     Paris, 1908. Tandis que la brigade mobile enquête sur le massacre survenu dans la nuit chez la Baronne de Saint-Gil, Louis Denizart Hippolyte Griffont a été recueilli et soigné dans sa propre demeure par la délicieuse mais horripilante Isabel… son épouse…
Cette dernière, fée renégate, espionne et cambrioleuse de haut-vol, avait, par l’intermédiaire de Ruycours, été engagée par le gouvernement français pour dérober une broche et quelques lettres compromettantes qui intéressaient visiblement des agents des services secrets russes… Ces derniers menèrent une attaque en règle contre son manoir, l’attaque inopinée de gargouilles lui ayant permis de s’enfuir…
Les gargouilles semblaient s’intéresser au contenu d’une mystérieuse boîte marquée des armoiries de la famille Lacour-Fondval, lignée à laquelle aurait appartenu Anselme l’ancien, le célèbre mage qui vécut au XIIIe siècle et parvint, avec un petit groupe de mages, à terrasser Tarquin, le Roi des Dragons, après que celui-ci ai occis la Mère des Licornes… Ces même Lacour-Fondval dont Griffont emprunta les chroniques à la Bibliothèque d’Ambremer pour le compte de Cécile de Brescieux…
 C’est peu dire que les romans de Pierre Pevel se déroulant dans son Paris des Merveilles s’avèrent envoûtants, avec cet univers de fantasy urbaine prenant place dans le Paris de la Belle Epoque…
Mais l’univers, aussi foisonnant et imaginatif soit-il, n’est pas le seul charme de la série. Les personnages, principaux s’avèrent truculents à souhait, à commencer par le très attachant tandem formé par la Baronne de Saint-Gil et Louis Denizart Hippolyte Griffont, avec leur relation délicieusement houleuse portés par des dialogues particulièrement savoureux… L’amorce de ce second opus nous offre l’une de ces scènes de ménage irrésistible, la Baronne semblant prendre un malin plaisir à énerver le mage du Cercle Cyan qu’elle sait faire, en experte, démarrer au quart de tour… Mais le bestiaire fantastique et les seconds rôles ne sont pas en reste, à tel Azincourt, le chat ailé de Griffont qui a son petit caractère, le zélé , ce cleptomane de crapulard ou ce crieur des rues qui rappellent étrangement un talentueux et spectaculaire dessinateur de BD…
 S’emparant du premier roman de Pierre Pevel, Étienne Willem en signe une remarquable adaptation, donnant vie par le dessin à cette foule de personnages hétéroclites et à cet univers baigné de magie et de maléfices… Et cette transposition en bande-dessinée est d’autant plus réussie que l’écrivain en signe lui-même les dialogues, adaptant son style flamboyant à ce nouveau medium… On retrouve dans ce nouvel opus cette dimension si délicieusement feuilletonnesque qui caractérise ses romans se déroulant dans l’univers du Paris des Merveilles et leur confère ce charme singulier, avec ces policiers des Brigades du Tigre qui reprennent les noms et les apparences de ceux de la fameuse série de créée par Claude Desailly… Difficile de ne pas être impressionné par la formidable capacité du romancier de nous faire entrer dans cet univers baroque si délicieusement uchronique que l’on se plait à découvrir et à arpenter aux côtés de ses personnages…
Le trait élégant et dynamique du dessinateur fait comme de coutume merveille… Comment ne pas être fasciné par sa façon de donner vie à ce fabuleux Paris fantasy emplis de créatures et de personnages hauts en couleur… Son découpage incisif est d’une rare efficacité et ses cadrages virtuoses dynamisent avec art les scènes d’action tandis que les couleurs délicates de Tanja Wenisch posent les différentes ambiances de l’histoire, baignant notamment Ambremer d’une magie féérique… On ne peut qu’espérer que L'Élixir d'oubli, second opus du cycle d’Ambremer, fera sous peu l’objet d’une adaptation…
Après les Artilleuses, histoire originale se déroulant dans l’univers uchronique du Paris des Merveille, c’était donc à l’adaptation du premier roman du cycle d’Ambremer que se sont attelé Pierre Pevel et Etienne Willem… Et après un premier tome particulièrement réussi, ce second opus était très attendu de par chez nous…
On retrouve donc l’irrésistible tandem formé par Baronne de Saint-Gil, fée renégate, espionne et cambrioleuse, et Louis Denizart Hippolyte Griffont, mage du Cercle Cyan pour qui la droiture est une vertu cardinale, tentant de démêler l’écheveau d’une histoire complexe et alambiquée qui prend racine au cœur même du moyen-âge, à l’époque où les fées et les dragons se livraient une guerre acharnée dans l’Outremonde…
Mené tambour battant dans la plus pure tradition du roman feuilleton, ce second tome s’avère des plus réussi, grâce à la formidable adaptation d’Etienne Willem, à ses dessins élégants et formidablement dynamiques et à sons sens du cadrage confondant, tandis que le romancier s’est attaché à réécrire les dialogues avec le style fluide et flamboyant qui est le sien… Espérons qu’il ne faille pas attendre trop longtemps pour lire l’adaptation de l’L'Élixir d'oubli, second opus du cycle d’Ambremer !
Proposé dans un très élégant fourreau, ce premier diptyque mérite clairement de se trouver au pied du sapin !
- Etienne ! Depuis quand laissez-vous n’importe qui s’installer chez moi ?
- Quand je suis rentré hier soir, j’ai trouvé le Docteur Lherbier au chevet de monsieur, avec Madame, et, comme Madame m’a dit qu’elle était Madame…
- Vous savez charmé mon majordome ?
- Qu’allez-vous chercher là ? Venez plutôt prendre votre petit déjeuner.
- Merci ! Je le prendrais seul à… la cuisine. Ma parole c’est une invasion !
- La cuisine est par là, il me semble…
- Finalement je déjeunerai au salon ! Mais ! Qu’est-il arrivé à mon salon ?
- Il fallait refaire la décoration à cause des dégâts causés par les gargouilles. Un service qu’elles vous ont rendu, si vous voulez mon avis.dialogue entre Etienne, Griffont t la Baronne de Saint-Gil
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