     Maître incontesté de la pègre new-yorkaise, Lucky Luciano est tombé amoureux d’Agata, une jeune immigrée polonaise rêvant de devenir une étoile de la chanson sur Brodway…
Comme les autres chefs de la mafia, il est dans le viseur de l’implacable procureur Thomas Edmund Dewey et il sent l’étai se resserrer autour de lui. Comme Capone est tombé pour fraude fiscale, Luciano pourrait bien tomber pour proxénétisme, son nom ressortant dans plus d’une affaire de mœurs…
Dans ce contexte tendu, Agata devient un potentiel témoin encombrant… Mais Luciano ne peut se résoudre à écouter la voie de la raison et refuse de la faire éliminer… Agata accepte de quitter New York et de ne plus monter sur les planches, sachant que le moindre faux pas pourrait lui être fatal…
Elle rejoint James avec qui elle va vivre une folle passion… Mais, alors que les choses se compliquent à New York, des pontes de la mafia vont décider de l’éliminer…
 Avec deux portraits contrastés, celui de Lucky Luciano, père du crime organisé moderne aux USA, et Agata Lietewski, jeune immigrée rêvant de devenir chanteuse, Olivier Berlion esquisse le portrait d’une époque…
La force de cette trilogie d’Olivier Berlion est d’ancrer sa fiction romanesque dans un cadre historique, politique et sociétal aussi précis que solidement documenté. Ainsi, le récit de l’ascension et de la chute de Luciano est-il parfaitement véridique, jusqu’à l’acharnement du procureur Dewey qui réussit à faire tomber pour proxénétisme l’homme qui tenait le Syndicat du Crime dans sa main… Le soin apporté aux costumes comme au décor nous immerge dans l’Amérique des années 30 avec force détails et les couleurs subtiles de l’artiste distillent cette atmosphère, caractéristique des films de gangsters, que l’on peut retrouver dans Il était une fois l’Amérique de Leone, Cotton Club de Coppola ou les Incorruptibles de De Palma…
 De l’éclairage aux découpages savamment composés, jusqu’au cadrage subtils évoquant des mouvements de caméra fluides et élégants, l’approche graphique d’Olivier Berlion rend un hommage appuyé au septième art dont il emprunte les codes pour immerger le lecteur au cœur même de l’action.
Sensuel et plein d’élégance, son trait met en scène des personnages subtilement esquissés : Agata, jeune femme fragile et lumineuse dont on suit le cours de son destin, chamboulé par sa rencontre avec Lucky Luciano… Tandis qu’elle touchait du doigt son rêve d’enfant, elle allait devoir le quitter alors qu’elle devenait un danger potentiel pour Luciano et les autres chefs de la mafia italienne… Sans doute y a-t-il dans cette femme touchante une dimension cathartique… Comme l’auteur, elle est depuis toujours habitée par le rêve de vivre de son art et, malgré les embûches et les accidents de la vie, elle est, comme lui, guidée par cette inaccessible étoile qui brille, tel un phare dans la nuit… Andy, tueur au cœur tendre amateur de musique à qui Luciano a demandé de veiller et surveiller la belle chanteuse et qui va tisser avec elle des liens de sincère amitié… l’incorruptible procureur Dewey qui va parvenir à faire tomber Luciano… Sans oublier une formidable galerie de grand nom de la pègre de l’époque dont Olivier Berlion brosse un portrait saisissant, Lucky Luciano en tête… Car le tour de force de l’auteur est d’avoir su rendre humain la figure froide et implacable du « Capo di tutti capi » en en faisant un être de chair et de sang… On l’imaginait sans mal froid et calculateur, on le découvre sensible et amoureux… Alors qu’il a tout à perdre à laisser vivre Agata, et comprenant qu’elle ne l’aimera jamais, il la laisse vivre et partir loin de lui… Est-il plus belle preuve d’amour ? En lui permettant de s’incarner, de montrer ses fêlures, il rend le personnage profondément humain, comme si Agata, personnage éminemment solaire, avait su dissiper un pan des ténèbres qui l’entourent…
 A travers le destin de la jeune et belle Agata, jeune immigrée polonaise rêvant de devenir chanteuse, c’est un pan de l’histoire de l’Amérique que nous conte Olivier Berlion…
Mêlant faits avérés et fiction, son récit romantique et romanesque, finement ciselé et à la mécanique impeccable, est mis en image par son trait sensuel et délicat, sublimé par des couleurs somptueuses. Empruntant au cinéma son vocabulaire, il signe des planches de toute beauté dont les cadrages précis et les découpages soignés nous immergent avec force dans l’Amérique des années 30 et nous entraîne dans le sillage d’Agata, femme lumineuse, forte et fragile à la fois…
A la façon des films noirs, la fin précise le destin des figures du grand banditisme que l’on a croisé dans cette trilogie, alors qu’un épilogue vient la conclure de façon poignante, comme un ultime rayon de soleil offert par Agata…
- Pour vous, je ne serai toujours qu’un sale type qui enlève des gosses, n’est-ce pas ? Malgré mes histoires de jambon italien.
- Vous avez fait vos choix…
- Je vous souhaite une belle vie, mademoiselle Agata et désolé encore pour tous les désagréments.
- Merci… Vous savez, cette femme, l’autre soir, avec laquelle vous vous êtes disputé… Ce n’était pas de la colère pour elle, c’était de la tristesse… Enfin je crois.
- Gay est une fille formidable et vous avez raison, je lui ai fait beaucoup de mal.dialogue entre Lucky Luciano et Agata Lietewski
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