Après Jean-David Morvan et Pierre Alary, Vincent Brugeas et Ronan Toulhoat, Mathieu Gabella et Anthony Jean puis Robin Recht, c’est au tour du tandem formé par les talentueux Luc Brunschwig et Étienne Le Roux de revisiter l’œuvre Robert E. Howard…
La paisible capitale d'Aquilonie voit sa quiétude brisée par l’arrivée à bride abattue de Flavio, le ménestrel du Roi Conan, porteur d’une terrible nouvelle : l’ennemi sera bientôt devant les murailles ! A la suite d’une infâme trahison, l’armée du Conan a en effet subi un cruel revers contre la puissance coalition menée par le sorcier Tsotha-Lanthi et le puissant roi a trouvé la mort sur le champ de bataille, submergé par le nombre…
Pourtant, malgré les légitimes inquiétude de son ménestrel, Conan n’est pas mort. Il est prisonnier et a été emmené couverts de chaînes dans les sordides geôles de la sinistre Citadelle Ecarlate. Là, il subit d’indicibles torture pour le forcer à signer son abdication alors que les armées ennemies marchent sur sa capitale… Le règne du roi Conan semble toucher à sa fin…
Héros créé par Robert E. Howard il y a près quelques 90 ans, Conan semble doté de plusieurs vies… Tour à tour aventurier, pirate, conquérant, justicier ou vagabond, nous le découvrons dans ce récit en roi dont le pouvoir vacille dangereusement suite à la trahison de sa noblesse et de ses alliés. Il montre dans ce récit un nouveau visage : celui d’un despote éclairé soucieux du bonheur de son peuple et près à sacrifier sa propre vie pour ne pas le livrer aux chiens qui l’ont trahi… La Citadelle Ecarlate sera son purgatoire et contre toute attente, l’aventurier qui a toujours honni la magie et la sorcellerie va pactiser avec un puissant sorcier pour s’extirper de cette édifice labyrinthique peuplée de dangers indicibles…
Luc Brunschwig ne se contente pas d’adapter la nouvelle éponyme. Il la revisite, lui insufflant une touche personnelle qui pourra rebuter les puristes mais enthousiasmer les amateurs de récits épiques. L’auteur parvient avec finesse à faire ressortir l’humanité du puissant barbare en faisant apparaître une vulnérabilité qu’on ne lui connaissait pas. L’auteur malmène la structure de l’histoire en tissant deux récits parallèles qui impulse à l’histoire un rythme soutenu… L’une est centré sur Conan, prisonnier au cœur de la citadelle Ecarlate, l’autre sur l’autre dans la Capitale du Royaume d'Aquilonie, permettant au scénariste d’étoffer dimension politique du récit et la bassesse de la noblesse aquilonienne… Après avoir touché le fond, on va voir Conan reprendre du poil de la bête et retrouver peu à peu de sa superbe, en puisant dans la rage et la colère qui ne l’ont jamais quitté…
Renouant avec le medieval-fantasy qu’il avait exploré avec
Le Serment de l’Ambre, Étienne Le Roux signe un album d’autant plus somptueux qu’il est superbement mis en couleur par l’inénarrable Hubert. Le trait puissant du dessinateur colle parfaitement au propos et certaines de ses planches sont tout juste bluffantes ; telles celles montrant la bataille qui vit Conan ployer le genoux où celle où le monarque déchu croise la route du sorcier Pelias, alors en fâcheuse posture… Difficile de ne as être impressionné par la pertinence de ses cadrages qui soulignent de façon saisissante la dramaturgie du récit tout en impulsant une énergie folle à chacune des scènes qu’il met en image…
Les gardiens du temple de Robert E. Howard auront beau crier au scandale et prétendre que l’auteur a dénaturé l’œuvre du romancier, Luc Brunschwig n’en signe pas moins une remarquable adaptation de la Citadelle Ecarlate en offrant certes une vision personnelle mais indéniablement très inspiré de la nouvelle.
S’inscrivant dans une veine de medieval-fantasy, son récit est somptueusement mis en scène par le trait puissant d’Étienne Le Roux, sublimé par les somptueuses couleurs d’Hubert. Trahisons, créatures monstrueuses, magie noire et sorcellerie sont au menu de ce cinquième tome des aventures de Conan le Cimérien qui aborde une nouvelle facette de ce héros aux mille et une vie…
L’album est complété par un texte de Patrice Louinet, grand spécialiste d’Howard et, pour cette première édition, par de magnifiques illustrations signées par des dessinateurs virtuoses qui ont signé avec le scénariste de petits bijoux du neuvième art…
Depuis que je règne, les nobles n’osent plus contester le pouvoir du roi. Mes gens n’ont plus à craindre pour leurs vies. Et les taxes sont chez moi plus légères que partout ailleurs.Conan, Roi d’Aquilonie