adaptation digne de l’œuvre de ce nom…

Respectueux de l’œuvre originale, Julien Blondel et Jean-Luc Cano se permettent de délicieuses trahisons, surprenant de façon saisissante les lecteurs des romans et laissant augurer une final épatant…

T’arrive-t-il de rêver Cymoril? T’arrive-t-il d’espérer que tout ceci ne soit qu’un songe? Que nos existences mêmes ne soient qu’un long spectacle dont le destin nous persuade d’attendre le dénouement?Elric de Melniboné