La guerre est finie depuis dix ans déjà mais la paix n’a pas mis un terme à la rivalité des Martineau et des Durand… Malgré les liens qui s’étaient tissés entre Marcelin et Marie durant les années sombres, se sont délités et les amants d’hier n’ont pas convolé en justes noces. Leur vie a repris son cours…

Les affaires de chacun semblent prospérer. Etienne Durand développe son commerce et acquiert une usine flambant neuve qui va lui permettre de moderniser sa production et d’alimenter les épiceries environnantes alors que les Martineau poursuivent leur politique d’expansion… Mais, d’origine criminelle, l’incendie qui ravage l’usine des Durand ravive les braises de leur rivalité. Pour Etienne, il ne fait pas l’ombre d’un doute que les Martineau sont à l’origine du sinistre…

Mais le passé n’est jamais complètement mort et s’apprête à refaire surface…

Le passage des années permet au scénariste chevronné qu’est Jean-Charles Gaudin une savoureuse ellipse narrative qui va emmener les deux familles rivales à l’aube du bouleversement industriel qui allait ébranler l’artisanat traditionnel de la boulange…

Alors qu’on s’attendait à un mariage qui aurait apaisé les liens entre Durand et Martinau, il n’en fut rien, Marie ayant compris que son amoureux d’alors était un trousseur de jupon… Contre toute attente, Henti Martinau est revenu de guerre, reprenant en main sa boulangerie… Ce rabattage des cartes permet d’explorer un contexte différent de celui de l’occupation, de modifier subtilement les rapports de force et les liens qui unissent les différents protagonistes de cette saga familiale qui ne cessent d’évoluer, confronté à un monde en plein bouleversement. Mais, alors que chacune des deux familles explorent des stratégies commerciales très différentes, du rachat d’entreprises en difficultés en passant par l’industrialisation, les rivalités se ravivent alors que les amours n’ont pas toujours résisté à l’épreuve du temps… Si la gent masculine tient toujours les manettes des affaires, on appréciera ces portraits de femmes qui s’affirment d’avantage et s’affranchissent peu à peu de la tutelle patriarcale.

Révélé par son fascinant son travail sur le fascinant Trop de Bonheur de Jean-David Morvan, Steven Lejeune fait une nouvelle fois montre de ses talents de dessinateur réaliste pour, après nous avoir immergé dans une petite bourgade durant l’occupation esquisse une France des années 50 particulièrement convaincante, les couleurs du talentueux Roberto Burgazzoli accentuant le charme… Le dessinateur parvient à donner vie aux différents membres des deux familles rivales, soignant leurs attitudes qui retranscrivent le caractère dont les a paré le scénariste.

Avec Monique, Jean-Charles Gaudin et Steven Lejeune referme leur saga familiale qui, des années noires de l’occupation à la France des Trente glorieuses nous raconte la rivalité entre deux familles de boulangers…

Dix années ont passé depuis la fin de la guerre… Les choses ont bien changé à Saint-Jean… S’ils se sont aimés passionnément, Marie et Marcelin n’ont pas convolé en justes noces. Contre toute attente, Henri est revenu de la guerre. Les Martinau poursuivent leurs expansions en rachetant des boulangeries en difficulté tandis que les Durand industrialisent leur production… Mais l’incendie d’origine criminelle de leur usine allait raviver leur rivalité…

Le dessin réaliste de Steven Lejeune et les couleurs de Roberto Burgazzoli restituent l’atmosphère de la France rurale des années 50 en donnant vie à ces personnages contrastés et attachants qui ont subtilement évolué au cours de ces dix dernières années. Sur fond de rivalité commerciale, cette fresque historique et boulangère aux accents féministes s’achève de façon délicieusement inattendue tandis qu’un passé qu’on croyait révolu ressurgit i inopinément dans le quotidien des Marcelin et des Martinau…