Alors que sa femme est dans le coma, et que son fils, Clarence, désirerait la revoir, un homme s’énerve contre le pyracanthe qui pousse dans le jardin de ses voisins et ne cesse de croître, dégoulinant dans son terrain… Armé d’un taille-haie, il taille rageusement la plante et aperçoit sa voisine qui va se réfugier chez elle, un bébé dans les bras… Plus tard, il comprendra que ce petit être est l’une de ces créature hybrides qui naissent de par le monde…

Car, depuis quelques temps, des bébés viennent au monde avec une feuille sous le nez. La végétation envahit peu à peu la ville, contaminant hommes et femmes qui voient pousser sur leur corps d’étranges excroissances végétales.

Certains s’en accommode et redécouvre la beauté d’une nature martyrisée par l’homme et qui semble reprendre ses droits. D’autres, au contraire, voient cela comme une invasion et prennent les armes contre cet envahisseur végétal qui bouleverse leur quotidien…

La couverture de Verts et indéniablement l’une des plus somptueuse de ces derniers mois. Tout y est magnifique, de l’illustration à la maquette en passant par les couleurs et les entrelacs végétaux embossés rehaussés d’or… Elle exerce sur le chaland une indéniable attirance tant et si bien qu’on ne peut passer à côté de l’album sans avoir envie de le feuilleter et de s’y plonger… d’autant que les planches de l’album, en noir et blanc, sont-elles aussi de toutes beauté… Quant au récit, il est étrange et surprenant mais indéniablement sublime et poétique…

Patrick Lacan et Marion Besançon nous entraînent avec finesse dans un récit envoûtant qui nous fait perdre nos repères… Leur récit se pare des atours d’un conte étrange et pénétrant pour distiller un message écologie chargé de symbolique et mettant en scène un nature qui, voyant l’humanité courir vers sa perte, en exploitant, polluant et en détruisant son environnement, décide de lui tendre la main, pour l’inciter à ouvrir les yeux sur la beauté et la fragilité d’un monde avec qui elle pourrait vivre en symbiose si l’humanité n’était pas aveuglée par des besoins matérialistes et la quête du profit… Notre seule chance d’assurer la survie de l’homme sur cette terre nous est ainsi donnée par cette nature que nous nous appliquons à détruire, méthodiquement…

Le récit choral nous fait suivre une poigné d’individus qui vont accepter ou refuser les changements qui s’opèrent… Les auteurs ont choisi d’opter pour un récit positif et bienveillant plutôt que de nous faire culpabiliser en dépeignant un monde sombre et apocalyptique où l’homme s’applique à œuvrer à sa propre perte… Les compositions en noir et blanc de Marion Besançon sont de toutes beauté, rendant hommage à cette nature foisonnante que beaucoup ne regardent plus… La finesse de son trait, la richesse de ses décors contribuent à rendre la lecture de cette histoire singulière et entraînante… Et, d’un coup, la couleur s’invite, venant sublimer son travail de façon saisissante et refermant le livre de la plus belle des façons…

Superbement édité et dotée d’une couverture fascinante qui donne d’emblée envie de se plonger dans ce conte écologique et poétique envoûtant qui voit la nature, pourtant martyrisée par l’homme, tendre la main à l’humanité pour l’inviter de vivre en symbiose avec elle…

Depuis quelques temps, une étrange pandémie se répand à la surface du globe : les nouveaux nés viennent au monde avec une feuille sous le nez tandis que des excroissances végétales se développent peu à peu sur le corps des adultes… Pour certains, c’est un élément déclencheur pour porter sur le monde un regard plus contemplatif et se rapprocher de la nature, source de vie et de beauté. Pour d’autres, c’est une source d’angoisse qui attise leur haine de la différence et le rejet de ces créatures hybrides inquiétantes…

Ce récit choral écrit à quatre mains par Marion Besançon et Patrick Lacan s’avère fascinant et l’on ne peut qu’être impressionné par les somptueuses compositions de la dessinatrice qui signe avec Verts son tout premier album. Il y a dans cette histoire un peu de la magie des films de Hayao Miyazaki, avec cette nature indomptable et ce fantastique qui s’invite dans le quotidien pour bousculer les cœurs et les consciences… Alors que la planète se réchauffe et que le climat se dérègle de façon peut être irréversible, que les politiques semblent peu s’en soucier, on ne peut qu’espérer que les jeunes générations réussiront là où nous avons lamentablement échoué… Demain commence aujourd’hui… Espérons que le message résolument optimiste distillé par ce roman graphique soit à même d’éveiller les consciences…