Islande, Xème siècle après les Christ Blanc... Après sept années d'exil, Hallstein revient sur les terres qui l'ont vu naître, en compagnie de ses compagnons d'arme, Bjarki Leifsson dit Crâne Chauve et Ukko le finois... Le guerrier est las des combats et aspire à une vie paisible sur la terre de ses ancêtres...
Mais s’il a purgé la peine prononcée par l'Althing, certains ne lui ont toujours pas pardonné le meurtre de Hrafn qui était alors son meilleur ami… A commencer par Einar, frère de ce dernier, qui cherche à épouser la belle Solveig, veuve du père d’Hallstein pour s’accaparer ses terres…
Les acteurs sont en place et, à l’ombre d’Yggdrasil, les Nornes qui président aux destins des habitants du Midgard, attendent leur heure…
Superbement édité avec son dos toilé et proposant une couverture tout juste somptueuse, tant dans sa composition que dans sa réalisation, c’est graphiquement tout d’abord que l’album attire l’œil… Car
l’Exilé est typiquement le genre d’ouvrage qu’on ne peut feuilleter et reposer sur l’étals sans avoir envie de s’y plonger…
Car il se dégage des planches composées par Erik Kriek une puissance et une beauté peu commune et ceux qui ont eu la chance de lire son saisissant
Invisible et autres contes fantastiques (inspiré de l’œuvre de H.P. Lovecraft) ou son dérangeant
Dans les pins, 5 Ballades Meurtrière savent de quoi je parle… L’artiste hollandais n’a pas son pareil pour mettre en scène les paysages tout à la fois sublimes, sauvages et inhospitaliers d’Islande et chacune de ses cases exerce un étrange pouvoir de fascination sur le lecteur. Difficile de ne pas être envoûté par son encrage généreux, à la foi souple et rugueux et ses grandes masses noires qui équilibrent et structurent ses planches… Le choix radical de la bichromie, avec des teintes bleutées qui font planer sur l’album une atmosphère subtilement pesante ou rouges pour les scènes des combats qui viennent hanter Hallstein…
Mais, aussi remarquable soit-il, le formidable travail graphique d’Erik Kriek est loin d’être la seule qualité de cet album au rythme savamment étudié… L’auteur s’appuie sur une solide documentation historique pour tisser un récit crédible et immerger le lecteur dans l’Islande du Xème siècle, poussant le réalisme jusqu’au vocabulaire utilisé, réussissant le tour de force de ne jamais sombrer dans le didactisme. Chaque élément s’inscrit parfaitement dans la trame du récit, formant un tout aussi cohérent que captivant…
Mais si le background s’avère particulièrement soigné, ce sont les personnages tout en nuances qui font la force de l’histoire… Erik Kriek prend le temps d’esquisser le portrait de chacun d’entre eux, l’étoffant par petites touches pour en faire des êtres de chair et de sang tragiquement humains, rendant le récit plus poignant encore. Présentant les principaux personnages du récit comme on le fait pour ceux d’une pièce de théâtre, les page de garde donnent d’emblée l’impression d’assister à une pièce de théâtre où les protagonistes, animés par des passions puissantes et dévastatrices, associés à une sombre histoire de trahisons et de vengeance ne sont pas sans évoquer les pièces de Shakespeare, comme le souligne à juste titre l’éditeur…
S’il n’est connu en France que d’un cercle encore restreint de lecteur, Erik Kriek dévoile au fil de ses albums ses talents de conteur et de dessinateur… Après avoir signé de saisissantes histoires courtes dans L'Invisible et autres contes fantastiques ou Dans les pins, il signe un superbe roman graphique historique qui nous immerge avec force dans l’Islande du Xème siècle.
On y suit le destin tragique d’Hallstein, mercenaire condamné à sept années d’exil par l'Althing, revenu pour mener une vie paisible sur la terre de ses ancêtres… Mais le temps n’a pas apaisé les haines et les rancœurs et nombreux sont ceux qui désirent se venger de ce meurtrier que beaucoup croyaient mort…
Solidement documenté, remarquablement bien écrit et superbement mis en images, ce récit poignant où se déchaînent les passions ravira les amateurs de drames historiques et passionnés de vikings dont la culture exerce une saisissante fascination sur bon nombres de cinéastes et de scénaristes…
Qui plus superbement édité, avec un dos toilé et une couverture de toute beauté, il nous est impossible de ne pas vous en recommander chaudement la lecture de l’Exilé, sombre et envoûtant chef d’œuvre d’Erik Kriek…
- Après tout ce temps, je ferais encore ce chemin les yeux fermés. Nous ne sommes plus très loin de la longère qui m'a vu naître.
- Tant mieux ! J'espère que l'hospitalité islandaise n'est pas un vain mot. Je pourrais m'occuper des chevaux...
- Sinon moi je peux !
- Par l'oeil unique d'Odin ! Le finnois a ouvert la bouche !
- Nous autres finlandais ne parlons que si nous avons quelque chose à dire. Tu le sais, non ?
- Tu n'as pas desserré les dents depuis que nous avons quitté l'Angleterre !
- J'étais persuadé que nous cinglions tout droit vers Jotunheil. Mais cette Islande existe donc ! J'ignorais que des hommes pouvaient vivre aux confins du monde.dialogue entre Hallstein, Crâne Chauve et Ukko