De par sa qualité d’écriture et le soin apporté tant à la construction des personnages qu’à la reconstitution historique minutieuse,
La Guerre des Lulus fait partie de ces série, trop rares, qu’enfants et parents peuvent lire avec un même plaisir. Avec
la Perspective Luigi, Régis Hautière revient sur la parenthèse allemande de l’odyssée des Lulus durant la Grande Guerre…
Alors qu’ils pensaient gagner la Suisse pour échapper à la guerre, les Lulus se sont retrouvés à Berlin, en plein cœur du Reich. Après avoir fraternisé avec des gosses des rues, ils sont finalement arrêtés et enfermés dans le camp de détention de Holzminden où ils partageront le quotidien avec des prisonniers venus des quatre coins de l’Europe…
Mais les Lulus ne sont pas le genre d’oiseaux à se laisser enfermer… Aussi vont-ils vont échafauder un plan d’évasion digne des grands romans d’aventure, aidés par des plus grands qu’eux…
Une fois encore, Régis Hautière fait montre de ses talents de conteur avec ce récit enchâssé dans un autre… Car le narrateur de l’histoire n’est autre que Luigi qui, devenu fabriquant de confitures, confie ses souvenirs à un écrivain désireux d’écrire un livre, leurs échanges venant parfois interrompre le compte rendu des souvenirs de Luigi. La complicité qui s’installe entre le romancier et le jeune homme s’avère particulièrement touchante… Et l’histoire de Luigi on ne peut plus captivante !
Même enfermé dans un camp de prisonniers, cette joyeuse bande des Lulus fait immanquablement penser à celle Longeverne de la Guerre des Boutons. Leur fraîcheur, leur spontanéité et la candeur de leur folle et insouciante jeunesse rendent leurs aventures passionnantes. Mais la force du récit réside surtout dans la personnalité de chacun des protagonistes qui ont tous fait l’objet d’un travail et d’une écriture soignée, jusque dans les dialogues savamment composés.
Mais si l’album s’avère tellement touchant et entraînant, c’est indéniablement grâce au talent de Damien Cuvillier qui, après avoir signer les storyboard à partir du tome 3, a repris les personnages nés sous les crayons de Hardoc pour mettre en images cette parenthèse dans l’épopée des Lulus. Son trait énergique donne vie à une formidable galerie de personnages, tels Monsieur Joseph, Monsieur Decombray ou Marceline dont chacun s’avère, à sa manière, très attachant… Ses compositions sont joliment mises en valeur par la colorisation soignée de David François qui oppose joliment les teintes pastelles, chaleureuses et apaisantes des scènes de dialogues entre Luigi et le romancier et celles, plus dures et tranchées, se déroulant derrière les barbelés du camp d’internement de Holzminden.
La guerre s’est terminée lors du tome précédent mais les Lulus n’ont pas fini de nous livrer leur souvenirs…
Dans ce captivant diptyque, Luigi revient sur leur séjour impromptu en Allemagne durant l’année 1916 au cours d’un entretien qu’il accorde à un écrivain, offrant une narration alternée parfaitement maîtrisée qui impulse un rythme soutenu à l’album… Régis Hautière fait une nouvelle fois montre de ses talents de conteurs et de dialoguistes en mettant en scène des personnages profondément humains et, par là même, particulièrement attachant… et ce d’autant plus qu’ils sont mis en images par le trait généreux et expressif de Damien Cuvillier…
Cette Perspective Luigi prolonge une série riche et captivante qui séduira petits et grands enfants pour ses qualités d’écriture et la qualité de ses dessins… Et l’aventure est loin d’être finie puisque chacun des Lulus va nous raconter son après-guerre… Cinq albums que nous attendons avec non sans une certaine impatience tant nous avons apprécié ces années passées à leurs côtés !
J’en pense mon gars que ton copain est un grand malade. C’est le projet d’évasion le plus cinglé que j’ai jamais entendu… Et c’est pour ça qu’il me plaît.Monsieur Joseph