Fiche descriptive Aventure L'Ombre des Lumières Tome 2 Alain Ayroles Richard Guérineau Richard Guérineau Delcourt 2 octobre 2024 23€75
9782413078555 Chronique Dentelles et Wampum Le vice et la vertu |
Le vice et la vertu Le chevalier de Saint-Sauveur a élevé le vice au rang d’art et l’histoire l’aurait peut-être oublié si ses correspondances n’avaient été trouvé dans les tiroirs secrets de son secrétaire à cylindre. Ces lettres sulfureuses esquissent le portrait d’un homme cynique et malfaisant qui a connu fortune et revers de fortune… Après avoir par jeu séduit Eunice de Clairefont et ternie l’honneur de cette jeune femme acquise aux idées des lumières, désormais ruiné et poursuivit tant par le mari trompé que par les créanciers, le chevalier de Saint-Sauveur n’a d’autre choix que d’accepter le maché du Comte de Mirepoix, ce dernier voyant d’un mauvais œil la nomination du Marquis d’Archambaud au poste de Commissaire Ordonnateur et Maître des Requêtes en lieu et place de son propre fils… S’étant vanté de pouvoir « jeter n’importe qui dans les bras de n’importe qui », Saint-Sauveur est chargé de manœuvrer pour que la chaste et pure Aimée d’Archambaud épouse le valet iroquois du Chevalier, en échange de quoi le Comte effacera l’ensemble de ses créances… C’est ainsi que le chevalier fait voil vers le Nouveau Monde en compagnie de son sauvage pour y accompagner le Marquis d’Archambaud et sa petite famille… un délicieux et fascinant récit d’aventure épistolaire Alain Ayroles fait partie de ces scénariste dont nous admirons et apprécie le travail depuis son premier album et dont chacune de ses albums ou séries est une petite merveille d’écriture, de Garulfo à de Cape et de Crocs en passant par D ou les si parfaites Indes Fourbes… Et de voir ce scénariste érudit à même d’épouser un style s’associer au talentueux Richard Guérineau qui a signé une formidable adaptation du Charlie 9 du regretté Jean Teulé avant de signer, seul, le fascinant Henriquet, l'homme reine ne pouvait que nous enthousiasmer follement…Alors que le premier opus de l’Ombre des Lumières rendait hommage au chef d’œuvre de Pierre Choderlos de Laclos en mettant en scène un jeune libertin aussi pervers que manipulateur pervers et décortiquant avec finesse les usages de la cour, ce second opus lui gagner semble pencher du côté du Dernier des Mohicans de James Fenimore Cooper en entraînant son antipathique héros dans un Nouveau Monde, portant sur lui amoral des regards croisés qui complètent son portrait de façon saisissante tout en dépeignant l’arrivée d’un noble rompu aux usages de la cour dans un monde âpre et sauvage dont il ne possède pas les clefs… Le titre, Dentelles et Wampum, est le parfait reflet de cette rencontre de deux mondes que tout semble devoir opposer… Mais l’on se rend bien vite compte que s’ils n’ont pas leur instruction ou leur éducation, les valets peuvent être plus vertueux que leur maître et les « sauvages » plus nobles que des gens de hautes extractions… Signé par Alain Ayroles, les dialogues sont une petite merveille d’écriture, de même que les récitatifs sensément extrait de lettres rédigées par l’un ou l’autre protagoniste et qui possèdent chacun leurs caractéristiques et leur coloration propres. Ce roman d’aventure épistolaire s’avère particulièrement fascinant car les missives rythment un récit solidement charpenté sans jamais en perdre le fil mais donnant sur chaque personnage, auteur ou sujet de la lettre, un éclairage nouveau… Tout cela contribue à conférer à chacun d’eux cette épaisseur qui fait qu’il n’est plus un simple être de papier mais un être délicieusement tortueux en proie à des combats intérieurs qui font toute leur richesse… Cette écriture d’orfèvre conjugué à une mécanique narrative faisant plus que frôler la perfection font de cette trilogie