Ainsi va la vie est un roman graphique à rapprocher de Petites Eclipses de Fane et Jim, ou de Quelques jours avec un menteur d'Étienne Davodeau. On y retrouve cette authenticité, cette impression étrange de connaître ces personnages, de les avoir côtoyés, d'avoir partagé une bribe de passé avec eux.

L'album nous parle d'une poignée d'individus issus de la génération Goldorak amis depuis la fac, de leurs fous rires, leurs galères, de leurs amours, de leurs boulots... L'histoire se dévoile peu à peu, au fil des quelques 130 pages qui constituent l'album. Entre présent et passé, l'intrigue se noue autour de personnages à la fois crédibles et attachants.

L'histoire s'ouvre avec François, l'un des 6 membres du groupe, le plus équilibré sans doute... La trentaine bien tassée, calvitie naissante, il a rendez-vous avec ses vieux potes de lycée... quelques pas et déjà les souvenirs affluent, ressurgissent... Au fil des quatre chapitres qui composent le livre, on va suivre la vie de Steph, Djed, François, Sophie et Natacha, avec ses joies, ses peines, ses hauts et ses bas, tous ces petits rien qui mis bout à bout font la vie, et ce drame qui se noue en coulisse et qu'on sent poindre au fil des pages... Cinq chapitre (« Des amis formidables », « Une entente parfaite », « Regrets » et « Croquer la vie ») remarquablement bien écrits et mis en scène, truffé de clins d'oeil que les moins de trente ans ne peuvent pas comprendre...

Le trait Frédéric Charve, qui signe avec Ainsi va la vie son premier album, est des plus efficace. Il opère une séduisante synthèse du manga et de la BD franco-belge. Ses personnages sont expressifs et ses dessins font la part belle aux ressenti de chacun. La mise en couleur de Joëlle Comtois est en parfaite osmose avec l'histoire et sa mise en image... Par ses couleurs vives, faisant la part belle aux aplats, elle accentue les frasques de cette bande de potes de la génération Club Dorothée...

Ainsi va la vie est une histoire prenante, bouleversante, d'une incroyable justesse... C'est avec regret que l'on ferme l'album, tant ses protagonistes sont attachants dans leurs imperfections, autant dire dans leur humanité... Si Thierry Gloris est décidément un auteur protéiforme bougrement doué, Frédéric Charve a quand à lui un bien bel avenir devant lui!

Une nouvelle série signée Thierry Gloris qui s’éloigne de sa production habituelle. On est ici assez loin des univers fantastiques tels que Le Codex angélique ou encore Saint-Germain. Cette histoire contemporaine met en scène une ancienne bande de potes, aujourd’hui trentenaires. La vie a suivi son cours et a parfois fait prendre à chacun des chemins un peu différents. Mais aujourd’hui est un jour particulier puisque c’est le jour des retrouvailles… Par de très habiles flashes-back, on découvre le passé de cette bande d’amis : les affinités entres les uns et les autres, l’évolution de leurs relations ou de leurs sentiments. Ces scènes sont en fait bien plus longues que celles dans le présent où chacun semble juste préparer ce jour J. Ces petites coupures nous montrent ce qu’ils sont tous devenus, et ils ont bien changé. Qui aurait parié que le jeune et beau sportif finirait chômeur et dépressif 10 ans plus tard ? L’évolution des personnages est bien traitée et les aventures de cette bande d’amis sont sympathiques à suivre. Il est assez facile de s’identifier à l’un ou l’autre des personnages et les nostalgiques de leurs années fac se retrouveront dans ces histoires de potes et de dragues. Quelques lenteurs se font un peu sentir dans le milieu de l’album, avant de comprendre que toutes ces bribes de souvenirs ne sont pas mises bout à bout par hasard, toutes semblent converger vers une même soirée qui a changé beaucoup de chose. Et puis tel un couperet arrive la conclusion inattendue et émouvante, qui donne tous son sens à ce récit. Un album plein de charme qui amène intelligemment une petite réflexion sur la vie, l’amour, les amis, l’avenir… Un album auquel on repense encore quelques jours après l'avoir refermé.
par Pascal Pawlak