
Quelque part entre « 2001, Odyssée de l’espace » et « Alien, le 8ème passager », Sunshine est un film de science fiction comme on en a compté peu depuis ces chefs d’oeuvre, car il est empreint d’un « lyrisme stellaire » d’une intensité rarement égalée.
En effet, au cœur de cette intrigue d’anticipation se trouve un personnage particulier : notre soleil lui-même. Danny Boyle (« Trainspotting », « La Plage », « 28 Jours plus tard ») parvient à en faire un acteur à part entière de son film, et l’on ne manquera pas d’être sensible à la beauté stupéfiante et pourtant terrifiante de notre belle étoile, largement mise en valeur par les effets numériques employés et le contraste de l’environnement sombre et confiné du vaisseau spatial Icarus II.
Plus encore, Sunshine se drape d’un voile de mysticisme tout ce qu’il y a de plus grisant, car il induit une réflexion fascinante sur le rôle du Soleil dans nos vies terrestres, et donc notre cosmogonie. Le rapprochement proposé entre le Soleil et la notion du divin, qui d’ailleurs effleura nos ancêtres bien avant nous, fait écho à nos sensations les plus primaires et se révèle tout à fait pertinent, en tout cas d’un point de vue biologique et à l’échelle de notre système. Et on imagine sans peine les impressions de voyageurs perdus aux confins de leur micro-univers, confrontés à l’ultime point de repère de nos existences : notre étoile.
Cette confrontation, servie par d’excellents acteurs (avec juste peut-être un Chris Evans trop caricatural) sensés représenter l’humanité toute entière et porter leurs espoirs de rédemption jusqu’à la source première de leurs existences, ressemblent très clairement à un cheminement initiatique, pour demander audience au Soleil.
On pourrait segmenter l’intrigue en deux parties, entre la mise en place et le développement proprement dit de l’intrigue. Paradoxalement, c’est ici la mise en place qui est la plus fascinante, grâce au lyrisme qui baigne l’atmosphère à l’approche de l’étoile, soutenu par une bande originale tout simplement sublime, en phase avec le ton de l’œuvre (à noter que le réalisateur gâche tout de même sa scène de fin avec un générique complètement décalé…ce qui constitue un exploit avec la bande son disponible). Le reste est plus convenu, surtout dans la forme, car l’exercice imposé du huis clos spatial a déjà été tourné dans les tous les sens, et Danny Boyle ne parvient pas, de ce point de vue là, à renouveler le genre. Il est possible que quelques décennies plus tôt (au-delà des considérations techniques, bien sûr), le film ait pu prendre la place de « 2001, l’Odyssée de l’espace » (avec ses inconditionnels et ses détracteurs, ici encore), mais les réalisateurs de science-fiction doivent désormais composer avec des canons bien définis et se heurtent à la difficulté de satisfaire un spectateur connaissant bien trop les ficelles de ce genre de divertissement, pour le meilleur…mais souvent pour le pire. Blasés, on ne peut qu’accepter le décours du film, pour continuer à se gorger de lumière céleste. L’action en devient presque un parasite au plaisir de ceux qui seront sensible à l’essence spirituelle de l’œuvre.
« Sunshine » reste pourtant à mon sens l’un des meilleurs films d’anticipation/science fiction de ces dernières années, dont la clarté mystique n’est estompée que par les ficelles par trop éculées du genre lui-même. Un bain de soleil mystique dont vous devriez revenir illuminé…