Laurent Galendon n'a pas son pareil pour construire une histoire prenante à partir d'un contexte historique précis et finement présenté. Avec les Innocents coupables, il prend pour cadre une colonie pénitentiaire agricole. Derrière ce terme peu évocateur se cache une structure avilissante qui méritera grandement le nom de « bagne pour enfants» qui sera donné plus tard à ce type de structure.

Mais une fois encore, le cadre n'est qu'un prétexte pour explorer les zones sombres et lumineuses de l'âme humaine en raconter le destin édifiant d'une poignée de gamins que la vie a malmené et conduit en ces lieux sinistres; ces quatre gosses que le lecteur avait rencontré dans un fourgon de gendarmerie au cours du premier tome. On apprend à les connaître, à les voir réagir face à l'adversité et aux tragiques épreuves de leur nouvelle vie. Les flashback habilement conduits nous retracent leurs vies passées et le terrible enchaînement qui les a conduit en ces lieux ou règnent la violence et la loi du plus fort, mais aussi cet espoir que certains ont chevillé au cœur, malgré les coups qui meurtrissent leur corps, les brimades et les trahisons abîment leurs âmes... L'amitié semble être la seule issue pour sortir indemne de ce purgatoire...

En confiant le dessin de la trilogie à une jeune dessinatrice désireuse de faire ses premiers pas dans le neuvième art, Laurent Galendon a une fois encore eu du nez. Le trait semi-réaliste et plein de finesse de Anlor (prononcer Anne-Laure) sert fort joliment ce récit dur et intimiste. Les traits et les expressions qu'elles prêtent aux adolescents qui ont échoué  aux «Marronniers » sont d'une grande justesse et sa mise en couleur, déjà très maîtrisée dans La fuite s'est encore affiné, offrant au lecteur des planches somptueuses, découpées avec un grand savoir-faire. Son dessin possède déjà une forte personnalité et une élégance naturelle fort appréciable. Tout porte à croire qu'elle a une grande et belle carrière devant elle!

Les Innocents Coupables est une série édifiante qui lève le voile sur une zone sombre de notre histoire carcérale tout en déroulant impeccablement une histoire pleine d'humanité comme sait les bâtir Laurent Galendon. Ce second tome s'inscrit dans la lignée du premier et promet un final à la fois palpitants et bouleversants...