une petite merveille du neuvième art… D’autant qu’à travers un sujet très ancré dans l’histoire grâce au saisissant travail réalisé en amont par Alain Ayroles, le scénariste aborde des thématiques bien contemporaines telles les inégalités qui déchirent la société de façon de plus prégnante ou ce retour du religieux et de l’obscurantisme malgré l’éclairage des lumières… un dessin somptueux et virtuose Si l’album s’avère somptueusement édité, de la maquette de couverture rehaussé d’or aux plats en passant par les pages de garde, sans oublier la magnifique illustration, entre ombres et lumières, parfaitement raccord avec le titre de la trilogie et le propos, le formidable travail de Richard Guérineau n’est pas le moindre des atouts de l’album… Le découpage de l’album est une petite merveille qui guide l’œil du lecteur et lui offre de somptueux visuels qui retranscrivent avec une apparente facilité les ambiances des scènes très hétéroclites qui émaillent le récit, de ces terres sauvages aux salons cossus, de ces fastueuses réceptions à la promiscuité d’un navire traversant l’océan… Le soin apporté à la reconstitution du Siècle des Lumières force l’admiration… Costumes, bâtiments, attitudes, objets du quotidien… rien ne semble avoir été laissé au hasard, ce qui ne fait que renforcer l’immersion dans cette époque pré-révolutionnaire… Et, cerise sur le gâteau, le dessinateur anime ses personnages avec virtuosité, nous faisant ressentir dans leurs gestuelles ou leurs expressions les sentiments qui les animent, rendant cette comédie grinçante plus fascinante encore et la cruauté et la perversion de Saint-Sauveur plus révoltante…Après ses envoutantes et jubilatoires Indes Fourbes, dessiné par l’impressionnant Juanjo Guarnido, Alain Ayroles nous entraîne dans le Siècle des Lumière à la suite d’un jeune noble libertin cruel et amoral… Si le premier opus rendait hommage à Pierre Choderlos de Laclos et à ses Liaisons Dangereuses, ce second tome fait de même avec le Dernier des Mohicans de James Fenimore Cooper en entraînant le chevalier de Saint-Sauveur dans le Nouveau Monde inconnu et sauvage… Criblé de dettes et poursuivit par le mari de la Eunice de Clairefont dont il a sali l’honneur, Saint-Sauveur ne peut qu’accepter la proposition de Comte de Mirepoix qui compte faire payer au Marquis d’Archambaud d’avoir reçu du roi qu’il escomptait revenir à son fils… Sa mission : faire en sorte que la chaste et vertueuse Aimée d’Archambaud, fille chérie du Marquis, épouse le sauvage qui sert de serviteur au Chevalier… Pour se faire il doit embarquer à bord du navire qui conduit d’Archambaud et sa sainte famille au Nouveau Monde… Porté par l’écriture ciselé d’Alain Ayroles et un solide travail de documentation qui se ressent dans chaque séquence, L’Ombre des Lumières est conçu comme un fascinant roman d’aventure épistolaire, chaque lettre venant éclairer une facette de ce sinistre héros ou d’un des protagonistes de ce récit tragique truffé de traits d’humour délicieusement mordants… Tout aussi savoureux que le premier, ce second opus est mis en scène de main de maître par un Richard Guérineau particulièrement inspiré qui donne vie à un Siècle des Lumières particulièrement crédible et cohérent et y fait évoluer des personnages aux attitudes et aux manières si finement travaillées qu’elles reflètent avec art leurs états d’âmes, leur pureté ou leurs perversions… C’est peut dire qu’il nous tarde de lire le Démon des Grands Lacs, ultime tome de la série, qui continuera n’en doutons pas de pointer les inégalités grandissantes, l’emprise de la religion et le retour de l’obscurantisme qui gangrénait les Lumières… tout comme ils gangrènent notre époque… - Ne te gausse pas ! Ce livre que j’écris peut aider à changer les choses !
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