Fils de Charles VII, Louis XI tente de reconstruire le Royaume de France sur les ruines encore fumantes laissées par cette guerre de cent ans encore inachevée. Mais l’ambitieux, Charles de Bourgogne ne l’entend pas de cette oreille et compte bien se dresser contre l’autoritarisme de son cousin en offrant une petite fortune au cupide roi Edouard IV d’Angleterre, son beau-frère, pour qu’il débarque avec ses troupes et qu’ils attaquent de concert les places fortes de Louis XI…

Mais Louis XI n’est pas surnommé l’« Universelle Aragne » pour rien ! Ses espions l’informent du petit enragement entre son cousin et le roi d’Angleterre et compte bien empêcher cette alliance qui fragiliserait son pouvoir… Connaissant la cupidité légendaire d’Edouard, Louis emprunte aux banquiers lombards une coquette somme… Olivier Le Daim, son plus proche conseiller, propose l’idée brillante d’envoyer deux guignols religieuses en possession d’une fausse lettre de change et d’en faire informer le Téméraire pour qu’il se lance à leur poursuite tandis que lui-même porterait la véritable lettre au roi d’Angleterre…

Mais Louis XI, machiavélique avant l’heure, décide de partir lui-même porter cette précieuse missive, sans en informer Le Daim… Un joyeux bordel en perspective, d’autant que les sœurs envoyées comme leurre ne sont autre que Blanche et Arnaud, intégrés bien malgré eux aux Sœurs Contemplatives du Couvent de Sainte-Marie-Madeleine…

C’est peu dire que l’on attendait le retour de ces improbables sœurs, espionnes iconoclastes de Louis XI, alias l’Araignée, qui possède un réseau d’espions et diverses bestioles voyageuse chargées de l’informer des faits et gestes de ses opposants politiques…

S’il s’appuie une fois encore sur une solide documentation historique, le récit est bien évidemment un pur divertissement qui joue avec les personnages historiques et accentue avec délice et sans vergogne leurs travers… C’est ainsi qu’on retrouve un Louis XI plus roublard et calculateur que jamais, manipulant tout son beau monde pour servir ses royaux desseins, un Olivier Le Daim à bonne école et deux héros bien déjantés, efficaces mais quelque peu distraits puisqu’ils ont la fâcheuse tendance à oublier certains points ô combien essentiels de leurs mission. Mais qu’importe, Arnaud n’en reste pas moins un transformiste de génie capable de se déguiser en un clin d’œil en un guéridon convaincant ou en un discret portemanteau tandis que Blanche, un brin naïve et innocente de la vie dont le passé trouble n’en finit pas d’être évoqué, s’avère capable d’étrange fulgurances…

Les péripéties irrésistiblement drolatiques s’enchaînent sur un rythme follement ébouriffant, se teintant parfois d’un zest de fantastique avec l’arrivée inopinée d’un authentique Dragon censément végétarien dans le marais Poitevin, comme la superbe couverture pouvait légitimement le laisser envisager… Mais, outre le dessin sur lequel nous allons prestement revenir, l’un des atouts de cette série est indéniablement les dialogues aussi rythmés et percutants que loufoques et délicieusement excentriques… Ils sont pour beaucoup dans le plaisir que l’on prend à dévorer cet album !

C’est Pour répondre à l’envie de Christian Paty de dessiner des bestioles, Sophie Flamand et Bernard Swysen ont truffé leur récit joyeusement barré d’animaux en tous genre, de l’araignée de compagnie de Louis XI en passant par des colombes, hibou, dragons, mouettes, chat, bourriquot, vache, canassons, sans oublier autruche, ours, singes, caméléon et autre animaux improbables… Le dessinateur peut ainsi s’en donner à cœur joie, tout en peaufinant des décors champêtres ou urbains avec un talent confondant, sa mise en couleur généreuse et lumineuse parachevant son œuvre… Mais c’est dans la direction d‘acteur qu’il excelle, donnant vie à une formidable galerie de personnages bigarrés, historiques ou fictionnels, dont il accentue avec force les expressions et leur confère des postures très théâtrales pour souligner le comique de situation… Voir les gardes jouer à la marelle, les sœurs se lancer dans de virevoltantes et improbables acrobaties ou Edouard et Louis danser une branle endiablée constituent un plaisir en soit…

Après un premier tome déjanté mais parfaitement maîtrisé, Sophie Flamand, Bernard Swysen et Christian Paty remettent en scène nos deux intrépides sœurs espionnes : Blanche, un brin innocente de la vie mais capable de fulgurances, et Arnaud, voleur audacieux et ahurissant transformiste à même de ce déguiser en à peu près n’importe quoi pour se sortir d’une mauvaise passe…

Cette fois encore, c’est le sort du royaume de France qui se joue puisque le cousin de Louis XI, Charles le Téméraire, le puissant et ambitieux Duc de Bourgogne, tente de s’allier à Edouard IV, roi d’Angleterre, pour qu’il débarque en France avec son armée… Ce qui ne manquerait pas de poser quelques problèmes au fils de Charles VII qui tente de reconstruire le Royaume… Ce second tome des Mantes Religieuses nous entraîne donc dans les injustement méconnues prémisses du futur traité de Picquigny qui allait mettre définitivement fin à la Guerre de Cent Ans…

Les dialogues rythmés et savoureusement décalés concoctés par les scénaristes, le scénario déjanté à souhait mais parfaitement maîtrisé qui se teinte d’une pointe de fantastique et le dessin formidablement dynamique font de cette série un divertissement irrésistible et jubilatoire…

Je ne veux pas dégarnir mes frontière, et je ne veux pas faire la guerre, c’est laplus sûr moyen de perdre une bataille.Louis XI