



Après avoir exploré de nombreux genres en se renouvelant à chaque fois, l’éclectique Merwan se lance avec
Mécanique Céleste dans un récit post-apo particulièrement savoureux…
La société occidentale s’est effondrée et de petites communautés se sont organisées pour assurer leur survie… La cité agricole de Pan est l’une d’entre elles et assure à chacun de ses habitants sa part de nourriture. Wallis est membre de Pan, mais son amie Aster n’a pas cette chance… Mais cela ne les empêche pas d’explorer ensemble la zone interdite pour y dénicher des reliques du passé qu’ils pourront revendre à un bon prix…
Mais le fragile équilibre de la petite communauté allait être bouleversé par l’arrivée d’un émissaire de la puissante république Fortuna qui exige le rattachement de Pan à Fortuna, sous peine de répression. En échange de leur protection, Pan s’engagera alors à verser 25% de leurs récoltes… Mais lorsque le représentant en chef de Pan, qui n’est autre que le père de Wallis, apprend que la cité peut exiger l’arbitrage de la Mécanique Céleste, il choisit de le demander… sans trop savoir de quoi il en retourne…
Le destin de Pan et de ses hommes va donc se jouer selon des règles dont ils ignorent tout…

Le post-apo est un genre quasiment aussi ancien que l’écriture… Le récit biblique du déluge n’en est-il pas en effet un bel exemple ? Merwan renouvelle le genre en proposant un récit post-apo résolument optimiste. Comme dans bien des récits, on ignore tous des tragiques conséquences qui ont provoqué la fin d’une civilisation… Mais ici, la société décrite par l’auteur n’a rien de violent, de sombre ou de désespéré… Bien des choses ont été mises à bat et la loi du plus fort s’impose bien sûr comme dans bien des organisations humaines. Mais la vie continue, malgré tout, et l’histoire qui nous est conté s’avère particulièrement optimiste et porteuse d’espoir… Si la violence est présente, elle est adoucie par l’absence d’armes létales qui accentue l’aspect délicieusement décalé et indéniablement revigorant du monde esquissé par l’auteur…
Ce dernier imagine avec audace que le sort d’une cité dépend d’un rite ancien qui relie les participants au cosmos… Mais qui, une fois dépouillé de sa symbolique n’est qu’une vulgaire… partie de balle aux prisonniers ! Bien sûr Fortuna, pour qui la Mécanique Céleste est une sorte de religion, n’hésitera pas à changer les règles pour s’assurer la victoire… Rythmée par des matchs joliment chorégraphiés, l’histoire s’avère tout à la fois drôle, rythmée et entraînante, d’autant qu’elle est portée par une galerie de personnages d’autant plus attachants qu’ils s’avèrent tous plein de vie et d’enthousiasme !
Merwan fait partie de ces artistes qui osent et parviennent à se renouveler à chaque nouvelle série. Il semble avoir pris un réel plaisir à mettre en image son histoire et cela se ressent dans chacune de ses planches. Renforcé par des cadrages audacieux et percutants et un sens du mouvement peu commun, son découpage s’avère incroyablement dynamique.

Le style de l’auteur semble être à la confluence du manga et de la BD européenne et son encrage nerveux et dynamique est d’une grande virtuosité.
Merwan confiait lors d’une rencontre que Mécanique Céleste s’inscrivait dans le genre pop post-apo… Et le fait est qu’il fait souffler sur le genre un vent salutairement revigorant…
Si une série de catastrophes a précipité la fin de nos sociétés occidentales, le nouveau monde qui renait sur les ruines de l’ancien n’est en rien sombre, violent ou désespéré. La vie y a repris ses droits et chacun des personnages, Aster en tête, est animé par cette furieuse envie de vivre, intarrisable source d’espoir…
Merwan fait montre d’une grande maîtrise tant graphique que narrative et nous livre un album à la pagination généreuse qu’on ne peut reposer avant de l’avoir achevé…
- Et toi, Juba, toujours pas fichu de respecter les règles.
- Comme l’interdiction de sortir des frontières de Pan ?
- Les interdits majeurs, c’est sacré.
- Les interdits majeurs ?! On n’en connaît même plus l’origine ! Ne me fais pas rire !dialogue entre Juba, frère de Wallis, et son père