Peintre de province rêvant d’exposer dans les plus grandes galerie, Dante n’a pas le talent à la hauteur de ses ambitions. Aidé par sa femme, Beatriz qui le soutien dans sa quête d’absolu, il voudrait saisir le beau, s’approcher du divin, mais reste désespérément sur Terre. Beatriz lui semble bien trop sage et l’artiste a besoin de passions, de remous et de violence pour l’inspirer et nourrir sa création…

Son agent organise une rencontre avec Judith de la Beth, compositrice influente à même de lui ouvrir les portes des endroits les plus en vues du monde de l’art… La sulfureuse jeune femme a tôt fait de faire tomber Dante sous ses charmes et de l’ensorceler. Les orgies sexuelles auxquelles il participe lui permettent de s’arracher à sa médiocrité et d’atteindre le sublime…

Mais cela a un prix et le peintre va être entraîné aux portes de l’enfer et de la spirale de la folie…

Révélé au grand public par El Boxeador , album conceptuel fascinant écrit et dessiné avec la complicité de Rubén del Rincon, Manolo Carot revient à ses premières amours avec un récit envoûtant et pornographique qui nous entraîne dans une plongée vertigineuse et dérangeante dans les coulisses de la création.

Si les scènes érotiques qui rythment l’histoire sont clairement explicites, réservant l’album à un public averti, l’album n’en reste pas moins captivant. Reprenant le motif de l’artiste et de sa muse et du lien complexe et tortueux liant l’un à l’autre, Manolo Carot s’inspire de l’Enfer, premier récit de la Divine Comédie de Dante Alighieri. On y retrouve des personnages tirés de cette œuvre fascinante, telle celui de Beatriz, incarnation de Béatrice Portinari, muse du poète latin, présente dans toutes ses œuvres et qui lui elle sert de guide dans son voyage dans les différents Cercles de l’Enfer. Et l’on peut percevoir dans la Judith de Carot la figure féminisée du Méphistophélès, le diabolique tentateur de qui entraîna Faust à signer le pacte qui causera sa perte pour lui ravir son âme…

Dénigré par beaucoup, souvent de façon hypocrite et faussement pudibonde, la pornographie du récit n’en est que l’un des éléments constitutifs. L’histoire s’avère intelligente et solidement charpenté, les scènes de sexe n’étant là que pour souligner l’incompréhension entre le peintre et son épouse ou l’aspect terrifiant et sulfureux, voire démoniaque, de la relation qui asservi Dante à Judith.

Le trait élégant et puissant de Manolo Carot est sublimé par une mise en couleur qui souligne avec art les doutes et les tourments de Dante, artiste maudit qui souffre de n’avoir pas un génie créatif à la hauteur de ses ambitions démesurées et qui va se jeter dans les bras de Judith qui lui promet d’assouvir ses rêves de gloire et d’immortalité… Les scènes pornographiques sont d’une rare crudité, montrant la bestialité du peintre qui semble se libérer pour alimenter son art.

Avec la Chute de Dante, Manolo Carot nous entraîne dans les affres insondables de la création…

Dante, un peintre ambitieux qui rêve de gloire, n’a pas le talent à la mesure de ses rêves. Il accuse sa femme douce et prévenante d’être la cause de son incapacité à créer. Et, lorsqu’on lui présente Judith, une compositrice en vue, celle-ci lui ouvre les portes d’un univers insoupçonné qui va nourrir la créativité de l’artiste au-delà de ses plus folles espérances… Mais il y a un prix à payer pour marquer l’histoire de la peinture de son empreinte…

Grâce à un dessin puissant et élégant et un récit solidement charpenté, Manolo Carot revisite avec force et intelligence l’Enfer de Dante et le pacte faustien. Et, si la pornographie explicite réserve la Chute de Dante à un public averti, l’histoire s’avère particulièrement captivante, questionnant sur le les liens unissant l’artiste, sa muse et son œuvre et sur ce qu’il faut être prêt à sacrifier pour créer…

[- Chéri, je te soutiendrais toujours dans ton travail… Dis-moi ce qui t’arrives. Tu peux me faire confiance.
- Je ne travailles pas… Je crée ! Comment pourrais-je expliquer une chose que tu ne seras jamais capable de voir ?
- Qu’est-ce qui te prends ? Je rentre à peine et écoute comment tu me parles. Arrête de me rabaisser ! J’ai toujours été là pour toi, moi, rien que pour toi.
- C’est faux ! Tu t’es servie de moi !
- J’ai tout abandonné pour être auprès de toi… Pour que tu puisses peindre, et maintenant tu me…
- Menteuse ! Tu es une sale menteuse !
Citation_auteur]dialogue entre Beatriz et Dante