Dans une ambiance rappelant celle du génialiscime
Days of the Tentacle, chef d’œuvre du jeu vidéo des années 90 signé par Dave Grossman et Tim Schafer, Antonin Boccara créé un jeu de dés azimutés aussi explosif que jubilatoire.
Dans
Attack of the Jelly Monster (AotJM pour les intimes), un terrifiant alien gélatineux sème la panique dans une ville qui se trouve être la vôtre… Alors que l’armée se charge de le renvoyer dans l’espace, les joueurs s’efforcent de faire quelques prélèvements d’échantillons gluants afin d’analyser tout ça en cas d’invasion future… Mais, loin de coopérer, les différentes escouades ne reculeront devant rien pour montrer leur suprématie…
Règles et matériel
C’est peu dire que l’illustration acidulée et cartonnesque de la boîte attire l’œil du chaland autant qu’il l’intrigue…
Le matériel qui s’y trouve s’avère tout aussi sympathique : un plateau modulaire représentant l’infâme créature de l’espace qui étend sa gélatine mauve dans les différents quartiers de la ville, des tuiles très sympathiques, un drone compteur de tour, un sablier de dix secondes à peine, des jetons et des barrières pliables (ou figure un aide-mémoire précieux pour la première partie) qui auront peut-être du mal à résister à l’épreuve du temps mais qui contribuent grandement à poser les bases d’un univers joyeusement pulp tant le travail d’illustration de Guillaume Duchemin (qui a fait ses armes chez Ankama sur les univers de Wakfu) s’avère sympathique et attractif…
Le livret de règles (8 pages) est fidèle à la tradition Libelludienne: beau, clair, dûment illustré et très bien écrit… Une lecture suffit pour comprendre les règles et pouvoir les expliquer sans heurts…
Contenu de la boîte: 1 plateau Centre-Ville en 3 parties (fonction du nombre de joueurs), 8 tuiles Quartier réversibles, 7 curseurs Cible, 80 jetons Gelée (de valeur 1, 5 et 10), 1 tuile drone compteur de tour, 30 jetons Jelly-pod, 1 sablier et, pour chacun des 7 joueurs, un set de 7 dés de couleur et 1 barrière.
Déroulement d’une partie
Mise en place
La mise en place s’avère particulièrement rapide d’autant que le schéma proposé par les règles s’avère particulièrement clair... Le plateau Centre-Ville (dont la taille dépend du nombre de joueurs) est assemblé et les curseurs Cible sont positionnés à l’extérieur de chaque quartier, les Jelly-pod posés en pile au centre de la ville et le Drone placé aléatoirement entre deux quartiers. Chaque joueur reçoit son set de matériel. 3…2…1… Action!
Deroulement
Dans AotJM, les joueurs jouent en simultané… Ils s’emparent de leurs dés restants, les lancent dans leur barrière, en place éventuellement 1 devant un quartier et… recommencent jusqu’à épuisement des dés…
Lorsqu’un joueur a fini de placer ses 7 dés, il peut bloquer l’accès à un quartier en plaçant sa barrière (plus personne ne pourra jouer dans ce quartier) et peut enclencher le décompte en retournant le sablier… Une fois le sable écoulé, la manche est terminée!
En plaçant les dés, les joueurs vont s’efforcer d’obtenir des majorités dans des quartiers pour recueillir les récompenses indiquées par le curseur ou les refourguer aux autres… Mais les dés ont des effets spéciaux: les faces 1 et 2 permettent de retirer un dé du quartier pour le placer dans le centre-ville… les faces 3 et 4 permettent de déplacer d’un cran le curseur, modifiant subtilement le bonus récupérable! Les faces 5 et 6 n’ont aucun effet particulier mais s’avèrent souvent déterminantes pour les majorités!
A l’issue de la manche, les dés de couleurs et de faces identiques sont défaussés… Ensuite, quartier par quartier, on évalue les majorité… Le gagnant remporte la récompense associée, qui peut être bénéfique… ou pas! Le joueur ayant le plus de dés au centre-ville s’empare d’un jeton Jelly-pod…
Chacun récupère ses dés. Le marqueur de progression du Drone est avancé de 1 et le plateau de jeu pivote de 90°, histoire de brouiller les pistes et ajouter à la pagaille ambiante…
Fin de partie
A l’issue des quatre manches, les joueurs, épuisés, font le décompte des jetons Gelée récoltés, le gagnant étant comme il se doit celui totalisant le plus de Gelée…
l’Avis de la Rédaction
A lire les règles on se dit que ce nouveau jeu d’Antonin Boccara a un petit lien de parenté avec
Las Vegas, l’excellent Rüdiger Dorn du grand Rüdiger Dorn… Mais
un Las Vegas survitaminé!
Mais si on y retrouve l’idée de majorité qui permet d’attribuer des
récompenses au(x) vainqueur(s), les deux jeux procurent des sensations radicalement différentes… La
nature variée des récompenses, le
jeu en simultané,
l’effet de certaines faces et le facteur temps induisent un
stress délicieux qui incitent les joueurs à lancer frénétiquement leurs dés, faire marcher leurs neurones à 200 à l’heure pour tenter de s’emparer des meilleurs bonus… Tout en s’efforçant de
mettre des bâtons dans les roues des adversaires en virant un de leur dé ou, plus vicieux, en modifiant subtilement la récompense visée… Mais pour cela il faudra, en plus de chercher où jouer,
perdre du temps à observer les manœuvres des adversaires!
La règle obligeant à
défausser en fin de manche
les dés de même face et même couleur se trouvant dans un quartier donné semble à la lecture des règle assez inutile… mais croyez-moi, dans le feu de l’action, on a tôt fait de poser un dé quelque part, ne serait-ce parce que votre voisin pose les siens à un rythme trop soutenu, ou de
se battre pour un bonus totalement stupide au vu des circonstances…
La taille du centre-ville (et donc le nombre de quartiers s’y accrochant)
modulable en fonction du nombre de joueurs assure des parties tendues quel que soit la configuration alors que les
quartiers réversibles combinables à loisir induisent des parties aux physionomies subtilement différentes… Avant que le signal du départ de la manche ne soit donné, il n’est pas inutile de prendre le temps de repérer les quartiers intéressants, même s’ils le sont tous pour des raisons très différentes!
Après les excellents Doggy Bag et Kids of London ou le bien nommé Panic Island!, Antonin Boccara revient avec un jeu de dés frénétiques, fils caché du Las Vegas de Rüdiger Dorn et de l’Escape de Kristian Amundsen Østby, le tout dans l’univers de Days of the Tentacle…
Porté par les illustrations pulp, cartoonesques et acidulées signées Guillaume Duchemin (qui fait une entrée remarquée dans le monde du jeu), et des règles simples, Attack of the Jelly Monster est un jeu qui allie réflexes et réflexions de façon saisissante, pour des parties aussi tendues que survitaminées!
Un véritable O.L.N.I (Objet Ludique Non Identifié) à essayer d’urgence!
On aime...
le design pulp, cartoonesque et acidulé
les règles simples et fluides
les parties frénétiques et jubilatoires
un véritable O.L.N.I.
On n'aime pas...
mais pourquoi ai-je posé mon dé là moi ???