



Aurélien Ducoudray et Christophe Alliel nous entraînent dans un récit surprenant et intrigant se déroulant quelques temps après la catastrophe de Tchernobyl…
Tchernobyl, 26 avril 1986. Un improbable enchaînement d’évènement conduit à une série d’explosion qui contaminèrent durablement tout dans un rayon de près de 200 km… Les plus proches villages sont évacués, leur conférant des allures de village fantôme…
Quelques années après la catastrophe nucléaire, un groupe de chasseur entre dans la zone d’exclusion entourant la centrale sinistrée pour y chasser des chiens abandonnés par la population, de peur qu’ils n’agrandissent la zone de contamination. Trente roubles par tête, une petite fortune…
Le groupe de chasseurs est constitué de personnages atypiques, inquiétants ou attachants… Kolia, un ado de 16 ans timide et réservé qui suit contraint et forcé son père, le leader froid et autoritaire du groupe de chasseur. Sputnik, un alcoolique cynique et désabusé fan de groupes de rock interdits. Pravda, un ancien sergent des Spetsial'noïe Naznatchéniyé (Spetsnaz) à la poursuite d’un grand chien noir comme le Capitaine Achab poursuivait son Moby Dick.

Et Petit Père, un tireur émérite aux allures placides dont les trait évoquent ceux de Staline et qui est accompagné de Silence, un chien qui n’aboie ni ne grogne jamais…
Dans leur sillage, le lecteur va découvrir la cité de Pripyat quelques années après le drame. Ils vont y croiser des pilleurs, des équipes de chasseurs rivales, une étrange une vieille dame qui n’a pas voulu quitter la zone et qui a été chargée par les autorités de protéger le patrimoine artistique et politique russe mais aussi des hommes intrigants vêtus de combinaison antiradiations qui fuient le contact. Alors que la catastrophe de Tchernobyl a poussé la Russie un peu plus près de l’abîme, lézardant le bloc de l’est, les survivants de la catastrophe se tournent vers la religion et le mysticisme… Mais surtout, la vie semble avoir perduré dans les ruines de Pripyat où la nature reprend peu à peu ses droits…
Le dessin expressif et réaliste de Christophe Alliel s’avère pour le moins convainquant. Il sert avec une redoutable efficacité le récit décalé et intrigant concocté par Aurélien Ducoudray qui continue d’explorer différents genres avec un talent confondant… La couverture est superbement composée et attire d’emblée le regard alors que ses planches retranscrivent avec efficacité l’atmosphère d’inspiration post-apocalyptique régnant dans ces terres dévastées, où le temps semble s’être arrêté mais où la nature reprend peu à peu ses droits…

Premier volet d’un diptyque, Saint Christophe est un album captivant et déstabilisant car il est difficile de savoir où Aurélien Ducoudray souhaite nous conduire… Son récit ne rentre pas dans une case clairement définie et pourrait tout aussi bien glisser vers le fantastique que rester dans une veine réaliste et c’est ce qui en fait tout son charme…
L’atmosphère quasi post-apocalyptique du récit est formidablement retranscrite par le dessin réaliste et expressif de Christophe Alliel dont le style s’adapte à chacun des récits qu’il met en scène…
Il nous tarde de lire la suite et fin de cette histoire originale et déstabilisante concoctée par un scénariste protéiforme qui explore différents registres avec un talent saisissant…