Août 1942. Le gouvernement de Vichy prépare une rafle analogue à celle du Vel' d'Hiv' pour livrer à l’occupant les juifs étrangers qui seront parqués au camp de Vénissieux avant de rejoindre celui de Drancy. Parmi eux devraient figurer des centaines d’enfants…

Lorsqu’il est mis au courant de ce drame à venir, et connaissant le sort funeste qui leur sera réservé, l’abbé Glasberg va mettre tout en œuvre pour en sauver le plus possible. Le fondateur de l’Amitié Chrétienne, dont le but était de soustraire les juifs aux autorités nazies, va étudier les textes de lois pour pouvoir négocier pied à pied leur libération.

S’amorce alors un véritable combat administratif où résistants et membres de l’œuvre chrétienne vont travailler de concert, subtilisant les courriers venant modifier un règlement, falsifiant certains documents, exfiltrant certains juifs grâce à de faux diagnostiques médicaux… Mais lorsqu’il apprend que les autorités exigent du chiffre, il doit se résoudre à demander aux parents d’abandonner leur autorité parentale, un texte stipulant qu’ils ne peuvent alors pas être déportés.

Dans les pires heures de l’occupation, un groupe de résistants va se former pour tenter d’arracher les enfants d’une mort certaines après que le gouvernement français ait projeté de livrer les juifs aux autorités nazies…

Adapté du livre de Valérie Portheret (XO Edition), dont le titre reprenait celui d’un tract signé par les mouvements de la résistance de Lyon, ce roman graphique passionnant et savamment orchestré nous entraîne dans les coulisses de ce sauvetage audacieux et du choix cruel mais salutaire de demander à des parents en partance pour la mort d’abandonner leurs enfants pour leur sauver la vie… Grâce cet ultime acte d’amour, près de cent huit enfants furent sauvés des griffes de l’occupant… Il est étrange que cet acte de résistance et d’humanité reste à ce jour si peu connu tant par son audace que par son succès…

Le découpage singulier de l’album en accentue la dramaturgie, avec ces digressions poétiques qui nous entraînent dans un passé insouciant, ces interrogatoires de collaborateurs notoires, de Pierre Laval, chef du Gouvernement de Vichy à Alexandre Angeli, Préfet du Rhône et de la région du Lyon, en passant par Claude Cornier, alors chef de la division de service de Police des Etrangers de la région. Certains de leurs propos vous prennent aux tripes, tels ceux de Laval qui assure avoir proposé de livrer les enfants aux autorités allemandes par soucis d’humanité, pour ne pas séparer les familles ou ces autres se réfugiant derrière leur rôle de simple exécutant des directives du gouvernement… Ces parenthèses mettent en lumière les responsabilités de l’état français alors que le récit met en valeur la pugnacité de l’abbé Glasberg qui va s’appuyer sur les textes administratifs existants pour faire libérer les enfants, quitte à falsifier certains documents ou en empêchant les autorités du camp d’avoir connaissances des nouvelles directives… La séquence relatant la nuit du 28 au 29 août 2025 s’avère des plus bouleversante et hantera durablement le lecteur emmené à s’interroger sur ce qu’il aurait fait s’il avait été à la place de ces parents en cette nuit funeste.

Après Topless ou le Chanteur sans nom et J'aurai ta peau, Dominique A, Olivier Balez retrouve son complice Arnaud Le Gouëfflec pour signer cette saisissante adaptation du livre de Valérie Portheret. Son style envoûtant et reconnaissable entre mille retranscrit la tension et suggère l’émotion avec délicatesse et subtilité, faisant de chacun des personnages de l’album un être de chair et de sang, rendant la lecture plus bouleversante encore et revigorante car elle met en lumière la plus belle part de notre humanité... nous donnant des raisons d’espérer, malgré un contexte géopolitique des plus inquiétants.

Arnaud Le Gouëfflec retrouve Olivier Balez, le complice avec qui il déjà signé Topless, le Chanteur sans nom ou J'aurai ta peau, Dominique A pour signer une bouleversante adaptation du Vous n’aurez pas les enfants de Valérie Portheret.

Août 1942. Le gouvernement de Vichy prépare une rafle analogue à celle du Vel' d'Hiv' pour livrer à l’occupant les juifs étrangers de la zone libre. Sous l’impulsion de l’abbé Glasberg, un formidable organisation va se créer pour sauver le plus d’enfants possibles d’une mort certaine au sein même du camp de Vénissieux. S’appuyant sur un circulaire des autorités de Vichy, ils vont lutter pied à pied, exploitant les failles administratives, falsifiant des documents, retenant les divulgations de certains autres, sauvant ainsi plus d’une centaine d’enfants d’un mort certaine.

Porté par le dessin stylisé d’Olivier Balez qui retranscrit avec art la force des émotions des différents personnages, le scénario d’Arnaud Le Gouëfflec s’avère des plus poignants, rythmé par les interrogatoires de ceux qui ont organisé méthodiquement cette rafle qui tentent de justifier l’injustifiable… Se refermant sur un dossier très bien conçu, cet album poignant met en lumière cet acte étrangement méconnu de résistance et d’humanité… Alors que nous apprêtons à traverser des zones sombres de notre histoire, cet album et de ceux qui entretiennent la petite flamme de l’espoir.

- Quand l’avez-vous appris ?
- Tout à l’heure, au détour d’un couloir. L’opération doit rester secrète. Après le Vél’ d’Hiv, Vicky va maintenant livrer les juifs étrangers de la zone libre. C’est le préfet Angeli qui est chargé d’organiser la rafle de la région de Lyon dans les dix départements dont il a la charge. Je demande solennellement l’aide de l’Amitié Chrétienne.
- Vous l’aurez. Les Enfants sont-ils concernés ?
- J’en ai peur. Mais il est question d’un télégramme officiel, qui doit préciser une liste d’exemptions. Je vais me le procurer et vous ferai parvenir cette liste dès que possible. Dès demain, sans doute. Dans cet odieux travail de triage, Vichy autorise de se faire « épauler » par une œuvre. C’est notre chance. L’Amitié Chrétienne sera notre couverture. Formez une équipe. Vous saurez vous entourer, vous avez l’œil affûté.
- Et de fidèles lunettes, mon ami.- dialogue entre Monsieur Lessage et L’Abbé Alxandre Glasberg