Je ne vous répèterai pas encore tout le bien que je pense de cet auteur rock’n’roll qu'est Neil Gaiman (dont je vous invite à lire les livres), mais je ne manquerai pas de vous rappeler que je vous avais prévenu dans ma critique de « Neverwhere » (l’un de ses livres, peut-être le meilleur) que vous alliez entendre parler de lui. C’était il y a presque deux ans, et voilà qu’une adaptation grand public, correctement budgétisée et plutôt lourdement castée (Michelle Pfeiffer, Robert De Niro, Claire Danes, Sienna Miller,…) arrive sur nos écrans. Sachez que Stardust a été un best-seller aux Etats-Unis, ce qui explique certainement qu’il fut choisi pour une adaptation.
Bon, sortir de l’argent pour produire un film c’est une chose, mais adapter correctement une œuvre de fantasy, c’en est une autre. Or, quoi que je ne m’y attendais pas forcément, je trouve que l’équipe et le réalisateur Matthew Vaughn (Layer Cake) sont parvenus –moyennant bien sûr quelques entorses à l’original- à retranscrire l’esprit du roman de Neil Gaiman (que je n’ai jamais pris le temps de critiquer, honte à moi…). Comprenez-moi bien : il ne s’agit là pas encore de chercher à retrouver le pendant visuel d’un roman papier (qui fut aussi roman graphique), mais bel et bien de se laisser aller à ce conte dont la source constitue une trame, et non un carcan.
Encore une fois, il n’est jamais évident de se positionner par rapport aux adaptations (Remember « Le Seigneur des Anneaux »), car rares sont celles qui n’ont pas écorné un souvenir littéraire au passage ; mais si l’on fait l’effort de s’intéresser davantage à l’esprit d’une œuvre plutôt qu’à sa reproduction littérale, alors, « Stardust » est un film réussi.
Il faut dire que Neil Gaiman lui-même s’y est impliqué, en recommandant Jane Goldman (« Dreamland ») pour en écrire l’adaptation.
Entraînant, poétique et esthétique, souvent amusant, le film nous entraîne à la suite de l’innocence incarnée, en quête d’amour, et prêt à cueillir les étoiles pour le trouver. Bon, déjà, si ça c’est pas de la poésie…
Bien entendu, cette quête s’avère plus dangereuse que prévue, et emprunte des voies qui mènent surtout le héros de l’enfance à la maturité, telle une quête initiatique, le tout dans un univers merveilleux où les éclairs se capturent au cœur des tempêtes.
Les décors naturels sont superbes (Ecosse, Islande, authentiques villages médiévaux) et donnent une couleur au monde de derrière « Le Mur ». Cependant, comme pour le livre, ce monde est peu décrit, demeure indistinct et lointain, comme d’ailleurs tout bon univers féerique qui se respecte, sachant garder ses mystères… Les spectateurs gourmands ou curieux en voudront peut-être plus, mais devront se limiter à quelques tableaux grandioses, cocasses ou terrifiants pour se faire une idée du Royaume de Stormhold, car là n’est pas le « cœur » du sujet. Le film est frais, simple et entraînant, avec juste une touche de magie et de poésie pour accrocher les rêveurs et les éternels amoureux (qui peuvent être les deux à la fois). Une sorte de petite lumière sur écran noir. Rien de plus. On passe deux heures à la contempler, ou on se détourne...
Les personnages, surtout, incarnent l’essence de l’œuvre, depuis l’amoureux transi jusqu’aux sorcières étoilophages, en passant par des princes assoiffés de pouvoir et fratricides.
Les acteurs sont tous brillants, et la performance d’un Robert de Niro reste l’un des moments les plus loufoques et divertissants d’un film qui pourtant ne lésine sur quelques effets spéciaux bien sentis. Alors, bien sûr, la vision du monde reste partielle, mais là n’est pas l’essentiel, car Stardust est un conte de fées et se veut d’abord une porte ouverte sur l’amour, l’aventure et la poésie que recèle le mystère de l’inconnu.