1986. La DST poursuit son enquête sur la vague d’attentat qui a ensanglanté la capitale. Les services de renseignements français semblent pouvoir compter sur un informateur fiable, Anis Bouhageb, dont les révélations s’avèrent jusque-là fondés. Grâce à lui, les agents resserrent leur étau autour du principal suspect, Fahd Rafia…
Au fil de l’enquête, l’inspecteur Crémeux acquiert la ferme conviction que, contrairement à ce qu’avait cru ses services, le Liban et la Tunisie ne sont pour rien dans les attentats. De fait, de nombreux éléments font pencher la balance vers Théran… Mais il manque encore de preuve pour convaincre ses supérieurs du bien-fondé de son intuition…
En haut lieu, les autorités font pression pour que l’enquête soit bouclée au plus tôt et épargne l’Iran avec qui sont engagé des pourparlers secrets…
Le talentueux Philippe Richelle referme une à une ses trois séries abordant chacune une affaire retentissante qui a ébranlé la République, de
Guerre Froide à
Extrême Droite en passant par cet édifiant
Jihad…
Si le récit qui nous est présenté est une fiction, il ne s’inspire pas moins d’une affaire bien réelle connue sous le nom d’affaire Luchaire, du nom de la société d’armement qui a contourné l’embargo portant les livraisons d’armes à destination de l’Iran, alors que ce pays était en guerre contre l’Irak… Mais Luchaire n’aurait pu contourner l’embargo, décidé par les Etats-Unis et neuf pays européen, dont la France, sans le concours bienveillant du Ministre de la Défense de l’époque, des rétro-commissions ayant sans doute alimenté les caisses du parti socialiste… Bien que l’affaire, instruite par le juge d’instruction Michel Legrand ait abouti sur un non-lieu, les instances militaires refusant de transmettre à la justice les documents demandés…
La force de ce récit est de nous donner à vivre les secousses qu’a pu avoir cette affaire sur une poignée d’agents de la DST enquêtant sur une série d’attentat destinés à faire pression sur le gouvernement français pour faire aboutir ces tractations secrètes et illégales…
Le scénario de Philippe Richelle fait comme il se doit la belle part aux personnages, déroulant une enquête au cordeau tout en prenant le temps de développer ce qu’il faut d’intrigues plus intimistes. Ce faisant, le scénariste compose de saisissants portraits des enquêteurs qui doivent mener à bien leur travail et démêler l’écheveau entre faux semblant, manipulations et malversations étatiques, tout en traversant des zones de turbulences familiales et affectives… Et ce volet d’Affaire d’Etat s’avère en cela très réussi dans le subtil et fragile équilibre trouvé entre ces deux composantes, sans compter que la narration très équilibré du scénariste lui permet de développer un autre arc narratif en abordant la captivité d’un agent de la DST au Liban…
Mis en couleurs par Andrea Meloni, assisté par le studio Arancia, les planches du dessinateur italien Alfio Buscaglia s’avère particulièrement fluides et dynamique, soignant cadrages et décors et donnant à ressentir les états d’âme des différents enquêteurs… mention spéciale pour l’inspecteur Crémeux qui s’avère tout particulièrement attachant…
Savamment orchestré et parfaitement maîtrisé, le récit choral de Philippe Richelle se veut être une fiction librement inspirée de la retentissante Affaire Luchaire qui vit le marchand d’arme éponyme contourner l’embargo sur les ventes d’armes à destination de l’Iran, avec le concours du Ministère de la Défense, sur fond de financement illégal des partis politiques.
Développant plusieurs arcs narratifs de manière étonnement fluide, cette Affaire d’Etat – Jihad s’avère d’autant plus captivante que le scénariste prend le temps de développer la vie familiale de chacun des enquêteurs, leur donnant suffisamment de consistance pour que l’on s’attache à eux… Le dessin dynamique de l’artiste italien Alfio Buscaglia nous immerge quant à lui au cœur des années 80 tout en permettant aux personnages de s’incarner pleinement…
Amateurs d’Histoire et de polars immersifs et bien ficelés, ne passez pas à côté de cette série aussi édifiante qu’entraînante…
- Toutes les infos fournies jusqu’à présent par Anis Bouhageb se sont révélées pertinentes. Et, plus nous avançons, plus l’ombre de l’Iran se dessine derrière les attentats des derniers mois…
- Vraiment ?
- Il y a d’abord les liens confessionnels entre le Hezbollah et l’Iran. Ensuite, l’homme chez qui nous avons trouvé la photo de Fahd Lors d l’Opération Taupinière est un libanais connu pour ses liens avec Téhéran.
- Il faut des preuve Crémieux. Pas des suppositions… Vous commencez à m’emmerder avec cette histoire ! Qui vous a dit que ce n’est pas une manipulation pour nous discréditer ? Moi, pour l’instant, je ne vois que des tunisiens et des libanais… Rien qui concerne l’Iran, absolument rien ! Jusqu’à preuve du contraire, les attentats, ce sont les FARL des frères Amane ! Alors écoutez moi bien ! Ou vous m’apportez du concret et on débloque l fric pour votre informateur, ou je siffle la fin de la récréation.dialogue entre Crémieux et son supérieur