Mainte fois disséquée, adapté en roman par le talentueux James Ellroy, sublimement adapté en BD par Miles Hyman, ou en film par Brian De Palma, l’affaire du Dahlia Noir est sans doute l’un des « cold cases » les plus emblématiques de l’histoire criminelle des Etats-Unis, faisant de la victime, Elizabeth Short, une figure iconique, comme semble le suggérer la somptueuse couverture de l’album où elle apparait, telle un sainte, auréolée du soleil de la gloire à laquelle elle aspirait…
Avec ce récit précis et solidement documenté, Run met en lumière les zones d’ombre de ce pays aussi fascinant qu’inquiétant, du rêve américain et de ses cinglantes et sanglantes désillusions, comme il se plaisait à le faire avec ses décapants Doggybags, la dimension fantastique en moins… Superbement édité, avec un dos toilé du plus bel effet, l’album se décline en deux versions, l’une couleur, et l’autre en noir & blanc dont chacune s’avère somptueuse. L’une est l’autre s’avèrent magnifiques…
L’originalité du livre est de s’appuyer sur des documents déclassifiés pour construire le récit et d’entrecouper les planches de textes ciselés qui viennent préciser les évènements, esquisser le portrait des différents protagonistes par le truchement de témoignages d’époque, d’extraits de rapport d’enquête, de notes ou de correspondances épistolaires de la jeune femme. L’album trouve le parfait équilibre entre un aspect résolument documentaire, froid et clinique, des textes plus travaillés et des planches plus charnelles qui permettent aux différents protagonistes de s’incarner pleinement et au lecteur de mieux comprendre le tragique destin du Dahlia Noir. L’album ne se propose d’ailleurs pas de nous raconter la vie rêvée d’Elizabeth Short ou le calvaire qu’elle a enduré pendant cette « semaine manquante » de son emploi du temps. Avec cette histoire, Run et Florent Maudoux esquissent le portrait d’une belle jeune femme fragile, incomprise et mythomane qui s’est perdue en tentant de réaliser son rêve de devenir l’une des étoiles d’Hollywood.
Les auteurs se gardent bien de résoudre l’affaire, mais exposent de façon précise et étayée les derniers mois de sa vie, écartelée entre le rêve hollywodien et la poisseuse réalité qui ne manquait pas de se rappeler à elle. L’album s’achève sur une liste possible des suspects et sur des coupures de presse de l’époque, rendant cette immersion dans cette période tourmentée plus troublante encore…
Si son meurtre l’a fait entrer dans la légende noire d’Hollywood, qui connaît vraiment Elisabeth Short, passée à la postérité sous le nom du Dalhia Noir ?
S’appuyant sur des documents d’époque, des retranscriptions d’interrogatoires, de documents déclassifiés, d’extraits de ses correspondances, de coupures de presse et des témoignages de ceux qui l’ont côtoyé, Run et Florent Maudoux nous racontent les derniers mois de cette jeune femme qui a quitté son Massachusetts natal pour tenter de vivre son rêve hollywoodien…
Le somptueux dessin de Florent Maudoux reconstitue avec minutie le Los Angeles de l’époque et redonne vie à cette femme troublante dont l’artiste parvient à retranscrire avec une confondante et apparente facilité les doutes et les tourments qui furent siens…
Avec son titre délicieusement ambivalent, a Short Story, La véritable histoire du Dahlia Noir ne se propose pas de résoudre ce célèbre Cold Case mais de nous donner à voir la personnalité de cette héroïne tragique au destin et aux rêves brisés…
Regardez, je sais faire comme Veronica sur l’affiche du film. Quand j’étais à Long Beach, ils me prenaient tous pour une star Ils m’appelaient… Le Dahlia Noir...Elisabeth Short