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Les enfants de Surcouf
L'institutrice



Fiche descriptive

Histoire

L'institutrice

Tome 2

Yves Lavandier

Carole Maurel

Carole Maurel

Albin Michel

28 Septembre 2022


16€90

9782226477002

Chronique
Les enfants de Surcouf
Au revoir les enfants

Bretagne, juin 1944.Dans la forêt de Ploménéac, les miliciens bretons, affidés des nazis, continuent à traquer Marie-Noëlle et ses élèves. La solidarité du groupe aura-t-elle raison de la haine de l’autre ?
un excellent album!


Au revoir les enfants
L'Institutrice, planche du tome 2 © Albin Michel / Maurel / LavandierBretagne, juin 1944. Dans la forêt de Ploménéac, les miliciens bretons, affidés des nazis, continuent à traquer Marie-Noëlle et ses élèves. La solidarité du groupe aura-t-elle raison de la haine de l’autre ?

Le premier tome de « L’Institutrice », « Ne fais pas à autrui… » est sorti en mars 2022 ; six mois plus tard, Carole Maurel et Yves Lavandier nous proposent la conclusion de ce diptyque avec la parution des « Enfants de Surcouf » aux éditions Albin Michel.

Je dois avouer qu’en lisant le « pitch » du tome 1, je suis restée sceptique. Quoi encore une œuvre sur l’Occupation ? avec un enfant caché ? Mais c’est un thème archi rebattu ! Cette période constituant même un sous-genre à elle seule dans la BD française. De plus, j’avais énormément apprécié l’album « Collaboration horizontale » que la dessinatrice avait réalisé avec Navie au scénario et je me demandais ce que ce diptyque pourrait nous proposer de neuf tant au niveau du scénario que du dessin …

L'Institutrice, planche du tome 2 © Albin Michel / Maurel / LavandierBon, c’était sans compter sur le fait que le scénariste Yves Lavandier dont c’est la première incursion en bande dessinée était un auteur chevronné : tant sur le plan de la pratique (il a fait ses gammes dans les séries télés et les longs métrages et même réalisé un film avec Gérard Jugnot : « Oui mais ! ») que sur celui de la théorie puisqu’il est l’auteur d’un ouvrage que l’on considère depuis deux décennies comme la Bible des scénaristes : « La Dramaturgie » et d’un autre intitulé « Construire un récit ». Alors évidemment, il a su m’amener là où je ne l’attendais pas !

Hommage au plus beau métier du monde
Déjà, le personnage principal est une héroïne. Vous me direz que le « girl power » c’est un peu dans l’air du temps et qu’en beau portrait de résistante on a « Madeleine résistante » du trio Bertail/Morvan/Riffaud . Certes… Mais la motivation première d’Yves Lavandier n’était pas de glorifier un héroïsme historique conjoncturel mais l’héroïsme quotidien des enseignants, métier qu’il avait redécouvert dans les années 1990 quand ses enfants sont allés à l’école maternelle ! Et il est vrai qu’avec le personnage de Marie-Noëlle Moënner, il crée un beau portrait de femme tout en nuances : touchante lors de la scène d’ouverture du tome 1 quand elle se laisse aller à des rêves de midinette en dansant avec un portemanteau sur fond d’Edith Piaf, irritante avec ses côtés prêchi-prêcha, bouleversante dans ses doutes et ses désarrois …très loin finalement des canons de la « super héroïne « et de la femme forte, surtout dans ce deuxième tome.

L'Institutrice, planche du tome 2 © Albin Michel / Maurel / Lavandier
Les enfants d’abord !
Ensuite comme l’indique les sous-titres des deux tomes, on observe un déplacement de l’intérêt du tome 1 au tome 2 : car dans « Les enfants de Surcouf » non seulement l’héroïne a vraiment de l’épaisseur mais également les enfants qui deviennent pratiquement le sujet du tome final alors qu’on aurait pu s’attendre à ce que seul l’enfant juif, l’enfant caché, soit développé. l. Ils sont tous bien individualisés et caractérisés et la direction d’acteurs de Carole Maurel est assez incroyable dans la justesse des mimiques et des émotions ; leurs visages sont très expressifs et le jeu de regards superbement rendu.

Une œuvre populaire
Ces beaux portraits permettent l’identification et l’empathie tant pour les adultes que pour les enfants et créent une véritable œuvre « populaire » au sens noble du terme, c’est-à-dire pour tous. Elle me semble même supérieure à la série à succès « Les Enfants de la Résistance » car plus délicate à la fois dans le graphisme et la narration. Yves Lavandier et Carole Maurel se refusent au manichéisme (et au prêchi-prêcha !), amenant même certains miliciens à la Rédemption et font finalement passer bien des valeurs universelles et atemporelles d’entraide et de solidarité à travers une aventure très rythmée.

