Le personnage principal est dessinateur judiciaire. Durant plusieurs décennies, il a été immergé dans de sordides et sanglantes affaires. Mais il y avait sa fille, Caroline, quoi était son rayon de soleil et son équilibre... Lorsque celle ci se donne la mort à la suite d'un viol, le dessinateur va glisser dans la dépression qui guettait son âme meurtrie d'avoir trop côtoyé la lie de l'humanité. Sa vie, c'était Caroline et les assassins. Sa fille morte, il se retrouvait seul, face aux assassins qu'il a croqué durant toute sa carrière et la libération de l'un d'entre eux fait vaciller la raison du dessinateur. Cet homme ne mérite pas de vivre. Il doit le tuer, pour Caroline, pour la venger de ces salauds qui ont pris sa vie... S'arrangeant avec la morale, qu'il tort pour servir ses noirs dessins, il va perpétrer des meurtres de sang froid de taulards fraîchement libérés et ayant payé leur dette.

Le récit, entièrement mené en voix off, est particulièrement poignant. Le lecteur est immergé dans les états d'âme de cet homme tourmenté dont on ignore le nom. Solidement charpenté, le récit ne sombre pas dans l'écueil du sillon tracé par Charles Bronson et son Justicier dans la ville. Nul plaidoyer pour l'auto-défense, juste l'histoire d'un homme ravagé par la vie qui se laisse guider par une folie vengeresse pour donner à sa vie un semblant de sens. Sa folie se fait auto destructrice lorsqu'il se met à sortir avec Léa, une amie d'enfance devenue commissaire et enquêtant sur ses propres meurtres... Et si le lecteur perçoit l'issue tragique du récit, les auteurs ont su par une ultime et audacieuse pirouette lui donner un autre relief en le clôturant par un coup de poing à l'estomac... Du grand art...

Le dessin réaliste de Jean Trolley, saxophoniste talentueux reconverti en auteur de BD, et ses encrages épais, collent parfaitement à la noirceur du récit. La colorisation discrète mais efficace de Camille W. De Prévaux accentue la noirceur de l'intrigue avec finesse et doigté...

Le dessinateur est un excellent diptyque particulièrement sombre qui fait montre d'une remarquable maîtrise, tant au niveau graphique qu'au niveau scénaristique. Les amateurs de polars noirs seront ravis!