8 juillet 1982. Demi-finale de la Coupe du Monde de football… France et RFA sont à égalité. Entré à la cinquantième minute et servi en profondeur par un Platini comme toujours très inspiré, Battiston fonce seul, balle au pied, vers le but gardé par Schumacher. Il avait le but de 2-1 (et qui sait de la victoire !) dans les pieds mais le gardien allemand fait une sortie et percute violemment l’attaquant français, le laissant inconscient… Evacué sur une civière, il ne verra pas la fin du match… La suite, on la connaît : pas de pénalty, pas de carton rouge, les français révoltés par la décision arbitrale montent encore d’un cran leur niveau de jeu et finissent par mener 3-1 avant de se faire remonter… Prolongations indécise, tirs au but et défaite de la France…
Didier voue une passion immodérée au football… Et pour lui comme pour des millions de français, ce match est encore un traumatisme… Pour lui, le foot, et la vie se confondent et sa passion viscérale est quelque peu envahissante… Lorsqu’il assiste à un match de son fils, il ne peut s’empêcher de prendre la place du coach et de hurler sur le bord du terrain. Lorsqu’il joue ou qu’il regarde un match, c’est sa vie qu’il joue !
Un jour d’insomnie, il revisionne le fameux match qui a laissé des traces indélébiles dans son âme d’enfant… Et là, à la 57e minutes, il voit un détail que personne n’a jamais perçu, un détail qui, s’il est vérifié, bouleverse toutes les analyses faites sur ce match dont une nation toute entière a longtemps porté les stigmates… Commence alors une passionnante enquête sur ce détail qui aurait pu changer le cours de l’histoire…
Qualifié par beaucoup de match du siècle à cause de la formidable intensité dramatique de la partie, atteignant pour certain celles des tragédies shakespeariennes, la demi-finale France-RFA de 1982 a laissé des traces dans l’imaginaire collectif en général et chez les aficionados de foot en particulier… Avec la retenue qui les caractérisent, les journalistes sportifs ont même parlé d’attentat de Schumacher contre Battiston et voué Charles Corver, l’arbitre de la rencontre, aux gémonies…
Après avoir signé il y a quelques lustres son Petit traité de footballistique avec la passion du foot qui le caractérise, le journaliste, dessinateur, comédien et scénariste Didier Tronchet nous entraîne avec tendresse et lucidité dans les coulisses de cet évènement footbalistiquement historique, à la rencontre des principaux intervenants… Lui-même traumatisé par cette victoire volée et l’injustice arbitrale, il se met en scène en footeux passionné, montrant combien le foot est bien plus qu’un sport, étendant ses ramifications tant dans la société que dans l’économie… Si la base historique et sportive s’avère solide et étayée, l’enquête menée par un tandem de personnages fantasques et attachants s’avère particulièrement drôle et les rencontres avec les acteurs de ce drame, de Schumacher à Hidalgo en passant par Platini et Battiston tout simplement jubilatoires… Celle avec Platini, président déchu de l’U.E.F.A. présenté façon colonel Kurtz dans le chef d’œuvre de Coppola est tout simplement irrésistible… Ou commence la fiction et ou s’arrête la vérité ? Qu’importe ? L’album s’avère passionnant et pas uniquement pour les mordus de foot !
Si le scénario et les dialogues de Didier Tronchet sont aussi percutants, rehaussée par les couleurs subtiles et délicates d’Anne-Claire Jouvray, les dessins de Jérôme Jouvray, n’y sont bien évidemment pas étrangers ! Soignant le jeu d’acteur autant que les découpages, particulièrement fluides, il retranscrit avec tendresse la passion démesurée qui anime l’avatar du scénariste qui peut s’emporter contre son idole comme être encore terrorisé par l’ex-gardien de la Mannschaft des années après les faits…
Alors que le continent va bientôt s’embraser pour l’Euro, reporté d’un an pour cause de COVID, Didier Tronchet et Olivier Jouvray nous entraîne dans les coulisses de la fameuse demi-finale de la Coupe de Monde de 82, considérée par beaucoup comme le match du siècle pour son incroyable intensité dramatique…
Rehaussé par les couleurs douces et délicates d’Anne-Claire Thibaut-Jouvray, le dessin tendre et expressif d’Olivier Jouvray met en scène des personnages attachants lancés dans une enquête à rebours pour élucider les derniers mystères entourant le tournant de ce match, le fameux « attentat » de Schumacher sur Battiston… Porté par une narration fluide, le récit de Didier Tronchet s’avère tout à la fois drôle et captivant, décortiquant avec humour et finesse le foot en tant qu’objet sociologique qui a une influence directe sur l’économie ou le moral d’un pays…
Les fantômes de Séville réussit le tour de force de rendre l’album passionnant tant pour les aficionados de foot que pour les béotiens ou ceux qui, sacrilège !, voient dans le foot un simple divertissement…
- Alors ?
- Une seconde, je réfléchis…
- Quoi ?! On a le scoop du siècle, on sait pourquoi le Titanic a coulé… et l’autre, il réfléchit !?
- Fred, on est les seuls sur le coup ! Un milliard de spectateurs, des milliers de journalistes, personne pour remarquer c détail, qui change tout !
- Pas si simple… Il faut enquêter…
- Mais oui !!!dialogue entre Didier et Fred
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