L'Institutrice, planche du tome 2 © Albin Michel / Maurel / LavandierEn effet, le récit est prenant, le découpage varié et souvent très cinématographique. On a même un fondu au noir ! le gaufrier est très souvent éclaté pour crée une variation de rythme et on a même parfois l’impression d’entendre grâce aux onomatopées le bruit des bottes et l’aboiement des chiens. A la fin du 1er tome on restait sur un cliffhanger digne des meilleures séries américaines et dans ce deuxième tome, à cause d’une construction presque théâtrale (unité de lieu, de temps et d’action), on ressent l’angoisse des héros devant l’étau qui se resserre tandis que certaines scènes montées en parallèles (poursuivants/poursuivis) créent beaucoup de suspense.

une réalité historique taboue
Mais «L’Institutrice » quel que soit le dessein de départ, est ancré dans un contexte géographique et historique : la Bretagne (Ploménéac) après le débarquement allié. Et là encore Yves Lavandier fait mouche en évoquant une réalité historique taboue : celle des milices nationalistes bretonnes, dont le bezen Perrot, qui par haine des Français et antisémitisme s’engagèrent volontairement au côté des Nazis et dont certains membres- comme on le voit dans l’album- revêtirent fièrement l’uniforme des Waffen SS.
Le tract présenté page 31 sur lequel apparaît une bigoudène balayant deux juifs caricaturés est ainsi authentique. Alors, ce qui aurait pu sembler une coquetterie - les bulles noires qui signalent des dialogues prononcés en breton - trouve sa pleine légitimité car cela souligne que cette histoire de chasse aux Juifs et aux Résistants est finalement « consanguine » : les méchants sont Bretons comme les victimes. Comme le déclare malicieusement le scénariste c’est « la seule fiction au monde sur l’Occupation dans laquelle il n’y a pas un seul Allemand » ; on ne pourrait donc trouver plus novateur !

L'Institutrice, planche du tome 2 © Albin Michel / Maurel / Lavandier
du manga au rendu d’aquarelles
Quant au dessin, il est aussi renouvelé. Comme dans « Collaboration Horizontale », ou « Nellie Bly », Carole Maurel joue parfois du symbole mais on a cette fois un petit côté manga qui n’apparaissait pas auparavant. En plus des personnages cadrés de très près et de la focalisation sur leurs yeux, on trouve en effet dans « Les Enfants de Surcouf » certaines pages cernées de noir (comme les comics) ; certaines vignettes deviennent triangulaires ou octogonales comme dans la bande dessinée japonaise et les onomatopées font partie intégrante de la composition de l’image. Mais surtout la dessinatrice, à l’aide de sa palette graphique et de ses brushes qui ont parfois un rendu d’aquarelle, délivre des pages plus organiques que dans ses œuvres précédentes. La majeure partie de l’action de ce tome se passe dans la forêt, souvent de nuit et on a donc une grande variété de couleurs et de textures pour recréer décors et ambiances. Les pleines pages sont plus nombreuses aussi ce qui permet de créer une respiration dans la narration et de donner à la bédéaste la possibilité de faire éclater son talent.

On l’aura compris, ce diptyque m’a séduite. Je vous en recommande la lecture. C’est un récit d’aventures mais surtout une aventure humaine. Certains moments sont drôles, d’autres terrifiants ou émouvants. Les personnages sont magistralement caractérisés et on n’observe aucune glorification ou condamnation abusives. Le dessin est varié tout comme les cadrages. On passe du manga à l’aquarelle impressionniste. C’est un livre à lire dès 12 ans mais bien plus profond qu’il n’y paraît !
L'Institutrice, planche du tome 2 © Albin Michel / Maurel / Lavandier
Après le 1er tome sorti en mars, voici la conclusion du diptyque « l’institutrice » que nous proposent Carole Maurel et Yves Lavandier aux éditions Albin Michel. Ce deuxième tome de L’Institutrice parvient à confirmer l’excellente impression que nous avait laissée le premier opus ; Yves Lavandier dans on scénario ciselé et documenté arrive à aborder l’Occupation et la Résistance sous deux angles novateurs : d’abord, il nous apprend l’existence de milices nationalistes bretonnes pro-nazies et antisémites qui prêtaient main forte à l’occupant par haine des Français et ensuite, il fait de son héroïne et de tous les enfants qui l’entourent des personnages complexes, faillibles et émouvants loin des « super-héros » que fait souvent fleurir la mythologie de la Résistance.

Cette histoire prenante est magnifiquement servie par le dessin de Carole Maurel qui propose une direction d’acteurs exceptionnelle. Le trait tout autant que le scénario individualise les personnages et suscite l’empathie. Son utilisation particulière de la tablette graphique crée un rendu d’aquarelles et ses couleurs magnifiques éclatent dans de somptueuses pleines pages. Ce second tome fait gagner l’histoire et profondeur et en humanité. A lire absolument par tous et pour tous !


Quand on manque de force, il est beau de montrer du courage.Marie Noëlle

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