Entrer dans la légende…
Avec ce dixième tome, Hub clôture magistralement sa série commencée il y a près de dix ans. D’emblée, il se dégageait des premiers albums une puissance saisissante. Son trait et sa narration parfaitement maîtrisées nous immergeait dans un moyen-âge japonais fantastique ou les créatures légendaires prennent vie, pour nous narrer une histoire sombre et épique mettant en scène un rônin tourmenté.
Après maintes pérégrinations, Okko chemine vers son destin, sur le chemin qui le conduit au monastère dans lequel il souhaite se retirer pour tenter de méditer sur son trop lourd passé.
Mais il reste encore des mystères à révéler … Alors que le groupe de chasseurs de démons chemine doucement dans les contrées arides entourant le monastère, ultime étape de l’errance d’Okko, Noshin conte au jeune Tikku le sombre passé de ce guerrier, tout à la fois dur et secret… L’occasion d’en apprendre plus sur le bonze, le rônin et le géant au masque rouge.
S’appuyant sur le japon médiéval légendaire, Hub a su tisser un récit envoûtant plein de mystères, de malédictions, de fureur et de sang. Voilà dix tomes que l’on suit ce groupe atypique d’aventurier chasseurs de fantômes, au cours de cinq diptyques parfaitement calibrés. L’auteur a su faire évoluer ses personnages, les étoffer, les dévoilant peu à peu comme des êtres riches et complexes, avec leur part lumineuse et leurs par de ténèbres, loin de tout manichéisme qui les aurait affadi.
D’emblée, l’auteur a su nous surprendre avec ce groupe hétéroclite mené par un leader charismatique mais cassant, voire franchement despotique. Sans doute était-il audacieux de bâtir une série autour d’un tel anti-héros… mais le résultat étant ce qu’il est, force est de reconnaître que l’audace paye!
Une page du neuvième art se tourne avec ce dernier tome qui couronne une série épique qui fait indéniablement partie des meilleures du genre. Avec cet ultime album, l’auteur prend le lecteur à contre-pied, développant le passé de ses personnages plutôt que leur présent, faisant naître ce faisant une délicieuse frustration chez le lecteur…
Le récit de Noshin, qui nous fait plonger aux origines, s’avère captivant et remarquablement bien conduit. Il tient son auditoire en haleine d’un bout à l’autre de l’album et accentue la noirceur de la série, la concluant de façon tout simplement époustouflante…
Nous ne nous attarderons pas sur le formidable dessin de Hub qui n’a cessé d’évoluer au fil des tomes. Ses planches, remarquablement découpées, sont de toute beauté alors que son sens du mouvement saisissant immergea le lecteur au cœur de l’action…
Puisqu’ « il est souvent plus difficile de finir que de commencer » (Jack Beaurgard, Mon nom est Personne), une série l’envergure d’Okko se devait de finir en beauté… C’est chose faite avec cet album aussi épatant que chargé émotionnellement. Il clôture une série violente et poétique qui s’impose comme incontournable pour les amateurs de chanbara…