Luwelyn (scénariste tricéphale conjuguant les talents de David Chauvel, Patrick Wong et Andoryss), Jérôme Lereculey et Dimitris Martinos… Avec une telle affiche, ce premier des
5 Terres faisait partie de ceux que nous attendions avec une impatience fébrile… Et il ne faut que quelques pages pour comprendre qu’il s’agit de l’une des séries de médiévales-fantasy les plus enthousiasmantes de ces dernières années.
Le vieux roi Cyrus, héros de la bataille de Drakhenor, est mourant et ses jours sont comptés… Sa mort prochaine attise les ambitions et les convoitises d’autant que son neveu Hirus, successeur désigné, est lion de faire l’unanimité.
Nombreux sont ceux qui lorgnent sur la couronne, à commencer par la princesse Mileria, fille du monarque, qui ambitionne de s’asseoir sur le trône, dut-elle pour cela forger une alliance contre nature avec les ours…
Difficile de ne pas tomber sous le(s) charme(s) de ce récit choral finement orchestré. Luwelyn signe indéniablement un scénario de haute tenue dans une ambiance savoureuses où différentes factions se disputent la couronne d’un roi agonisant… De sombres complots s’ourdissent à l’ombre du trône, des idylles se nouent, des mariages s’arrangent pour préserver la paix, des rancœurs jusque-là jugulées menacent de faire surface et de sinistres trahisons se préparent… Difficile de ne pas penser au Trône de Fer de George R. R. Martin tant pour les personnages ambivalents et hauts en couleur que pour le background soigné dont l’intrigue ne semble être que la partie émergée de l’iceberg.
La façon dont les auteurs esquissent les contours de l’univers tout en déroulant l’intrigue est la preuve de leurs talents de conteurs... Le visuel qui ouvre presque l’album et donne la mesure du lieu où se déroulera une bonne partie de l’intrigue de ce présent tome… ou cette scène qui voit des courtisanes échanger à voix basse des confidences durant une cérémonie quasi reli-gieuse… un petit bijou d’orfèvrerie qui pose en quelques cases la complexe situation politique tout en présentant les différentes factions en présence… Du grand art narratif, assurément…
C’est toujours avec un réel plaisir que l’on découvre le travail du talentueux Jérôme Lereculey dont le trait puissant débordant d’énergie et les compositions soignées forcent l’admiration. Basé sur un character design signé Didier Poli, ses personnages antropomorphiques permettent de saisir d’emblée la psychologie des différents protagonistes, même si elles s’avèreront, comme on le découvrira, pleines de ces subtiles nuances qui en font des personnages éminem-ment tortueux et complexes. L’encrage de Lucyd est tout à la fois subtil et élégant alors que la mise en couleur de Dimitris Martinos (qui avait déjà œuvré sur l’envoûtant
Metropolis de Serge Lehman et Stéphane De Caneva) s’avère quant à elle particulièrement somptueuse.
La couverture montrant un roi fatigué semblant s’effacer devant la farouche détermination de sa fille est une petite merveille de composition qui attire d’emblée le regard… L’album est par ailleurs complété par un superbe (mais comme de coutume trop court !) cahier graphique per-mettant de mieux comprendre les apports de Didier Poli ou d’Olivier Caudron à ce solide édi-fice et la façon de travailler du dessinateur…
Les 5 Terres est une série particulièrement ambitieuse qui se donne les moyens d’assouvir ses folles ambitions : 3 scénaristes, 1 dessinateur, 1 encreur, 1 designer et 1 coloriste… Et pas des moindres ! Pensez donc : David Chauvel, Didier Polis, Jérôme Lereculey… Des noms prestigieux à même de donner envie au lecteur le plus blasé, complétés par les talentueux Dimitris Martinos, Andoryss, Patrick Wong… Une équipe de choc, donc, pour tenir un rythme des plus soutenu : trente albums prévus dont les trois premiers paraîtrons en moins d’une année !
Les scénaristes nous offrent un récit choral parfaitement orchestré solidement charpenté autour de personnages complexes et tortueux à souhait qui nous donnent la furieuse impression de n’avoir qu’effleuré l’histoire tant ils ont semé les germes de différents arcs narratifs qui ne vont pas manquer de se télescoper. Le lecteur a ainsi la furieuse impression de visionner le premier opus d’une série TV particulièrement addictive qui happe le lecteur dès les premières pages pour l’abandonner à la toute dernière page avec ce délicieux sentiment de frustration qui est la marque des grandes séries. D’autant que le cliffhanger clôturant ce présent album s’avère aussi vertigineux qu’inattendu !
Impossible de clôturer cette chronique sans revenir sur le formidable travail de Jérôme Lereculey dont le trait puissant et les découpages virtuoses servent le récit à la perfection…
De toutes mes forces amorce une série de medieval-fantasy antropomorphique de haute tenue dont il nous tarde de lire la suite (dores et déjà annoncée pour janvier 2020 !) tant nous avons été enthousiasmé par cette délicieuse mise en bouche…
Il va crever… Il ne s’est même pas déplacé à la cérémonie du sang. Il est fini, ce n’est plus qu’une question de jours. Regarde-les… Ca conspire dans tous les coins. Les grandes familles aiguisent déjà leurs griffes. Mets-toi à leur place. L’occasion est trop belle. Alors qui ? Si le vieux n’y prend pas garde, ça pourrait bien être la fin de la dynastie des Magneondialogue entre courtisans