Pour Amy, chaque personne a une saveur particulière : sa mère, vive et lumineuse a celle de la menthe. Doux et d’une agréable chaleur, son père a celle du chocolat…
Amy vit avec ses parents dans une colonie minière de l’espace lointain… Mais, suite à un accident impromptu, son père est licencié et sa petite famille contrainte de regagner la Terre. Amy doit abandonner Jemmah, sa meilleure amie et prendre place dans un cryotube où elle va rester en stase durant les trente prochaines années… La Terre qu’elle avait imaginé n’a que peu de rapport avec ce qu’elle est en réalité : le ciel y est magnifique mais la gravité l’oblige à réapprendre à marcher et, durant son voyage, la technologie a bien progressé…
Durant son premier jour au lycée, elle croise un garçon troublant qui n’a pour elle aucune saveur…
L’américain Stephen McCranie signe pour sa première série un récit tout à la fois touchant, subtil et délicat qui aborde de façon désarmante la difficulté pour une ado de tout quitter pour recommencer une nouvelle vie.
Déménager, c’est abandonner sa maison, ses amis, sa vie… Mais à l’heure où internet permet d’atténuer les distances et de garder, malgré la distance, un lien fort avec ses amis et connaissances, l’auteur place son histoire dans un avenir plus ou moins lointain où les voyages spatiaux seraient une réalité mais prendrait néanmoins quelques dizaines d’années… Ainsi, entre son départ et son arrivée sur terre, 30 années se sont écoulées… Et, durant ce qui ne fut pour elle qu’un battement de paupière, son amie a vieilli de trente ans… Comment renouer le contact avec quelqu’un qui est devenue mère et a fondé une famille ? Que reste-t-il des liens et de la complicité qui les unissaient alors ? Comment se faire de nouveaux amis qui possède une technologie qu’elle ne maîtrise pas encore puisqu’elle s’est développée durant son voyage spatial ?
En quelques pages, Stephen McCranie parvient à rendre Amy particulièrement attachante, décortiquant avec finesse et élégance ses rapports aux autres et les tourments qui sont siens d’avoir coupé les ponts avec sa vie d’avant et de ne pas se sentir à l’aise sur cette Terre qu’elle ne connaît pas… De nombreuses thématiques de l’univers des ados sont abordées avec distanciation rafraîchissante : l’omniprésence des réseaux sociaux, l’appartenance ou l’exclusion d’un groupe, tout en esquissant, par petite touche discrète, une critique du monde du travail et des toutes puissantes mégacorporations… Par le truchement du « don » d’Amy qui leur donne une « saveur », l’auteur parvient en quelques cases à camper de façon saisissante des personnages secondaires, jusqu’à cet énigmatique garçon dont tous semblent se méfier et qui questionne tant la jeune Amy… et le lecteur !
On est littéralement happé par le récit dont la structure intrigue et interpelle… Le prologue nous présente par exemple un personnage qui ne sera pas le personnage principal de ce premier tome mais semble pourtant être la figure centrale de la série… Plus loin, une séquence surprenante nous fait assister à un meurtre sans qu’on sache encore quel lien il entretien avec Amy ou le garçon sans saveur… De quoi aiguiser notre envie de connaître la suite de l’histoire…
Et puis il y a ce dessin souple, sensible et délicat… Tout en rondeur et rehaussé par des couleurs d’une grande douceur, il distille de subtiles notes poétiques, rendant chacun des personnages plus attachants encore…
Publié originellement sous forme de webcomics sur la plateforme Webtoons, Space Boys est un récit confondant de justesse, de délicatesse et de sensibilité…
Sous couvert de récit d’anticipation destiné à la jeunesse, l’impressionnant Stephen McCranie aborde dans ce premier opus le quotidien d’une adolescente déracinée avec tendresse et poésie. On ne sait encore que peu de chose sur ce garçon énigmatique et sans saveur qui semble donner son nom à la série mais l’écriture sensible et le dessin délicat nous donne une furieuse envie de découvrir la suite…
Je rêve alors que le train vole vers un grand ciel bleu et qu’à mes côtés vole un immense oiseau. C’est la plus belle chose que j’ai jamais vu. Chaque plume s’imbrique parfaitement dans l’autre tandis que les ailes s’étendent et se contractent dans le vent.Amy